8

376 71 11
                                    

La place Agora était survolée par un silence de mort, seulement altéré par ses pas qui résonnaient. Ici aussi la lumière artificielle était omniprésente, presque dérangeante. Évidemment, aucune trace d'Ostrace.

Ari avait été si naïf de croire qu'il avait une chance de trouver le savant, sur une place publique et en pleine nuit. Mais maintenant qu'il était là, après avoir fugué de chez lui, il n'avait aucune envie d'y retourner. Après tout il était majeur, il était libre de faire ce qu'il voulait ! Enfin en théorie...Car si l'usage de montre nous retirait toutes nos libertés, ne pas les utiliser nous rendait-il libre pour autant ?

Sa montre ! Mais bien sûr, elle allait enfin pouvoir lui servir !

— Servus !

— Oui.

— Où habite Ostrace...?

Aristoclès prit alors conscience qu'il n'avait aucune idée du nom de famille de cet homme.

— Deux personnes prénommées Ostrace sont répertoriées dans un rayon de cent kilomètres, intervint la montre. L'habitation la plus proche se trouve à six-cent mètres d'ici.

Six-cent mètres, c'était à quelques rues à peine, alors il pouvait tenter le coup. Ari se mit donc à suivre le chemin indiqué par sa montre, chose qu'il ne faisait que très rarement. Finalement il devait reconnaître que dans certaines situations, les montres pouvaient s'avérer utiles ; à juste mesure bien sûr.

— Vous êtes arrivés.

Devant lui se trouvait une maison, coincée entre deux immeubles et entourée d'un portail. Elle semblait comprimée entre les deux imposants bâtiments, comme étouffée mais bien décidée à résister. Si cette maison était vraiment celle d'Ostrace, alors elle lui correspondait parfaitement.

D'un pas incertain, Ari avança jusqu'au portail et sonna.

Il attendit quelques minutes, dans le silence de la nuit, n'osant pas bouger. Peut-être s'était-il trompé d'endroit ? Il allait déranger les personnes qui vivaient ici. Peut-être devrait-il partir ? Il ne voulait embêter personne.

Alors qu'il s'apprêtait à faire demie tour, le portail s'ouvrit en grinçant.

— Ari ?

— Bonjour...Enfin bonsoir. Désolé de vous déranger à cette heure.

— Tout va bien ? Demanda Ostrace avec inquiétude. Ne restes pas dehors, viens.

Ari baissa la tête, et le suivit à l'intérieur, mal à l'aise de s'être imposé ainsi. Surtout qu'il ne portait qu'un pyjama et des chaussettes.

Ostrace lui fit traverser un petit jardin pour rentrer dans sa maison. Elle n'était pas très grande ni très luxueuse, mais dès que la porte fut fermée, le jeune homme se sentit apaisé, comme si toute la tension qu'il avait retenu s'était envolée.

La pièce à vivre était claire, occupée par un canapé en tissus, des grands tapis et des coussins qui jonchaient le sol. Une petite cuisine se trouvait au fond, près d'un escalier, tandis que l'autre côté était occupé par une bibliothèque, et un piano.

Ari écarquilla les yeux : il n'avait jamais vu tant de livres réunis en un seul endroit !

— Je t'en prêterai quelques uns si tu veux. Maintenant, raconte moi ce qu'il t'arrive pour venir en catastrophe chez moi la nuit et en pyjama ?

— Désolé...Je ferai peut-être mieux de rentrer.

— Ne dis pas de bêtise, si tu es parti c'est qu'il y avait une raison, et tu ne me déranges pas de toute façon. Je n'avais rien prévu de mieux et je suis seul comme tu peux le constater.

Quand Platon sortit de sa caverne [ Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant