Lochlainn avançait d'un pas rapide et traversait le rideau d'arbres l'esprit en ébullition, ses pensées toujours tournées vers l'esclavagiste.
Il n'avait aucun sentiment de regret. Ces personnes-là ne méritaient pas de vivre, ils lui avaient trop pris.S'il n'avait pas été engagé dans la garde, il aurait sillonné le pays pour les éliminer tous, un par un.
Depuis quelques minutes déjà, sa nuque le démangeait. Il ralentit l'allure, les sens en alerte. Ce sentiment d'être observé tiraillait les muscles de son cou comme si quelqu'un s'amusait à le gratter de ses ongles.Une sensation désagréable, d'autant plus pour quelqu'un qui ne supportait pas d'être touché.
Avec une prudence acquise au cours de ses mois d'entraînement, il changea de directement pour éviter de mener ses espions jusqu'à l'endroit où était cachés les chevaux.Sans en avoir l'air, il dessina un grand arc de cercle, comme s'il retournait vers le comptoir. Arrivé dans un passage où les buissons étaient plus touffus, et les arbres plus nombreux, il accéléra d'un seul coup l'allure pour disparaître dans la végétation.
Il ne fallut que quelques secondes à la personne qui le suivait pour surgir, essoufflée, les yeux écarquillés de peur.Accroupi, Lochlainn observa un long moment le jeune garçon qui semblait le chercher.
Il s'était rhabillé, mais son corps maigre laissait apercevoir des traces de coups et d'autres violences auxquelles il ne voulait pas réfléchir.
Il se redressa brusquement.Le gamin poussa un cri de surprise mêlée de terreur et recula de plusieurs pas. Ses yeux noirs, trop grands pour son visage, restèrent braqués sur lui alors que l'immense guerrier se rapprochait.
Au lieu de se pousser, il retint son souffle et protégea sa tête de ses bras lorsque Lochlainn passa à côté de lui pour le dépasser.— Dégage, gamin.
Le guerrier reprit sa route sans plus faire attention à l'enfant.
Quelques minutes plus, lorsqu'il se retourna, le garçon marchait sur ses pas, à quelques mètres derrière lui.
Il s'immobilisa, rebroussa chemin et l'apostropha :— Fiche le camp de là, morveux !
Le garçon se figea mais ne bougea pas d'un pouce.
Lochlainn jura copieusement et repartit, l'enfant toujours sur ses talons.
Il le suivit jusqu'aux chevaux, où Doyle l'attendait déjà. Ce dernier fronça les sourcils en regardant leur invité surprise et se tourna vers son ami.— Qui est-ce ?
— J'en sais foutre rien, cracha Lochlainn avec énervement. Il n'arrête pas de me suivre !Doyle haussa les sourcils, puis se tourna vers le garçon.
— Qu'est-ce que tu veux, petit ?
Mais l'enfant restait les yeux braqués sur Lochlainn et ne répondit pas. Doyle se tourna vers le guerrier, perplexe. Son regard alla de l'un à l'autre, jusqu'à ce qu'il remarque les taches de sang sur sa main.
— Bordel, Loch ! Qu'est-ce que tu as encore fait ?! Qui as-tu tué, par tous les Saints ?!
L'autre haussa les épaules et vérifia les sacoches de son cheval.
— Quelqu'un qui le méritait.
Doyle jura.
— Putain, Loch ! Tu avais promis de ne pas t'en prendre aux esclavagistes ! On va finir par se faire repérer à cause de tes conneries !
Il regarda le gamin.— Et lui, c'est un gamin que t'as sauvé ?
Lochlainn se retourna vers lui pour le fixer.
— J'ai sauvé personne. J'ai juste égorgé un type, et maintenant, lui, il arrête pas de me suivre !
Il pointait le gamin du doigt.
Doyle leva les yeux aux ciel.
Lochlainn n'avait même pas conscience de son geste. En tuant l'esclavagiste, il avait sauvé l'enfant d'une vie d'atrocités, et le petit voyait maintenant en lui son héros. Mais l'enfant n'avait pas conscience de son manque d'empathie.
Doyle s'approcha du gamin et s'accroupit devant lui.— Petit, tu peux pas rester là, expliqua-t-il calmement. Va rejoindre ta famille, ou... quelqu'un.
L'enfant le fixa, le regard rempli d'une attente irréalisable. Doyle secoua la tête.
— On peut pas te prendre avec nous, tu comprends ?
L'enfant regarda désespérément Lochlainn qui préparait ses affaires.
Doyle soupira et laissa tomber pour retrouver son compagnon.— Aucune info sur le marché des armes, et toi ?
Doyle s'appuya sur l'encolure de son cheval.
— L'alcool dénoue les langues...
Lochlainn se tourna vers lui, un éclair d'espoir dans le regard.
— Il y aurait eu une échauffourée, pas loin d'ici. Des Capes Rouges à la poursuite de plusieurs guerriers.
Doyle esquissa un début de sourire. Lochlainn suivit son mouvement.
Enfin...— Où sont-ils ?
— D'après les renseignements que j'ai pu récolté, ils se sont séparés. Une partie est allée vers l'est, l'autre dans le sens opposé.Lochlainn hocha la tête.
— On devrait se séparer. On couvrirait plus de terrain ainsi.
Même si Brogan leur avait toujours ordonné de rester en binôme, quoi qu'il arrive, cette fois-ci, Doyle était d'accord avec son ami. Il hocha la tête.
— Je vais vers l'ouest, déclara-t-il.
Lochlainn acquiesça et grimpa sur sa selle. Doyle tendit sa main vers lui et il hésita une fraction de seconde avant avant de serrer l'avant-bras de l'autre guerrier.
— Baundar o Saun...
Lochlainn répéta la devise de Niall. Il jeta un dernier regard sur le gamin avant de faire volter son cheval et de partir au galop.
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Le Roi en Exil, tome 2 : Niall [EN PAUSE]
Romance« Les huit guerriers ont fui. L'attaque des Kingars les a dispersés. Brogan, Niall et Daron se sont échappés vers le Nord-Est et ont délivré Odhrán, avant de fuir à nouveau pour échapper aux représailles des soldats de Darguen, décidés à les capture...