Il était une fois, dans un pays dont nous tairons le nom, l'agence nationale du fenouil.
Le gouvernement avait constaté une baisse de la consommation sur plusieurs années de suite. Les producteurs et les distributeurs se sentaient démunis face à ce phénomène de fond, et afin de l'endiguer, on créa une agence dont le but était de promouvoir la culture et la consommation du fenouil. L'agence était pourvue de fonds propres, à hauteur de quelques millions de dollars par an. Dès sa première année, la consommation de fenouil explosa, ce qu'on interpréta à tort comme une preuve d'efficacité. Cela dura deux ans. On aurait pu croire que l'agence n'avait plus de raison d'être, mais il est bien plus difficile de fermer des agences que de les ouvrir, aussi resta-t-elle en activité. Tous les ans, sont budget augmentait de dix pour cent. On eut un rapport annuel sur le fenouil, une conférence nationale du fenouil, des recherches sur la culture du fenouil furent financées sur deniers publics, des campagnes de promotion du fenouil furent lancées. Des spots de radio vantaient ses bienfaits, démontrés par lesdites études. Et ces campagnes furent efficaces. La consommation de fenouil augmenta en flèche, à tel point qu'on se mit à en importer.
Comme du fenouil moins cher était importé, les producteurs locaux se mirent à faire faillite. Aussi l'agence augmenta-t-elle ses fonds propres avec pour but affiché de défendre les cultures locales. Sans succès, puisqu'elle n'avait pas le pouvoir de réguler les prix. Le gouvernement suivant décida de fermer l'agence, mais ce fut impossible : l'industrie du fenouil était devenue dépendante des fonds publics alloués à sa promotion, ou du moins, le pensait-elle. Elle fit une intense campagne de lobbying auprès des responsables politiques, qui trouvèrent de grandes qualités à l'agence du fenouil, et décidèrent de créer l'agence nationale de la tomate.
Comment, alors que cette agence n'a obtenu aucun résultat, sinon des résultats négatifs, a-t-elle continué d'exister ? Parce qu'elle ne voulait pas disparaître. Même quand son propre rapport annuel stipulait qu'aucune ingérence de l'État n'était plus nécessaire, l'agence existait toujours, ne fût-ce que pour éditer son rapport annuel. Comme personne ne voulait lire ce rapport, on embauchait tous les ans un stagiaire dont le seul travail consistait à faire une synthèse du rapport, que personne ne lisait à son tour.
Adrian von Zögarn, Histoire de l'Omnimonde (avec une annexe de contes pour enfants)
La porte de la chambre était entrouverte. Avant même que Flaminia n'en franchisse le seuil, un jeune homme à lunettes, vêtu d'un uniforme d'été sans grade, s'interposa et s'inclina devant elle avec déférence.
« Amirale Flaminia, c'est un honneur. Je me présente : Hayden Garrison, ambassadeur mandaté par le Conseil de Sécurité de l'ONU et le Bureau Transnational de Sécurité. Je suis également conseiller diplomatique de l'amirale Ek'tan.
— Comment savez-vous qui je suis ?
— C'est une des facultés d'un diplomate de formation, amirale, que de connaître les personnes que l'on n'a jamais rencontré comme s'il s'agissait déjà de nos plus proches amis.
— Comment se porte l'ingénieure-major Sahir ?
— Aur... l'ingénieure... major... dort toujours. Je vous propose d'éviter de la réveiller. »
Il ferma la porte avec une grande douceur, puis vérifia que le couloir était vide d'oreilles indiscrètes.
« Avez-vous des nouvelles de l'amirale Ek'tan ?
— Elle a déjà pris l'ascenseur pour la première escadre.
— Ivan ?
— Il est également sur l'Indra.
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Nolim III : Les Trois Noms du dieu-soleil
FantasyL'Armada a été vaincue. Les derniers survivants font route vers Stella Rems, dans l'espoir de reconstituer leur flotte, mais ils ne sont pas certains d'y parvenir. En la bibliothèque universelle de Caelus, Christophe-Nolim rumine son échec. Le dévor...