Le Roi en Exil, tome 2 : Niall [EN PAUSE]

5.0 : Lochlainn & Doyle

Doyle revint vers le camp la mine sombre.
Depuis trois mois, ils cherchaient sans répit Brogan et le roi. Jusque là, ils étaient revenus bredouille. Et aujourd'hui ne faisait pas exception à la règle.

À la lisière de la clairière, il imita le trille d'une sitelle et attendit, immobile.
Quelques secondes plus tard, le même chant lui fit écho.
Il pénétra dans la clairière.

Lochlainn était assis devant un petit feu, un tasse d'étain à la main. Le connaissant, Doyle aurait parié qu'il y avait plus de gnôle dedans, que de café. Voire pas de café du tout.
Le tête baissée sur sa boisson, il ne prit même pas la peine d'ouvrir les yeux pour vérifier qui était l'intrus.

Doyle savait pertinemment qu'il avait été repéré bien avant d'arriver à proximité.
Lochlainn avait un don hors du commun, une oreille si fine qu'il aurait pu entendre un moucheron voler à une lieue et le retrouver.
Il s'assit en face du guerrier sans ouvrir la bouche. Il n'y avait rien à dire. Encore une fois, la piste n'avait mené à rien.

Lochlainn finit par relever la tête pour boire et son regard croisa le sien. Ils n'avaient pas besoin de parler pour savoir que ça faisait bien trop longtemps qu'ils étaient livrés à eux-même pour qu'il y ait la moindre chance qu'il retrouve quelqu'un.
Le royaume était grand, mais pas à ce point-là.

Lorsque leur camp avait été attaqué, ils avaient rebroussé chemin malgré les ordres de Brogan. Ils avaient eu le plaisir de faucher plusieurs Kingars avant de devoir décamper à nouveau.
Ils pensaient suivre Magnus et Ciáran quand ils s'étaient enfuis vers l'est, mais ils ne les avaient jamais rejoins, et au lieu de perdre du temps à les rechercher, ils avaient préféré foncer vers le nord, direction qu'aurait du prendre leurs compagnons, justement. Mais les faits étaient là : il n'y avait personne.

Bordel, ils avaient tous pris une direction différente, au lieu de suivre les ordres de Brogan.

Lochlainn devait reconnaître que, même s'il haïssait Brogan, il avait tenu l'équipe soudée avec brio. Sans ses ordres ils auraient tous fait n'importe quoi. Lui, le premier.
Il avala une nouvelle gorgée de l'alcool qu'ils avaient réussi à dégoter dans un petit village quelques jours auparavant.
L'alcool n'était pas excellent, mais il faisait son office.

— On devrait se renseigner du côté des comptoirs, proposa Doyle.

Lochlainn grimaça.
Les comptoirs...
D'affreux endroits où l'on pouvait trouver de tout, des pierres précieuses à l'esclave sexuel — prohibé, bien sûr, mais il n'y avait personne pour venir vérifier—, en passant par les denrées de première nécessité.

Des coupes-gorges obligatoires pour les marchands et ceux qui cherchaient des marchandises... ou des renseignements.
Lochlainn cracha par terre avant de se lever.

— Va pour ces petits paradis ! lança-t-il avec un rictus. Avec un peu de chance, j'égorgerais un ou deux de ces esclavagistes. Ça me changera les idées.

Doyle afficha une mine amusée. Il savait très bien que Lochlainn ne rigolait pas le moins du monde à ce propos. La dernière fois qu'ils s'étaient rendus dans l'un de ces endroits, il avait dû l'empêcher de faire un massacre. Il avait sauvé deux hommes sur les cinq que le guerrier avait décidé de tuer.