Salve le apparenze - Sauver les apparences

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Point de vue Cristiano

Suite à la révélation de la grossesse de ma femme, j'étais abasourdi, réellement heureux mais totalement surpris. Il a donné plein de conseils, a prescrit quelque chose contre les maux de ventre violents et nous a conseillé d'aller à l'hôpital pour lancer la procédure de suivi puis je l'ai raccompagné. Une fois remonté dans notre chambre, j'ai retrouvé Reina dans le même état : sous le choc.
En une fraction de seconde, elle s'est levée et a commencé à fermer les valises qui n'étaient pas totalement défaites. Elle a prévenu tout le monde de notre départ et a même appelé au domaine pour dire que nous arrivions dans peu de temps. Résultat, une heure seulement après le départ du docteur nous étions partis.

Voilà maintenant une bonne heure que je roule dans la Jaguar que j'avais amenée spécialement pour la prêter à ma sœur. Quel magnifique moment nous avons passé dans la maison de mon enfance et pourtant, c'est la première fois que je peux avoir un bon souvenir d'un retour chez mes parents. Tout était si beau jusqu'à l'annonce de cette grossesse.
C'est vrai que Reina a pris du poids, qu'elle se sent mal pour des raisons à première vue inexistantes depuis quelques temps mais je n'aurais jamais cru qu'elle était enceinte. Ma femme est enceinte et contrairement à ce que j'espérais depuis les discussions que nous avions eu à ce sujet, elle n'est pas contente. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle saute de joie mais tout de même. Pour moi, c'est autre chose car bien que surpris je n'ai pas pu cacher mon enthousiasme. Elle ne m'a pas laissé le temps de digérer la nouvelle, ni d'en parler ne serait-ce qu'avec elle. Et nous voilà maintenant, murés dans un silence depuis bientôt deux heures au total. Son visage est impassible, elle ne bouge pas, ne dit rien et ne me regarde même pas. J'en ai plus qu'assez et étant donné les circonstances, il est impossible de tenir plus longtemps.

Moi: Comment te sens-tu ?
Reina: Un peu barbouillée mais ça va.

Son ton est plat, je l'aurais préféré froid au moins le connais celui-là. Ce ton plat et sans rien dedans m'est totalement inconnu. Elle regarde dans le vide.

Moi: Et pour la grossesse ?
Reina: Et bien quoi ? Je ne suis pas malade.
Moi: Je veux dire... comment est-ce que tu le vis ?
Reina: Je ne m'y attendais pas. Et je m'en serais bien passée.

En plus de son attitude qui m'empêche de vivre ce moment comme je l'imaginais, elle m'assomme violemment par cette sécheresse.

Moi: Qu'est-ce que tu dis ?
Reina: Je suis encore jeune, j'ai beaucoup de travail et je ne suis pas prête pour avoir un gosse. Ça tombe vraiment mal.
Moi: Est-ce que tu te rends compte de ce que tu dis Reina ?!
Reina: De quoi est-ce que je devrais me rendre compte ? Tu le savais que je ne serais pas la plus heureuse dans tous les cas... arrête d'essayer de faire croire que tu ne t'y attendais pas.

Je crois rêver ou plutôt faire un cauchemar. J'ai faim et je vois une bretelle pour une aire d'autoroute alors je la prends sans lui demander son avis. On s'arrête pour manger et prendre de l'essence. Elle ne me regarde toujours pas et entre dans la cafétéria sans m'attendre. Après avoir fait le plein, je me sers un plateau de pâtes et de boulettes de viande. Je la rejoins à une table où elle est assise seule en train d'éplucher une orange. Je m'assois en face d'elle sans rien dire mais là encore elle ne fait pas l'effort de lever les yeux. Les gens autour nous ont peut-être reconnus et se moquent peut-être de nous. Personnellement je m'en fiche mais être ausculté comme un animal dans un zoo n'est pas un exercice que j'apprécie.
Je mange avec finalement peu d'appétit la moitié de mon assiette en levant rapidement les yeux de mon repas, je vois qu'elle m'observe tout en mangeant son orange. Il ne reste que deux morceaux qu'elle engloutit aussitôt.

Reina: On y va.

Elle se lève de table et prend la direction de la voiture directement sans même m'attendre ou bien se retourner. Elle m'emmerde. Je termine très vite fait mon plat avant de regagner à mon tour le véhicule garé dehors.
Elle s'assoit sur le siège passager en croisant les bras, je m'installe puis nous repartons dans un silence plus que lourd. Quelques kilomètres passent, j'ai décidé de ne pas faire le premier pas. Ce qu'elle a dit tout à l'heure tourne dans ma tête en boucle : c'est horrible pour moi. Je pourrais en vomir rien que d'y penser. Je suis trop contrarié, trop tendu pour lui parler d'abord, elle m'énerve plus qu'elle ne la jamais fait en ce moment.

Trono - Parte DueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant