10- Happy Birthday, poupée

1.3K 81 77
                                    

Ce matin-là, Hermione s'était réveillée avec une boule dans la gorge qui obstruait sa respiration.
Elle savait que le soir même, sa maison accueillerait une dizaine de personnes qui lui étaient chères...avant.
Non pas qu'elle ne les aimait plus.
Mais elle ne voulait tout simplement pas les voir.
Elle ne saurait pas quoi dire, et elle se doutait qu'eux non plus, ne sauraient pas quoi lui dire. Elle avait peur de ce qui pourrait se passer. Surtout que la "fête" allait durer toute la soirée. Et Hermione en était terrifiée.
Les invités devaient arriver vers 18h00.
Et elle savait parfaitement à qu'une heure plus tard, à 19h00 pile, il faudrait qu'elle soit seule. Son corps ne s'était pas sevré des Doloris que Bellatrix lui avait quotidiennement infligé pendant des jours et des jours.
Elle continuait à souffrir selon les échéances, sans qu'elle ne puisse rien y faire, subissant la mécanique bien réglée de son corps.

Il va falloir faire un effort, lui dit la Voix, alors qu'à midi, elle était assise à la table de la cuisine, en compagnie de ses parents qui mangeaint.

- Je sais, répondit-elle.

Elle ne vit pas ses parents échanger un coup d'oeil désespéré.
Elle ne se rendait même pas compte que lorsqu'elle répondait à la Voix (la Voix de Severus Rogue, lui rappelait parfois sa conscience d'un air moqueur, ce qui la rendait si honteuse d'elle-même qu'elle en pleurait), elle le faisait à voix haute, comme elle en avait Tu pris l'habitude dans le cachot de Bellatrix.
Et évidemment, personne ne pouvait savoir qu'elle parlait à quelqu'un, quand elle jetait de temps en temps une petite phrase comme cela, sans rapport aucun avec ce qu'il se passait autour d'elle.

- Tu veux essayer de manger quelque chose, ma chérie ?

- Je préfère garder de la place pour le gâteau, murmura Hermione avec un pauvre sourire qui lui écorchait les joues.

Ce qui était un mensonge, bien sûr.
Et ses parents, tout comme elle, n'étaient pas dupes.
Le silence revint autour de la table.
Les premiers jours, quand Hermione était revenue chez elle, Mr et Mrs Granger avaient bien essayé de jouer le jeu.
De la distraire, de lui parler, comme l'avait conseillé Mme Pomfresh.
Mais, au fil des jours, les monologues des parents s'étaient fait plus décousus.
Moins fournis.
Pour finir par n'être plus que silences gênés.

Hermione sentait bien qu'elle rendait ses parents malheureux.
Elle savait qu'elle aurait du faire un effort. Sourire.
Parler.
Elle l'aurait bien voulu.
Mais c'était physiquement impossible.
Elle n'avait pas la force de faire semblant.
Elle n'avait pas l'envie de jouer le jeu, de donner le change.
De vivre.
Et elle avait honte.
Surtout depuis deux jours, quand ses parents avaient insisté pour la faire examiner par un de leurs amis.
Elle avait protesté du bout des lèvres (c'était là les seules protestations qu'elle pouvait émettre), expliquant que Mme Pomfresh avait fait tout ce qu'elle pouvait pour elle.
Mais ses parents avaient insisté.

- Il n'y a rien que vous puissiez faire...il me faut du temps, se lamentait-elle.

- Non, Hermione, il faut que tu manges.

- Il doit y avoir un moyen magique, je vais...

- Hermione, la magie ne fait pas tout, tu sais.

- Mais...

- Laisse-nous nous occuper de toi, ma puce.
Si c'est la seule chose que nous puissions faire pour toi, laisse-nous...

Hermione avait cessé de se débattre.
Mais si elle avait su ce qui allait lui arriver, peut-être qu'elle aurait continué à refuser une aide moldue.
Car le verdict était : sous-nourrie (pour autant que le médecin avait pu en juger, puisqu'il était impensable qu'il voie son corps).
Evidemment, son estomac était si souvent contracté par la peur et le désespoir qu'il ne laissait passer aucune nourriture.
Et le médecin moldu avait été intraitable.
Il l'avait traînée à l'hôpital.
Elle en était ressortie avec une sonde naso-gastrique, et une envie de mourir.
Le tuyau qu'on lui avait enfoncé dans le nez lui procurait une impression extrèmement désagréable.
Elle avait l'impression d'être une moins-que-rien, une petite gamine à problème.
Plus du tout une talentueuse sorcière.
Elle n'avait pas besoin de cet accessoire ridicule, qui la gênait.
Puis elle s'était ensuite fait une raison.
Elle avait accepté, pour que ses parents se sentent moins malheureux et inutiles.
Elle n'avait rien dit, elle tolérait, bien obligée, ce bout de plastique dans son corps, qui déversait en elle de la nourriture liquide pour éviter qu'elle ne disparaisse en fumée, et c'est tout. La vie continuait.

Behind His Cold EyesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant