Chapitre 15 - L'Ours Guérisseur

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Tiliana n'avait agi que par réflexe. Une fois blessée, son instinct de survie l'avait poussé à fuir. Elle avait couru, le plus loin possible. Elle ne pensait plus à rien. L'adrénaline lui avait permis de résister à la douleur pendant un temps. L'esprit et la détermination dont l'Homme pouvait faire parfois preuve était quelque chose de surprenant, mais ne permettait pas non plus de faire des miracles. Elle finit par s'effondrer, un rictus de douleur sur le visage. Il fallait qu'elle réussisse à enlever cette flèche. Il lui fallait un médecin, ou au moins quelqu'un pour la soigner. Elle n'arrivait même pas à voir la blessure.

Louve la rejoignit au moment où elle s'apprêtait à retirer elle-même la flèche toujours fichée dans sa chaire.

— Viens là ma belle... Viens... murmura-t-elle, réunissant ses forces encore disponibles.

Sa plus fidèle amie s'approcha à son appelle. Elle tenta de se redresser et lui caressa les flancs en lui parlant doucement.

— Vas les retrouver Louve. Ramène les ici. Fais vite, mon amie.

La louve disparue aussi vite qu'elle était apparue. Tiliana n'avait plus qu'à attendre. Elle se coucha à terre et essaya de rester complètement à plat. C'était plus prudent. Elle ne voyait pas si elle perdait du sang, et comme la douleur lui faisait de toute façon tournait la tête, elle ne pouvait pas prendre le risque de se déplacer. Elle lutta pour rester réveiller, mais la fatigue et la torpeur qui s'était progressivement installée en elles finirent par l'emporter.

Les muscles de Louve se contractaient sous l'effort qu'elle fournissait. Jamais elle n'avait été aussi vite. Truffe au vent, elle faisait attention à chacune des odeurs qui lui parvenait, elle ne devait pas se faire repérer. Tiliana l'avait recueilli lorsqu'elle avait deux mois, elle n'était encore qu'un louveteau. Elle ferait ce qu'il fallait pour sauver sa maitresse. Ni la pluie, ni le vent, ni le relief ne la gênait réellement. Elle ne mit qu'une journée pour arriver au village où Tiliana l'avait envoyé. Un gros puma qui tournait en rond devant les fortifications en bois faillit l'empêcher de rentrer, mais d'un bon souple, elle réussit à l'éviter et pénétra dans l'enceinte du lieu de vie. Dans cet endroit, elle pouvait marcher à découvert sans craindre pour sa vie. Elle aimait bien ce village. Elle se dépêcha de remonter l'allée jusqu'à la maison principale, qui se trouvait en plein milieu des autres habitations. Tiliana lui avait appris à se rendre là bas lorsqu'un problème survenait. La porte n'était pas fermée, malgré la pluie. Elle y entra sans problèmes et s'ébroua sur le seuil. Les gouttes tombant de son pelage formèrent une flaque sous ses pates. Un lourd rideau s'écarta en face d'elle et une grosse femme aux cheveux gris se mit à râler en constatant la saleté laissée par l'animal.

— Oh non Louve ! Qu'est ce que tu m'as fait là ? Je vais devoir tout nettoyer maintenant.

La louve s'assit et la fixa calmement. La femme réalisa soudain :

— Attends, une minute, où est Tiliana ?

En réponse, elle coucha les oreilles en arrières et se mit à geindre. La grosse femme blêmit, et se précipita vers une armoire du fond de la pièce d'où elle sortit une ribambelle de petites fioles colorées qu'elle plaça dans un grand torchon dont elle noua les extrémités pour en faire un baluchon.

— Vas-y ! Je suis prête, je te suis !

Elle n'avait pas fait trois pas en courant qu'elle était déjà essoufflée, sa surcharge pondérale ne l'aidait pas. Heureusement, elle avait un autre moyen de suivre la louve.

Descendre le chemin étroit le long de la montagne abrupte ne leur pris pas longtemps. Si elle avait mis une journée à l'aller, Louve mit bien moins de temps au retour. Elle entendait le souffle régulier de la femme derrière elle, ainsi que le bruit de ses grosses pates s'écrasant sur le sol à chaque foulée qu'elle faisait.

Tiliana d'Ovra - Les Sans PeupleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant