Chapitre XI

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Les Wargs arrivaient droit sur nous.

Et je perdis toutes notions. Toute mon attention était concentrée sur mes mouvements, ma respiration que je devais réguler, et surtout, contrôler mes émotions. Je ne devais pas me laisser impressionner. J'étais plus forte qu'eux. Plus puissante.

En fait, une bonne partie des bêtes furent tuées par les flèches de la Forêt Noire, et pendant un moment, je n'eus pas à faire face à un de ses monstres. Mais, bien vite, un Warg contourna ses compagnons et fondit sur nous, nous prenant par la gauche.

Targen s'élança aussitôt. Effrayant d'aisance, si à l'aise que c'en était terrorisant, chacun de ses mouvements semblait avoir une précision mathématique, chacune de ses actions était calculée. Pendant une longue seconde, je restais bouche bée devant ses capacités, avant qu'un cri de Legolas ne me ramène à la réalité.

Un Warg, blessé par une flèche et déjà à demi achevé, se précipitait vers moi. Je brandis ma dague, mais elle fut inutile, il me l'arracha d'un coup de patte. Je tombais assise à terre, comme une enfant.

J'entendis le prince pousser un juron alors qu'il tentait de me rejoindre, mais déjà le Warg s'avançait vers moi. Il sentait atrocement mauvais, l'odeur me prit à la gorge, me noya dans la puanteur et le dégoût.

J'étais une mouche prise dans une toile d'araignée. Sûr de son prochain repas, le Warg marchait lentement vers moi, un mélange de bave et de sang coulant de ses babines. Mon cœur battait à tout rompre, le souffle me manquait.

- Aveuglez-les ! S'écria alors la voix de Targen. Laurelin, utilisez votre fichu don et aveuglez-les !

Et je fis ce qu'il me disait.

Je fis naître le noir dans mon esprit, je redevins la petite fille effrayée par l'obscurité de sa chambre. Je me concentrais sur l'intensité du noir imaginaire devant mes yeux, de la nuit sans lune, sans étoile et sans lampe. Et j'envoyais cette vision cauchemardesque dans toutes les directions, dans tout les esprits que je pouvais sentir.

Ce fut facile, puisque ce n'était que des animaux.

Mais autour de moi, j'entendis le chaos. Les créatures s'étaient mises à couiner, hurler à la mort. Celle face à moi, ne pouvant me trouver, claquait des mâchoires dans le vide.

Et mes sœurs hurlaient à pleins poumons. Le prince Legolas se tenait debout, les bras le long du corps, l'air horrifié, les yeux vides. Tauriel s'était recroquevillée sur elle-même, Aggur agitait désespérement les doigts devant son visage. Mes sœurs, terrorisée, ne bougeaient plus, hurlant de terreur.

- Pas nous ! Entendis-je alors.

Je me tournais vers Targen. Il avait achevé sa victime, et se déplaçait à présent avec prudence vers celui qui se trouvait non loin de moi, tatant à peine du pied sur le sol.

- Vous pouvez voir ?! M'étranglais-je, comprenant que j'avais également aveuglée toute personne présente.

- Non, dit-il, son regard noir horriblement vide. Mais je sais que ce n'est que dans votre tête. Ce n'est pas réel. Rendez-nous la vue, Laurelin.

Et c'est ce que je fis. Je dus me concentrer bien plus fort, démêler dans cette pelote de fils lumineux que formaient les esprits alentour dans ma tête ceux de nos compagnons. Je ne sus comment je parvenais cet exploit, perdant peu à peu le peu d'énergie que je possédais, mais ils recouvrirent la vue comme je le souhaitais, me demandant cependant un effort de concentration supplémentaire.

J'étais si focalisée sur ma tâche que je remarquai à peine que les combats avaient repris. Le Warg qui m'avait attaquée avait été tué par les soins de Targen.

Ce fut seulement lorsque j'entendis un hurlement d'Aggur que je me retournais.

Juste à temps pour voir ma sœur Earine trébucher et basculer en arrière.

Droit dans le feu.

Trois paires d'yeux... bleues -Le royaume du NordOù les histoires vivent. Découvrez maintenant