Chapitre XV

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Juste, une question avant de commencer : vous attendiez à ma réponse ?

Il y avait de la musique.

De la musique joyeuse, un air entraînant et rythmé, un de ses morceaux créés pour faire danser le peuple.

Nous traversions un village lorsque nous avions commencé à entendre cette musique. Je vis Nessi se redresser aussitôt, tendant tout ces sens dans la direction de cette musique. Earine en faisait de même, et j'étais certaine que j'avais eu une réaction similaire.

Nous ne prononçâmes pas un mot, mais fûmes irrésistiblement attirés par la musique. De toute manière, elle était sur notre chemin. Nous nous en approchâmes de plus en plus, intrigués, et, comme par magie, plus la musique se faisait forte, plus les villageois se faisaient nombreux. Le soleil brillait au-dessus de nos têtes.

Enfin, nous arrivâmes à la place principale du petit village, remplie de monde. Les habitants avaient sortis leurs plus beaux vêtements, restant tout de même bien modestes, tenaient des ornements de fleurs et de chèvrefeuille. Un sourire se peignit sur mes lèvres. Un cercle avait été laissé pour les danseurs, comme nous le constatâmes en y arrivant. La musique et les rires emplissaient mes oreilles en une merveilleuse mélodie.

Nessi éclata de rire et battit des mains. Earine semblait presque sautiller sur place d'excitation.

Un groupe de jeunes filles, passant devant nous, entrainèrent Nessi avec elles dans la ronde. Elle m'adressa un regard qui demandait clairement la permission et je hochais la tête. Elle s'éloigna alors en riant.

Du coin de l'œil, je vis Aggur et Earine échanger un regard et, l'instant d'après, ils s'élançaient joyeusement à leur tour. Je me mis à rire en regardant la place, récoltant un regard surpris de Legolas.

J'observais nos compagnons. Le visage du prince était aussi impassible qu'à son habitude, Targen observait les festivités avec curiosité, un certain malaise à peine perceptible dans les yeux, et Tauriel semblait fascinée, un sourire au lèvres.

Prise d'une soudaine audace, je me tournais vers cette dernière avec un sourire malicieux.

- Voulez-vous danser ? Ou bien les convenances vous en empêchent ?

Son regard hésita entre les danseurs, moi, et le prince Legolas, son chef. Celui-ci ouvrit la bouche, semblant vouloir dire quelque chose, mais elle le coupa en se tournant vers moi.

- Au diable les convenances, dit-elle, les yeux brillants.

En éclatant de rire, nous nous élançâmes à notre tour parmi la foule. Je fus très surprise en la voyant calquer son pas avec perfection sur celui de ses voisins. Je trébuchai, m'empêtrai avec mes propres pieds et tentai d'en rire. La musique battait dans mon cœur.

Je tournoyais autour de la place en chantant à tue-tête, frappant dans mes mains et sautant en cadence. Du coin de l'œil, je vis Earine et Aggur, éblouissants de grâce et de beauté, qui dansaient mieux que personne d'autres, les yeux dans les yeux. Ils s'attiraient des regards surpris et l'admiration de tous, mais ne semblaient pas en avoir conscience.

Nessi tournoyait avec ses amis nouvellement trouvés, les yeux fermés. Elle avait une couronne de fleurs dans les cheveux et sa jupe violette tournait autour d'elle en une corolle de fleur.

On déposa une couronne sur ma tête à moi aussi, les fleurs glissées dans du chèvrefeuille tressés. Elle était magnifique et, d'un seul coup, j'eus l'impression d'être une de ces héroïnes de romans assistant à une fête donnée en leur honneur. Peut-être au mariage de leur soeur, pourquoi pas.

Je me pris au jeu, m'imaginai une robe semblable à celle d'une des jeunes villageoise, des rubans dans mes cheveux qui seraient enfin domptés. Je m'imaginai libérée de tout soucis, seulement soucieuse de savoir avec quel amis je passerais le lendemain.

Je ne pouvais pas m'imaginer jolie, cependant, cela aurait brisé mon rêve et je le savais. Il ne servait à rien de rêver l'impossible sauf se faire du mal à soi-même. Mais cela fonctionna. Mon corps et ma tête me parurent plus légers, mes bras et mes jambes moins embarassants.

Du coin de l'œil, je vis Tauriel qui riait aux éclats, des fleurs tressées dans ses cheveux roux par des mains expertes. Aggur faisait tournoyer Earine, si vite que je me demandais comment elle parvenait à garder l'équilibre. Nessi dansait aux bras de ses amis. Un peu plus loin, j'entraperçus le visage stupéfait du prince Legolas. Il parlait à un villageois, mais ses yeux suivaient quelqu'un dans la foule de danseurs. Et Targen... Eh bien, il semblait s'être éclipsé, comme cette fois à l'auberge. J'espérais qu'il était plus à l'aise là où il se trouvait.

Reprenant le refrain, je me mis à chanter plus fort avec les villageois, laissant ma voix prendre de la puissance. Mais pas trop, je n'en avais pas envie aujourd'hui. Je chantai, tournoyai tout autour de la place, sautai et frappai dans mes mains en cadence.

Le temps d'un instant, d'un court instant, sous le soleil de l'été et les voix et la musique, il me sembla que mes pensées se faisaient moins sombres, que l'étau qui enserrait ma poitrine se défaisait, que mon cœur se calquait sur celui de ce village.

Le temps d'un instant, d'un court instant, des fleurs dans les cheveux et le sourire aux lèvres, il me sembla presque que j'étais heureuse.

Trois paires d'yeux... bleues -Le royaume du NordOù les histoires vivent. Découvrez maintenant