14- Joyeux Noël

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Hermione ouvrit les yeux d'un coup, tirée du sommeil par une angoisse irrationnelle et cependant pressante.
Elle se laissa le temps de s'habituer à l'obscurité de la pièce.
Ces réveils brutaux étaient devenus une routine pour elle. Elle se réveillait en sursaut chaque nuit, toujours dans la même tranche horaire (soit entre deux heures et quatres heures du matin) et essayait chaque fois de se rendormir sans succès.

Cette fois, elle refusa de rester allongée à attendre un sommeil qui ne viendrait plus.
Elle se redressa, raide et fragile comme une poupée, et resta assise un moment sur le bord de son lit, les pieds dansant dans le vide.
Elle barra l'accès de son esprit à toutes les pensées douloureuses.
Elle se força à maintenir loin d'elle toutes les images qui d'ordinaire tournoyaient éternellement dans sa tête.
Elle aurait tout donné, en cet instant de solitude dans la pénombre d'une pièce qui lui était encore inconnue, tout donné pour extraire son cerveau de sa tête, son cerveau et son coeur asséché d'avoir trop saigné, pour les déposer tous les deux sur la plus haute des étagères qu'elle distinguait à côté de son lit.
Et laisser ces deux encombrants et déchirants organes pourrir dans la poussière.
Inaccessibles et inutiles.
Elle aurait tant aimé qu'ils disparaissent, emportant avec eux les battements affolés d'un muscle défaillant, les intolérables pulsions qui rythmaient ses pensées.

Elle essuya sans y penser une larme qui avait roulé le long de sa joue, et se mit debout vaillamment, empêchant ses jambes de trembler en se cramponnant aux bords du lit.
Elle attrapa sa baguette d'une main incertaine, l'agita un peu.
De la lumière éclaira sa nouvelle chambre.
Elle promena un regard vide autour d'elle, faisant maintenant connaissance avec les pièces qui seraient désormais ses appartements, pour une durée indéterminée.

Sa chambre était grande.
Trop grande.
Et vide.
La fenêtre à côté de son lit laissait entrevoir une nuit étoilée.
Une porte au fond du mur d'en face, qui donnait sur une petite salle de bain.
Elle enfonça ses orteils dans un gros tapis rouge devant le lavabo, soupira, et sortit de la pièce.

De retour dans la chambre, elle remarqua une autre porte, à côté d'une penderie vide de tous vêtements.
Elle poussa cette porte, la laissant ouverte (décidant aussitôt de ne jamais fermer les portes qui communiquaient entre les pièces, ne supportant pas de se sentir enfermée) et s'avança dans le salon.
Une petite bibliothèque (pour l'instant aussi vide que sa penderie) à gauche de la porte, contre le mur.
En face, une cheminée où ronronnait avec conviction un feu flamboyant.
Une table basse devant ce même feu, entouré de deux fauteuils en cuir.
Des étagères à droite de la porte.
Des étagères encore à côté de la cheminée, mais cette fois disposées perpendiculairement au mur, de façon à créer une sorte de séparation dans la pièce.
De l'autre côté de ces étagères, un bureau et sa chaise.
Le bureau qui abritait désormais son secret dans le premier tiroir.
Le mot de Lestrange.

Hermione secoua la tête pour éviter cette pensée, dont la seule évocation faisait trembler son coeur.
Elle alla s'asseoir dans un des deux fauteuils devant la cheminée, ramena ses genoux contre son menton, et regroupa les pans de la cape de Rogue autour de sa silhouette.

Tu crois être en sécurité, ici ? demanda la Voix.

Hermione grimaça.
La Voix ne posait que trop rarement des questions, et elles étaient toujours à double-sens.
Voire même parfois ironiques.
Comme à l'instant...

- Je suis à Poudlard, répondit Hermione d'un ton qu'elle voulut assuré.

Tu n'es donc pas en sécurité, déduisit la Voix.

- Bien sûr que si.
C'est l'endroit le plus sûr qui existe.

Le ton d'Hermione indiquait clairement qu'elle était sur la défensive.
Elle en voulut soudain à la Voix.
Elle essayait de se rassurer, d'éloigner d'elle doutes et peurs, et la Voix lui jetait toutes ses craintes à la figure.
Bien sûr qu'elle ne se sentait pas en sécurité à Poudlard.
Plus que chez ses parents (mes parents sont morts, geignit une petite voix en elle), certes.
Mais le mot qu'elle avait reçu la veille était la preuve même qu'elle était surveillée.
En danger.

Behind His Cold EyesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant