Chapitre 59 : Cette vie qu'elle aimait

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Eil avait réussi à conduire Tor-pen et son père jusqu'à la cachette de Trede. Ces deux derniers furent ravis de se retrouver bien que Trede l'exprimât beaucoup moins.

Eil prit quelques minutes pour réexpliquer son plan. Rester là jusqu'au lever du jour et partir chez les Krapad si elle ne revenait pas les chercher. Ils s'organisèrent aussi pour la suite. Tor-pen promit de garder en sécurité Strangourien de sa fille dans son palais à Yenbras. Il ne manquait plus que le trajet pour se rendre dans son pays glacial, mais ils se mirent tous d'accord sur le fait qu'ils trouveraient bien un moyen.

Strangourien, l'ancien roi de Wezenn, ne chercha pas à empêcher l'inévitable. À savoir laisser sa fille courir un grand danger en allant à la rencontre d'un potentiel fou furieux.

-C'est la seule solution, annonça Eil.

Son père acquissa gravement.

Au moment de partir Eil sentit une main accrochée à sa manche.

-Je ne veux pas partir de la maison, fit Trede.

Ma foi, Eil n'avait jamais vu le palais comme un foyer. Visiblement ce n'était pas le cas de la benjamine.

-Je suis sûr que tout se passera bien, menti Eil. Quand je me serais réconciliée avec Pesked tu pourras rentrer à la maison.

-Quand tu seras reine, il faudra que tu penses à faire la restauration des structures médicales dans les régions reculées. Il faudra relancer aussi une période de réquisitionnent de fruits pour contrer de futurs risques de famine.

-Je ne sais même pas si je régnerais sur Wezenn, tu sais.

-Il vous faudra un régent jusqu'à ce que vous ayez un enfant en âge de gouverner alors. Tu pourrais demander à Pesked que se soit moi dans quelques années, s'il te plaît ? J'ai beaucoup étudié la conjoncture du pays et les nouveaux enjeux de la politique internationale. Avec de bons conseillers, je suis certaine de pouvoir le faire.

Eil passa la main dans les cheveux blonds de sa petite sœur.

-Tu ressembles beaucoup à maman, tu sais. Je suis certaine que tu ferais une reine merveilleuse.

-Reine régente, la corrigea Trede.

-Oui oui, bien sûr, fit Eil pensive. Il faut que j'y aille. Le soleil va se lever dans quelques heures.

Il y eut de nouveaux au revoir, de nouveaux adieux, puis Eil reprit le chemin du palais en quête de son ancien fiancé. Une idée germait en elle. Un plan inconcevable qu'elle parvenait à peine à repousser au fond d'elle.




Il ne restait plus que deux heures avant le lever du soleil et Eil désespérait de trouver Pesked. Le palais était grand et comptait d'innombrables chambres. Elle ne le trouva pas dans les suites royales, dans les chambres d'amis, ni dans les chambres des fonctionnaires, ni les chambres des gardes gradées. Il semblait être nulle part. Elle suivait les indices : les salles où il restait des traces de repas, les lieux utilisés pour les réunions. Son instinct la guida peu à peu vers l'étage des domestiques.

La grande Reine Rouanezh II n'avait jamais apprécié le surplus de personnels. Depuis qu'elle était née, Eil n'avait jamais vu plus de 60% de l'effectif possible. Là c'était bien pire. Eil avait remarqué au vue de la dégradation des jardins royaux que la plupart des jardiniers avaient été renvoyés. Quant aux domestiques de maison, ils avaient été réduit au strict minimum, si ce n'est encore moins.

Lorsque Les Arbres Auront Des CrocsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant