Snow

Chapitre 39

Note importante en fin de chapitre

TRISTAN

Le menton posé dans le creux de mes bras croisés sur le dossier de la chaise de bureau, je fais tourner cette dernière une énième fois sur ses roulettes. Prenant une grande inspiration, je reprends mon histoire, que Michael n'écoute, je le sais, qu'à moitié.

« Et elle m'a envoyer paître, elle m'a ignoré pendant tout le retour. Elle ne m'a même pas laissé la raccompagner chez elle en voiture, elle a dit qu'elle préférait rentrer à pieds. Non mais sérieux, à pieds! Qui préfère rentrer à pieds? Je comprends pas ce qu'il s'est passé, comment ça a pu se dégrader aussi vite... Je veux dire, j'imagine que je suis en tort, mais honnêtement je n'ai rien fait... Et puis je veux qu'elle me fasse confiance, Diane est juste une amie. Les crises de jalousie pour rien, c'est juste pas possible! Mais malgré tout ça me fait chier, elle me manque. Je sais même pas où on en est et ça me fait peur... »

J'avais décidé d'aller chercher Alice après son entraînement. Je ne sais même pas pourquoi j'ai fait ça, par habitude sans doute. Je n'avais pas de véritable raison de ne pas le faire non plus, d'ailleurs. A vrai dire, je ne sais pas ce que je suis supposé faire, ce qu'elle attend de moi. J'ai pensé que c'était ce qu'elle voulait, passer du temps ensemble pour que la situation s'arrange. J'ai pensé qu'en ayant ce petit moment qui n'appartient qu'à nous deux, qui n'a jamais appartenu qu'à nous deux, tout serait normal, et que ce serait comme si nous ne nous étions jamais disputés.

« Tu m'écoutes, au moins? » je grogne en me penchant pour attraper un sweat qui traîne par terre dans la chambre désordonnée de Michael pour lui lancer le vêtement dessus.

Il sursaute en levant le nez de son portable qu'il consultait pour la vingtième fois en cinq minutes, un geste qui commence à m'agacer prodigieusement. Depuis tout à l'heure, je lui raconte ma vie, et il n'écoute visiblement rien. En redescendant des Arcs, j'ai filé chez lui, ce qui était prévu dès le départ car nous voulions passer l'après-midi à travailler. Cependant, la séance boulot s'est très vite transformée en confidences. Enfin plutôt en un long monologue de ma part alors que lui restait distrait. Malgré toute mon amitié pour lui, Michael ne sera visiblement jamais une aussi bonne oreille attentive qu'Alice.

« Oui, quoi?

- Tu m'écoutais pas, là. » je soupire.

Il passe sa main sur son front avec un soupir et range son téléphone dans sa poche. Son air tracassé me met enfin la puce à l'oreille et je commence à prendre conscience qu'il n'est pas dans son état habituel.

« Non, désolé mec.

- Qu'est-ce qu'il t'arrive? »

Je cale à nouveau mon menton sur mes bras croisés et hausse les sourcils, tout ouï.

« Rien, rien. »

Je me redresse et m'étire en faisant craquer mes articulations en le mettant au défi d'un regard complice, tentant vainement de paraître imposant.

« Soit tu me dis, soit je me lève et je te prends ton téléphone de force.»

Michael me fixe pendant un instant, dubitatif, avant d'éclater de rire, me vexant au passage. En même temps, il faut dire que je ne suis pas très crédible: nous mesurons la même taille, s'il n'est pas un peu plus grand, et il est clairement deux fois plus large que moi. Cependant, ma piètre tentative semble porter ses fruits puisqu'il roule sur le dos et croise ses bras derrière sa tête en poussant un profond soupir, les yeux rivés au plafond.

« Je sais pas trop... Elle me parle plus depuis la soirée, je sais pas ce que j'ai fait, et... putain je devrais même être pas en train de te dire ça...