16 Juin

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Le lendemain, la décision était prise. Lara vint réveiller Evgeny.

— Il va être temps.

Jasper hocha la tête et Evgeny dut défaire son étreinte. Il s’abaissa une dernière fois au niveau de Jasper. Délicatement, il posa ses lèvres sur celles gercées du jeune homme. Le baiser était si léger, mais rempli de promesses. Evgeny se recula à regret et laissa sa place à la jeune femme qui s’activa.

— Courage Jasper. Tout va bien aller. A ton réveil tu seras tiré d’affaire.

Le jeune homme leur fit confiance, et alors que la perfusion débitait dans ses veines un liquide âpre, ses fonctions vitales ralentirent, son cerveau se mit au repos. Le corps de Jasper s’immobilisa dans une chope de plomb, ses paupières se fermèrent toutes seules. Le jeune homme dériva vers l’inconscience, plongé dans un lourd coma. Seuls les moniteurs prouvaient qu’il était encore vivant.

Evgeny balada une ultime fois ses yeux sur le corps frêle du jeune homme. Si tout fonctionnait, dans quelques semaines, quelques mois, il le retrouverait, il l’entendrait à nouveau débattre sur une théorie scientifique, critiquer le raisonnement d’un de ses camarades, démarrer au quart de tour lorsqu’il avait une idée ou tout simplement rougir sous son charme naturel. Si tout se passait bien. Sinon… Evgeny ne s’attarda pas là-dessus. Il avait une mission à accomplir et si le cerveau de Jasper s’était mis sur pause, l’équipe n’était pas au repos pour autant. Ils avaient encore du pain sur la planche.

*

Ils s’étaient regroupés au laboratoire avec William, et ils discutaient de leur manque de résultats, mais la venue du russe les interrompit. Sans se préoccuper de leurs regards curieux, il s’installa confortablement.

— J’ai de quoi vous aider.

Ils se redressèrent interloqués. Quand Evgeny sortit de sa poche un petit carnet à couverture de cuir noir, qu’ils reconnurent immédiatement comme étant celui de Jasper, ils s’approchèrent curieux.

— Jasper vient de me donner ses dernières notes, il espère que ça vous mettra sur la bonne voie, et que vous pourrez le sauver.

Robert lui arracha presque les notes des mains. Ses yeux parcoururent rapidement les lignes, s’agrandissant au fur et à mesure.

— Mais oui ! C’est peut-être ça, se réjouit-il pour l’une des premières fois.

James et Amélie lurent à leur tour, devenant de plus en plus excités.

— Pourquoi n’y a-t-on pas pensé ?

Amélie sautillait sur place, un immense sourire barrant son visage, tandis que James courait partout comme un fou.

— Calmez-vous !

La voix de Robert les ramena à l’ordre.

— Ça ne sert à rien de s’exciter. Rien ne nous assure que cela fonctionnera. Ne crions pas victoire trop tôt.

L’homme prit la direction du groupe. Il donna des ordres clairs et précis pour coordonner leur travail. Il fallait rester concentré pour ne pas échouer si proche du but. Evgeny et William les laissèrent dans ce monde où ils n’avaient pas leur place. Ils déambulèrent dans le couloir, désert à cette heure-ci.

— Comment as-tu eu ces notes ?

Evgeny s’arrêta, il aurait aimé ne pas avoir à s’expliquer, William risquait de mal prendre la situation, mais il ne pouvait pas lui mentir.

— Lara m’a demandé d’aller voir Jasper. Elle avait peut-être une solution pour le sauver, ou du moins lui donner un peu de répit.

William plissa les yeux suspicieux.

— Que lui avez-vous fait ?

— Elle l’a plongé dans le coma.

La réaction de l’homme ne se fit pas attendre. Son coté sanguinaire ressurgit.

— Comment as-tu osé ? gronda-t-il.

William frappa le mur sous la colère, le coup résonnant à travers tout le bâtiment.

— C’était la seule solution.

— Tu aurais pu m’en parler avant. J’aurais été là à ses côtés.

— Le temps pressait, se justifia-t-il.

— Ah oui. Alors tu t’es dit que ta seule présence suffisait. Tu n’es qu’un égoïste. Comme toujours tu ne penses qu’à toi.

— Je t’interdis de dire ça ! cria Evgeny. Je souffre tout comme toi. Et crois-moi ça n’a pas été une décision facile à prendre.

— Comment peux-tu dire ça ! Toi au moins tu as pu lui dire au revoir. Imagine qu’il ne se réveille pas…

— Je t’interdis d’y penser, le coupa le russe.

Le ton monta entre les deux hommes et ils en vinrent aux poings. Ils ne durent qu’à Luke, qui les sépara rapidement et efficacement, pour ne pas se retrouver défigurés. Ils seraient quittes pour quelques ecchymoses, en revanche leurs habits avaient souffert.

— Calmez-vous. Ce n’est pas en vous battant que vous l’aiderez.

Les deux hommes reprirent leur souffle se calmant progressivement. Ils continuèrent leur combat par attaques visuelles.

— Vous devez faire front commun.

Une fois sûr qu’ils ne se sauteraient pas dessus dès qu’il aurait le dos tourné, Luke les abandonna, lui avait d’autres tâches à accomplir que de s’occuper de leur dispute de gamins. Il laissa les deux hommes totalement défaits. Ils eurent honte de leur comportement si immature, mais dans une telle situation difficile de ne pas craquer. Ils avaient beau être des militaires, des hommes surentrainés, ils n’en demeuraient pas moins humains.

QUAND LA NUIT S'ABATTRA Où les histoires vivent. Découvrez maintenant