15- Epouvante

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- Alors, Severus, as-tu passé un bon Noël ? demanda le portrait d'Albus Dumbledore avec son éternel air malicieux.

- Ne faites pas l'innocent, Albus, maugréa Rogue en plantant son regard noir dans les yeux pétillants de son vieil ami.

Celui-ci émit un petit rire.

- L'écrivain chauve est un bon ami à moi, avoua-t-il enfin.

- Sans blague, marmonna Rogue avec humeur.

Il rouspéta encore un moment dans sa barbe en regardant le feu qui grondait dans sa cheminée.

- Veux-tu me raconter avec tes propres mots ? demanda Dumbledore d'un ton compatissant qui énerva Rogue au plus haut point.

- Il n'y a rien à raconter, alors laissez-moi lire en paix, Albus, soupira le Maître des Potions.

- A raconter, peut-être pas, mais à noter dans un calendrier, j'en suis sûr, répondit Dumbledre avec un sourire entendu.

- Les allusions vaseuses n'amusent que vous, vieux cornichon sénile, marmonna Rogue.

- Je parlais du sourire qui éclairait ton visage lorsque tu es revenu dans tes appartements hier soir.

- Je ne souriais pas.

- Bien sûr, alors tu avais mal aux dents et ce n'était qu'un affreux rictus qui témoignait de ta douleur ? rit Dumbledore d'un air triomphant.

- Albus, plus vous vieillissez, plus vous devenez puéril.

- Je ne vieillis pas, Severus, je suis mort, se moqua Dumbledore.

- Je ne trouve pas ça drôle, répondit Rogue d'un ton soudain froid.

Toute lueur d'amusement qui avait jusque là éclairé son regard sombre avait disparu.

- Mon garçon, la mort n'a rien de tragique...

- ...seuls ceux qui restent sont malheureux, je sais, murmura Rogue.

- Il n'y a pas lieu d'être malheureux en parlant de la mort, dit Dumbledore d'un ton doux.

- Sauf que c'est moi qui vous ai tué, Albus.

- Sur ma demande.

- Je vous ai tué.
De mes propres mains.
De ma propre baguette.

- Sur ma demande, répéta Dumbledore d'un ton légèrement anxieux, comme s'il s'attendait à ce que Rogue s'énerve.

- Vous étiez mon seul... le seul qui... m'ait jamais fait confiance, chuchota Rogue.

Il s'agitait dans son fauteuil.
Il n'était pas doué pour les aveux, encore moins pour les compliments.
Un malaise s'établit dans la pièce.
Il leva le regard vers Dumbledore, qui l'invita à continuer d'un geste.
Il grogna, refusant de se prêter au jeu de la confidence.
Mais finalement, il avoua ce qui lui pesait étrangement sur le coeur.

- Je vous ai tué, et par cet acte, je me suis fait encore plus détesté qu'avant... notez bien que je ne croyais pas ça possible, record battu, ricana Severus d'un ton aigre.
Mais je vous ai enlevé la vie, vous qui étiez notre...mentor...à tous.
Mon mentor.
Le seul en qui j'avais confiance et qui m'écoutait.
Qui savait ce que j'étais vraiment.
Cet acte m'a condamné, vous le savez, n'est-ce pas ?
Condamné à la solitude.
Mais la Bataille s'est finie, contre toute attente j'étais toujours vivant...
Les souvenirs que j'avais confié à Potter m'ont discrédité.
Mais ils ont toujours peur de moi.
Et surtout, vous êtes toujours là...
En tableau.
Bien sûr, quelque part je suis... j'accepte votre présence car vous êtes parfois de bon conseil.
Et de bonne compagnie, même si ça me dépite de vous l'avouer.
Et je dois vivre chaque jour avec votre portrait, profitant de nos distrayantes joutes verbales mais me remémorant à chaque seconde que c'est de ma faute si vous n'êtes aujourd'hui qu'un tableau.
Un vulgaire tableau.

Behind His Cold EyesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant