- 22 Mai 2010 - 20h34 -

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En rentrant chez moi après mon entretien d'embauche, j'attendis le dîner pour annoncer à mes parents que j'avais du travail pour l'été. Ils étaient ravis. Bon, maman grimaça lorsque j'annonçais l'activité de la boutique, mais elle ne protesta pas ! Après tout, au contraire des années précédentes, je m'étais débrouillée seule pour trouver du travail et c'était déjà une avancée en soit !

Au moment du dessert, je pris mon courage à deux mains pour rompre le silence et annoncer :

— J'avais pensé me servir de cet argent pour passer le permis cent-vingt-cinq.

Mon père et mon frère blêmirent alors que le visage de ma mère devint rouge écrevisse.

— Je n'ai pas refusé que tu aies un scooter il y a deux ans pour accepter aujourd'hui que tu montes sur une moto ! Il en est hors de question, Amélia ! cria-t-elle en se levant de sa chaise tellement vite que celle-ci se renversa au sol.

— Mais maman... commençai-je en me plaignant comme une gamine.

Ce que j'étais, du reste. Et bien sûr, elle ne me laissa pas aller plus loin.

— J'ai dit non, Amélia !

Ma mère se pinça l'arête du nez et commença à faire les cents pas dans la pièce.

— Je ne comprends vraiment pas ton envie d'avoir un deux-roues. Qui a bien pu te mettre une idée pareille en tête ? s'exclama-t-elle d'un air désespéré.

Moi, je le savais. La passion de la moto m'avait été transmise par le mari de ma nourrice, Michaël, bien des années auparavant. C'est pour ça que, lorsque j'avais créé mon compte Facebook juste avant d'entrer en seconde, ma première action avait été de rejoindre une dizaine de pages de motards. En plus de suivre mes groupes de metal préférés, évidemment. C'est aussi pour ça qu'à quatorze ans j'avais demandé à avoir un scooter. Et c'est encore pour cette raison que je voulais avoir une cent-vingt-cinq. J'avais mis de l'argent de côté ces dernières années pour pouvoir m'offrir le bolide, et je prévoyais de dépenser le futur fruit de mon labeur pour passer le permis.

Si je n'avais pas insisté pour le scooter, là, il s'agissait d'une vraie moto. Et je ne comptais pas lâcher l'affaire si facilement.

— Réfléchis, maman, repris-je sur un ton calme. Vous n'aurez plus à m'emmener chez Louna tous les week-ends. Je n'aurais plus peur de me faire agresser chaque fois que je prendrais les transports en commun. Il n'y a que pour le lycée où j'aurais encore besoin de vous car ma valise ne tiendra jamais sur une moto, mais je serais plus indépendante. Tu nous dis toujours que nous devons apprendre à nous débrouiller par nous-mêmes, et c'est ce que je fais.

— Ton frère vient d'avoir son permis. Ça fait une personne de plus pour te conduire le week-end.

Du coin de l'œil, je vis mon frère serrer les dents et les poings. Bien sûr, il n'avait pas envie de me servir de chauffeur, et encore moins de se coltiner sa frangine lorsqu'il sortait voir ses amis ou Mathilde.

De plus, ce qu'il n'avait pas encore annoncé, c'est qu'il comptait partir de la maison une fois les épreuves du Bac passées. Je ne me faisais pas de soucis pour lui, il était sûr de l'avoir avec les honneurs. Il avait déjà trouvé un patron d'apprentissage pour l'année prochaine et un petit appartement à deux pas de son travail. Il était également proche de mon lycée, ce qui n'était pas prémédité, mais le savoir me faisait extrêmement plaisir. Il ne supportait plus ma mère et avait décidé de partir de la maison dès que possible.

— Pascale, intervint soudain mon père.

Il était assis bien droit dans sa chaise et parlait d'un ton calme.

Metal Queen - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant