Metal Queen - Tome 1

- Été 2010 -

Durant le reste de l'année, l'ambiance à la maison avait été invivable. Maman avait littéralement déclaré la guerre à notre figure paternelle. Mais, en définitive, nous avions tous vécu un enfer. Elle avait essayé de nous garder le plus possible à la maison, Yoann et moi, et nous privait de tout ce sur quoi elle avait un pouvoir. De son côté, papa avait retrouvé la fougue de ses vingt ans et s'amusait à lever tous les interdits. C'est grâce à lui que mon frère et moi avions pu aller quotidiennement souffler chez les Ledoux. Louna et moi étions devenues plus proches que jamais et nos petits-amis se joignaient souvent à nous le soir.

À la fin du dernier jour de cours, je fis promettre à mes amis de nous voir régulièrement durant l'été, mais c'est une promesse qui fut difficile à tenir en Juillet : Chris, Alex et moi travaillions du mardi au samedi, Louna et Alix, du lundi au vendredi, et Florian et Corentin, qui faisaient partie de l'équipe de sécurité à l'entrée d'un camping, avaient des horaires décousus et leurs jours de repos étaient en semaine. Plutôt compliqué pour réussir à se voir tous en même temps. Mais chacun faisait l'effort de prendre sur son temps libre pour passer voir les autres, seul ou à plusieurs, sur leur lieu de travail.

Lorsque le facteur apporta mon bulletin scolaire, je fus fière de le montrer à mes parents : un bon dix-huit de moyenne générale ! Ce qui prouva à ma mère que j'étais tout à fait capable de m'assurer un avenir malgré la guitare et mon petit-ami. Alex, Chris et Louna avaient également des bulletins excellents. Florian et Corentin n'eurent, quant à eux, que ce qu'ils méritaient puisqu'ils n'en foutaient pas une. Mais ils passèrent en première de justesse. Et, si le système éducatif français n'était pas adapté aux élèves ayant des difficultés d'apprentissage, Alix lui fit un beau doigt d'honneur en obtenant une moyenne générale de quinze sur vingt malgré ses problèmes de dyslexie !

Le jour des résultats du Bac, toute ma famille s'était exceptionnellement rassemblée autour de l'ordinateur de ma mère pour savoir si mon frère faisait partie des veinards. Il l'obtint avec la mention « très bien », ce qui ne m'étonna pas. Puis, l'air grave, il annonça à maman qu'il avait préparé ses affaires et qu'il partait vivre dans son appartement sur le champ. Il l'avait déjà annoncé à papa, le soir où maman avait demandé le divorce. Notre père n'avait pas été surpris. Il l'avait même encouragé à partir.

Maman, en revanche, le prit très mal. Elle essaya par tous les moyens de retenir son fils prodige – chantage affectif, menace de lui couper les vivres, j'en passe et des meilleurs ! – mais Yoann avait déjà paré à toutes éventualités et trouvait à répliquer à chaque fois. Sa décision était irrévocable. Mon frangin avait fait ses cartons dans la plus grande discrétion et ses amis attendaient déjà devant la maison pour vider sa chambre.

De colère, maman partit en claquant la porte pour revenir trois heures plus tard avec les clés d'un appartement situé en plein centre-ville.

- C'est de ta faute si Yoann ne veut plus vivre ici ! a-t-elle craché au visage de mon père. Fais tes valises, tu pars ce soir !

- Mais je n'ai pas de meuble ! répliqua papa, incrédule, avant que la colère ne monte. Tu veux que je parte vivre dans un appartement vide ?!

- Mais non, je ne suis pas un monstre ! Un ami a une société de déménagement. Il sera là dans une heure avec deux de ses salariés pour récupérer les meubles que je te laisse.

De colère, je montai dans ma chambre pour faire moi aussi mes cartons. J'en avais assez entendu pour avoir pris ma décision.

- Amélia... Mais qu'est-ce que tu fais ? demanda mon père en passant devant mon antre.

- Yoann s'est barré et elle te fout à la porte. Il est hors de question que j'habite seule avec elle, papa ! J'ai déjà appelé la gendarmerie municipale pour leur signaler la situation. Si elle ne veut pas me laisser partir, je n'ai qu'un coup de fil à passer et ils rappliqueront direct.