Chapitre 30 : Rencontre

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Elle était présentable. Un véritable miracle ! Et elle était à l'heure. Un véritable miracle aussi ! Maintenant elle était devant cette porte. Le poing collé au bois, prête à frapper. Mais elle n'osait pas. Sa vie entière avait l'air de se jouer sur cette entrevue.

« Allez, à trois. Un... Deux... Trois ! ». Elle se répétait mécaniquement cette phrase sans jamais passer à l'action.

« Je suis absolument ridicule ! Allez, à trois ! Un ! Deux ! Et t... »

-Bonsoir.

Eil sursauta. Elle se retourna d'un coup et manqua de se cogner à son fiancé.

-Hé ! Attention !

Décidément, ça commençait bien ! Pesked se trouvait à quelques centimètres d'elle. Il avait rangé au placard son uniforme et avait enfilé à la place de simples habits bleus que n'importe qui avait les moyens de porter. Dans ce couloir sombre, allumé principalement par des plantes fluorescentes, sa peau semblait très sombre. Il la dominait de quelques centimètres seulement. Ainsi, il était bien moins impressionnant que sur les couvertures de magazines, si on faisait abstraction de ses cheveux turquoises.

-Excusez-moi votre altesse. Vous m'avez surprise.

De un : devait elle l'appeler « votre altesse » alors qu'ils étaient du même rang ? De deux : pourquoi le vouvoyer alors qu'il l'avait tutoyé dans sa lettre ? Une intelligence surhumaine, tu parles ! Elle devait se reprendre. Rapidement. Elle lui fit une révérence discrète qui n'avait rien de forcée ou d'exagérée.

-J'admets avoir été un peu stressée à l'idée de ce premier rendez-vous. Mais je suis sincèrement ravie de te rencontrer Pesked.

-Pas de problème.

Il semblait aussi gêné qu'elle. Il hésita quelques secondes avant de lui ouvrir la porte de la petite salle de réception.

-Je t'en prie.

Eil murmura un « Merci » avant d'entrer. Une table avait été dressée et les plats déjà posés sur la table.

-Je me suis dit... que nous ne voudrions pas être dérangés.

-C'est une bonne idée.

Elle essayait de se mettre au niveau des efforts du prince, mais elle avait beau chercher elle avait du mal à donner de la hauteur à cette conversation. Elle cherchait désespérément dans les fins fonds de sa mémoire quelque mot qui aurait un peu de prestance.

-Assieds-toi, je t'en prie.

-Merci, fit Eil une fois de plus.

Ils s'installèrent chacun à leur place autour de la petite table. Ils esquivaient tout croisement de regard. Après quelques politesses comme « Tu veux que je te serve quelque chose ? » ou après que Pesked lui présente quelques spécialités d'algues qui venaient de chez lui, Eil n'y tenant plus finit par se lancer dans le grand bain :

-Alors qu'elles sont les informations que tu as trouvé sur moi ?

-Comment ça ?

-Je parle de ta lettre. Très courageux d'ailleurs. Tu disais que tu avais trouvé des informations sur moi. N'y vois aucun reproche, je suis juste curieuse.

-Je vois. Au lieu de « Présente toi », tu veux qu'on se dise ce que l'on sait l'un sur l'autre.

-Vois ça comme un jeu.

-Très bien mais, je t'en prie, commence.

L'atmosphère semblait déjà se détendre.

-Je n'ai pas grand-chose. Je sais juste que tu es l'héritier de Morglas et le chef des armées.

Lorsque Les Arbres Auront Des CrocsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant