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Le lendemain matin, Ari passa les premières heures dans l'attente, espérant voir le philosophe rentrer au bercail. Mais il avait trop d'espoir. La colère et l'inquiétude se succédaient, revenaient et s'affrontaient : où était Ostrace ? Lui était-il arrivé quelque chose ? Les avait-il abandonné ? Etait-il un lâche ? Avait-il menti ?

Les heures passaient et le jeune homme ne savait plus quoi penser, quoi faire. C'est alors que son regard tomba sur le cadre photo qu'Ostrace avait reçu à Noël. Minerva, Diane et Ganymède souriaient tous trois avec joie, ils entouraient le philosophe qui, lui, souriaient avec fierté, sûrement destiné à ses disciples et amis. La photo avait dix ans, et pourtant, tout quatre n'avaient que très peu changé. Ils semblaient si proche...Et eux, pouvaient-ils savoir où se trouvait Ostrace ?

Ari prit donc la décision de les contacter, à commencer par Minerva. Celle-ci lui répondit rapidement et lui avoua qu'elle n'avait pas de nouvelles de leur ami. Elle proposa donc à Ari de passer le voir, puisque Diane travaillait ce jour-ci.

En attendant son arrivé, le jeune homme pensa à appeler Ganymède, qui semblait être au cœur du problème, mais celui-ci ne répondit pas.

— Il est où Os ? Demanda alors Elpis.

Le petit garçon venait de se réveillait et tenait fermement entre ses petites mains l'ours en peluche qu'il avait eu à Noël.

— Ne t'inquiètes pas, il rentre bientôt. Viens déjeuner, on doit aller faire les courses après.

Les deux frères partirent donc acheter de quoi remplir les placards, et à chaque coin de rue, Ari ne pût s'empêcher de regarder tout autour, espérant y trouver son ami. Mais en vain.

Lorsqu'ils rentrèrent à l'heure du repas de midi, ils eurent la surprise de trouver Minerva qui les attendait devant la porte. Il la fit donc entrer et prépara le repas pour quatre personnes.

— C'est étrange, ce n'est pas son genre de disparaître comme ça, expliqua Minerva lorsqu'Elpis partit jouer dans sa chambre. Il s'est déjà éloigné de nous avant, mais jamais en fuyant.

— Peut-être ne voulait-il pas m'expliquer la vérité.

— Non, même s'il ne le voulait pas, il aurait trouvé le moyen de changer de conversation, il est très doué pour ça.

En effet, Ari avait remarqué cette caractéristique chez son ami.

— Mais je me demandais quelque chose. . . reprit-il.

— Oui ?

— Eh bien, Mélétos, le cousin de Ganymède, a dit qu'Ostrace était. .
un manipulateur. Qu'il nous éloignait de nos familles, et c'est vrai. . . c'est, c'est ce qu'il s'est passé avec moi, Ganymède et vous même, avec Diane, vous avez toutes les deux dit ça à Noël.

La trentenaire prit quelques secondes pour réfléchir, le regard fixé dans le vide. Ses manières lui firent penser à celles d'Ostrace lorsqu'il cherchait comment aborder un sujet. Enfin, elle leva le regard vers le sien, et donna son point de vue :

— Je ne pense pas qu'Ostrace ait voulu nous manipuler. Certes, le schéma semble se reproduire à chaque fois : d'abord avec Gany, puis Diane et moi quelques années plus tard, et enfin toi. Pourtant, est-ce lui qui est venu nous chercher à chaque fois ? Nous a-t-il forcé à le suivre d'une quelconque façon ? Au contraire, j'ai le souvenir d'avoir passé des jours à le chercher, j'en voulais toujours plus, comprendre, apprendre, Diane et moi le poursuivions sans relâche dans l'espoir de lui arracher ne serait-ce que quelques mots.

Ari se rappelait avoir eu les même sentiments, la même impatience.

— Mais ce fut douloureux, poursuivit la femme. Douloureux d'ouvrir les yeux, de constater que les gens qui nous entouraient, n'étaient que des prisonniers sans âme, sans couleur ou saveur. Alors il était normal de se sentir seul, différent, à l'écart, c'est pourquoi nous nous sommes tour à tour éloignés de nos familles. Ils ne pouvaient pas nous comprendre, et nous même ne les comprenions pas.

Quand Platon sortit de sa caverne [ Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant