Chapitre 12

4.1K 540 580
                                    

À mesure qu'elle se rapprochait de la demeure d'Hilda, Lyssandra sentait le doute l'envahir. La route cahoteuse qu'il fallait emprunter pour venir rendre visite à la louve lui donnait plus envie de faire demi-tour que de poursuivre son chemin. Des ronces menaçaient de lui piquer les chevilles, de basses branches d'arbres semblaient avoir pour unique objectif de lui crever les yeux, et de profonds nids-de-poule la faisaient trébucher tous les trois pas...

Julian marchait à ses côtés et étrangement, il avançait sans le moindre problème. Ils s'étaient retrouvés au croisement à l'heure qu'ils avaient convenu la veille, après être rentrés trop tard du village pour que Lyssandra puisse aller voir Hilda. Le jeune homme devait sûrement connaître la route et ses pièges par coeur, ce qui expliquait la disparition de son habituelle maladresse. Ou alors, il a toujours fait semblant d'être un bon à rien et va t'assommer dès votre arrivée, puis t'enfermer dans une réserve où tu serviras de repas à sa vampire de propriétaire, songea le cerveau trop agité de la Neutre.

— On ne peut pas dire que ce soit vraiment très accueillant par ici, déclara-t-elle pour s'éloigner de ses pensées morbides. Tu m'as dit qu'Hilda était plutôt riche, elle n'a pas les moyens de refaire cette allée ? Cela doit drôlement endommager son carrosse...

Elle venait de déraper contre une petite cavité aux parois fragiles. Julian savait exactement où marcher pour les éviter, alors elle tenta de le suivre à la trace.

— Je crois qu'elle veut justement éviter de recevoir trop de visites, répondit-il. Elle est assez solitaire.

Voilà qui était très rassurant... S'ils capturaient Lyssandra, personne ne l'entendrait jamais appeler à l'aide. Dame Miranda et ses filles n'étaient évidemment pas au courant de son escapade. Si elle disparaissait, les recherches qu'elles engageraient n'aboutiraient à rien et la vieille vampire grincerait des dents de ne pas avoir eu le plaisir d'achever son jouet préféré elle-même.

— Pourtant, en tant que parente de la famille du Grand Alpha, elle doit bien avoir un rôle à jouer, non ? se hasarda la jeune fille. Ne doit-elle pas assister à des réceptions ou à des mondanités du même genre ?

Elle avait conscience que ses questions étaient stupides, mais parler lui permettait de moins réfléchir à ce qu'elle était en train de faire. Elle espérait simplement que Julian ne se rendait pas trop compte de sa nervosité.

— Tout ce qu'Hilda doit faire, c'est ne pas compromettre l'image de la famille du Grand Alpha. Le reste est en option. Ce n'est qu'une tante éloignée, elle a juste obtenu ce domaine et quelques résidences dans les autres régions.

Lyssandra commençait à croire que la pauvre femme s'était faite arnaquée en héritant du domaine le plus insalubre que possédait le dirigeant des loups, lorsque l'allée prit fin.

D'abord, elle ne vit qu'une montagne de lierre grimpant. En se concentrant, elle parvint à discerner des murs ocre ainsi que de grandes vitres. Cette bâtisse n'avait rien à voir avec le sinistre manoir de Dame Miranda. Tout semblait en parfaite harmonie avec la nature. Certaines branches d'arbres caressaient les avant-toits tant la végétation était proche du bâtiment. Le lierre grimpait en sinuant le long des murs et le haut du porche situé dans un angle était recouvert de mousse. Étonnamment, les lieux ne donnaient pas l'impression d'être négligés. On aurait simplement dit que cette maison avait poussé toute seule dans la forêt.

— Je sais que ça a l'air assez... sauvage, commenta Julian comme Lyssandra restait plantée à une dizaine de mètres de l'entrée sans dire un mot.

Sauvage. C'était exactement le mot qui convenait, mais dans son plus beau sens.

— C'est magnifique, souffla la jeune fille.

Cendres de Lune [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant