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Comme convenu par Sophia, Ari rejoignit la jeune femme au parc qu'elle appréciait tant, en haut de l'immeuble, le vendredi qui suivit. Il avait été surpris qu'elle ait convaincu Pyrilampe de lui donner ce jour de repos si facilement, même le député Dracon avait cédé à sa demander de libérer Mélétos.

— C'est super beau ici, observa Mélétos en arrivant. Alors on fait quoi aujourd'hui ?

— Que diriez-vous d'aller nous amuser un peu, proposa Sophia. On travaille beaucoup trop ! Qu'as-tu à nous proposer Ari ?

Si ça ne tenait qu'à lui, il les aurait tous les trois emmenés lire un bon livre, mais il doutais que cela puisse plaire aux deux autres.

— Il y a un parc où les jeunes se rendent pour jouer. Comme nous sommes vendredi je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de monde, mais on peut aller y faire un tour si ça vous dit ?

Le jeune homme les emmena donc jusqu'au parc en question où ses deux frères se rendaient régulièrement pour y retrouver leurs amis. Lui même n'y allait jamais, d'une part car il n'aimait pas cet endroit trop bruyant, mais aussi car il n'avait aucun ami à emmener. . . Sauf aujourd'hui. Finalement, peut-être pouvait-il faire des efforts avec Mélétos et Sophia ? Ces deux jeunes de son âge ne l'avaient jamais rejeté ou même regardé de travers depuis qu'ils se connaissaient, ils étaient gentils et ne disaient pas qu'il était anormal dès qu'il parlait de livres. Alors oui, il pouvait bien faire des efforts avec eux, au lieu d'essayer de s'en débarrasser.

— C'est sympa ici, commenta la jeune femme en arrivant. Pourquoi tu ne m'y as jamais emmené ?

Le parc était entièrement goudronné, délimité par des bacs à fleurs. A l'intérieur se trouvaient un terrain de basket et de football, où Marcel se rendaient souvent, des tables de ping-pong et des balançoires où les enfants se battaient pour pouvoir être le premier à s'y asseoir. Parfois, Ari pensait qu'il aurait aimé être comme eux, insouciant, inconscient, conforme ; et heureux. Il aurait sûrement été plus proche de ses frères et auraient joué avec eux au lieu de s'enfermer dans sa chambre, il aurait écouté sa montre et serait allé dans une grande école le formant à il ne savait quel métier, puis il aurait peut-être rencontré quelqu'un que sa montre lui aurait conseillé d'approcher, ils auraient sympathisé, puis se seraient rapprochés ; peut-être aurait-il trouvé l'amour de sa vie, peut-être auraient-ils fondé une famille, et élevés des enfants, des enfants qui auraient été insouciant et heureux...Tout cela paraissait idyllique, mais tellement faux. Jamais il n'aurait pu être comme les autres, heureux de rien et de tout. Car ce bonheur que tous semblaient atteindre si facilement était superficiel, si fade et pestilentiel : il suffisait de regarder sa famille lors de la mise à jour, ils avaient été totalement perdus, sans repères, incapables de faire la moindre choses par eux-mêmes ! Alors comment pouvaient-ils être heureux ? Comment faisaient-ils pour ne jamais remettre en cause leur vie ?

Sous ses yeux, Mélétos et Sophia avaient investi une table de ping-pong et jouaient comme des enfants à se renvoyer la balle. Ils riaient, se lançaient des regards tantôt compétiteurs, tantôt complices.

— Ari, tu viens compter les points ?! L'appela Sophia avec joie.

Éloignée de son nouveau bureau et de ses responsabilités, la jeune femme semblait être redevenue aussi humble et insouciante qu'avant. Ari fut heureux de la voir perdre son air condescendant, alors il céda et se joignit à eux. Lorsque Sophia perdit le match, ce fut Ari qui prit sa place dans la petit compétition improvisée.

— Les deux pongistes sont aux coudes à coudes, commenta Sophia avec sérieux. Si le grand Ari Logos marque ce dernier point, il remportera la finale de la coupe du monde de ping-pong, mais sinon, il laissera une chance au jeune champion Mélétos Dracon de remporter la médaille ! Ari effectue le service, mais Mélétos répond par un revers ! Cette manœuvre parfaitement exécutée met en difficulté notre grand champion. Pourtant il ne tire pas sa révérence et renvoit la balle à son adversaire, le rebond et si proche du bord, Mélétos arrivera-t-il à la rattraper ? Oui il a réussi ! Il renvoie la balle à son adversaire avec une nouvelle ferveur, déterminé à prendre sa revanche, et c'est un coup fatal pour Aristoclès Logos ! Le grand vainqueur de cette finale est Mélétos Dracon !

Quand Platon sortit de sa caverne [ Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant