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Ostrace, déstabilisé par le comportement de son jeune protégé, s'agenouilla près de lui dans l'entrée.

— On est où Ari ? Demanda Elpis avec inquiétude. C'est qui le monsieur ? Je veux maman.

Cette dernière remarque ne fit que redoubler les pleurs de l'adolescent, qui se sentit alors incapable de faire quoi que ce soit d'autre.

Les rues avaient été si vides, si silencieuses, si froides et il n'avait pas réfléchi, pas écouté les plaintes d'Elpis, pas lâché son petit corps fermement maintenu dans ses bras ; il avait simplement couru vers le seul endroit qui s'imposait à son esprit détruit, son seul refuge.

— Tu es Elpis ? Je m'appelle Ostrace, ne t'inquiètes pas petit, tu es en sécurité ici. S'il te plaît raconte moi ce qu'il s'est passé chez toi.

— Mais je sais pas, dit-il en se mettant à pleurer. J'arrivais pas à faire dodo parce que j'ai mal à la tête beaucoup, maman m'a dit de faire dodo. Mais Ari il est venu et il m'a enlevé de mon lit et il a couru. Je veux rentrer. . . Je suis fatigué. . . Et puis pourquoi Ari il pleure ? C'est un grand, ça pleure pas les grands.

— Vas t'allonger sur le canapé si tu veux, moi je vais prendre soin de ton grand frère, d'accord ? Et après je te ramènerai chez toi.

Le garçon acquiesça et se dandina jusqu'au canapé de ses petits pas si innocents, laissant Ostrace seul avec Ari.

— Ari, tu es en sécurité maintenant, parle moi s'il te plaît. Je t'aiderai, quoi qu'il se passe.

Il passa un bras autour des épaules tremblotantes de l'adolescent, qui se reposa de tout son poids dans cette étreinte rassurante et protectrice. Ses pleurs ne tarissaient pas, mais son esprit avait repris ses tours infernaux, réfléchissant de plus en plus rapidement. Maintenant, il n'était plus seul, il était avec Ostrace, son ami, son mentor, son philosophe, celui en qui il plaçait toute sa confiance. Alors il devait lui dire ce qu'il s'était passé, ce qu'il avait vu. Ostrace saurait quoi lui dire, il saurait quoi faire.

Il tentât de réduire ses sanglots, afin de pouvoir prononcer quelques mots le plus distinctement possible, mais la tâche était plus ardue qu'il n'y paraissait :

— Ils sont tous. . . Je lisais, mais il n'y avait plus de bruit. . .

Dans les bras du plus âgé, l'adolescent perdait sa souffle, malgré ses nombreuses inspirations.

— Respire Ari, tout va bien maintenant, tu es en sécurité.

Mais ses paroles qui se voulaient rassurantes furent niées par un hochement de tête, alors il resserra son étreinte.

— Dans le salon. Ils étaient. . . Tous. Puis les agents du gouvernements sont arrivées et. . . et. . . Et ils les ont emmenés. Ils sont parti. Je-je. . . je suis tout seul.

— Non, non tu n'es pas seul, d'accord ? Je te le promets. Je suis là, et il y a ton petit frère, il a besoin de toi. Et toi tu peux compter sur moi.

Ostrace avait peur de comprendre, mais l'arrivée des agents du gouvernements ne pouvait signifier qu'une chose, une chose terrible. Alors il serra le jeune homme tout contre lui, essayant de réchauffer ce corps gelé.

— Viens, lève toi, l'incita Ostrace d'une voix douce. On va rejoindre ton petit frère.

Il l'aida à se relever et garda sa main sur son épaule jusqu'à ce qu'ils arrivent dans le salon, où ils trouvèrent Elpis, endormi sur le canapé.

— Je vais le monter dans une chambre en haut, il dormira mieux.

Ari vit son mentor prendre son petit frère dans les bras et l'emmener loin de lui. Mais lui resta immobile, incapable du moindre mouvement ; il ne pouvait que regarder, comme spectateur, prisonnier de son propre corps.

Quand Platon sortit de sa caverne [ Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant