Partie 16

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Port de Casablanca – Maroc
35h après avoir quitté l'Espagne.

Au large depuis le cargo, les lumières vives des côtes marocaines qui perçaient la nuit noire paraissaient si petites. Alors que désormais, elles étaient de plus en plus éclatantes et de plus en plus étendues, à mesure que le hors-bord s'approchait du rivage.

Assise sur mes genoux, Paloma semblait éblouit et captivée par le spectacle qui se jouait devant ses yeux. Difficile à croire qu'il y a encore moins d'une heure elle était plongée dans les bras de Morphée. Dieu merci sa précieuse innocence d'enfant l'aidait à ne pas mesurer les enjeux et les raisons de cette balade nocturne sur l'océan Atlantique. Pour elle, ce n'était qu'une étape d'un grand voyage qui nous conduirait tous les trois dans un lieu paradisiaque, pour des vacances familiales prolongées.

Une nouvelle fois, je me demandais quel genre de mère pouvais-je être pour embarquer une petite fille de pas tout à fait 3 ans dans un tel merdier ? Cette petite colombe méritait mieux que des parents à temps partiel, l'arrachant de tout ce qu'elle avait toujours connu pour l'emmener vers une contrée étrangère. Mais égoïstement, nous ne pouvions nous séparer d'elle pour cette aventure rocambolesque. Puisque quelque part, elle était le seul lien qui nous permettait de rester connectés avec la réalité.

Je ne préférais même pas imaginer ce qui aurait pu se produire, si Andrés n'avait pas eu cette petite fille dans sa vie, qui l'obligeait à garder les pieds sur terre, et à atténuer son ego surdimensionné. L'issue de ce braquage n'aurait sans doute pas été le même. Et c'est en chassant ces idées noires de mon esprit, que mon regard se posa sur l'homme pour qui j'étais prête à n'importe quoi, et surtout à toutes les folies dans lesquels il m'entrainerait.

Assis en face de nous, Andrés semblait totalement détendu et sûr de lui, comme toujours, et quelque part, je crois que son assurance m'aidait à me rassurer et à garder le cap.

Après plusieurs minutes de trajet, le hors-bord fini par atteindre progressivement le port, pour s'amarrer au quai. À notre descente du bateau, nous fûmes accueillis par un autre nottambulo [oiseau de nuit], qui tout comme le premier était un homme d'honneur de la famille. Ce dernier nous attendait près d'une Mercedes Viano noire, une sorte de camionnette sophistiquée à vitres teintées, ayant pour vocation le transport de personnes que l'on pourrait qualifier de VIP.

Une fois les pieds à terre, Andrés nous ordonna à Paloma et moi de nous mettre en sécurité dans la voiture. Sans un mot, je m'exécutais et m'installais sur la banquette arrière avec notre fille. Pendant que Monsieur Berlin de son air supérieur, guidait les deux hommes de mains pour le chargement dans le coffre de nos nombreux et précieux sacs de voyage.

À présent, confortablement installée sur l'un des trois sièges en cuir noir, j'en profitais pour m'emparer d'un miroir de poche, caché dans l'une des poches de mon sac à main. En effet, ce trajet nautique à grande vitesse que nous venions d'effectuer avait certainement dû mettre à mal ma coiffure. C'est pourquoi, la femme coquette que je suis s'empressa de constater les dégâts. Par chance, ce n'était pas aussi terrible que je l'imaginais. Voulant tout de même prêtre à mon avantage, pour moi-même, mais surtout pour mon mari que je n'avais pas vu depuis 5 mois, j'en profitais donc pour appliquer une touche de rouge sur mes lèvres.

-  J'peux mette ça ? Demanda Paloma de sa petite voix.

-  Te mettre de quoi mon trésor ? La questionnais-je en finissant d'appliquer mon maquillage.

-  De ça ! Dit-elle en désignant mon rouge à lèvres. J'ai envie d'en mette pour me faire jolie à papa.

-  Pour te faire jolie pour papa ?

Andrés & Fiorella de Fonollosa [EN PAUSE] | La Casa de PapelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant