- Octobre 2010 -

80 19 24
                                    

Après cet épisode, mon moral commença à remonter doucement mais sûrement. Aidée par mes amis et ma famille – et un très bon psy – je fis un gros travail sur moi-même pour déculpabiliser. Mais l'idée que je n'étais en rien fautive dans le divorce de mes parents ne s'ancra vraiment dans ma caboche que deux semaines plus tard.

Il faut savoir que depuis qu'elle avait demandé le divorce, ma mère vivait seule dans sa grande maison luxueuse et trouvait le moindre prétexte pour nous en faire voir de toutes les couleurs. Lorsque, durant les vacances de la Toussaint, je me décidai enfin à aller la voir pour récupérer les affaires que je n'avais pas eu le temps de prendre – et pour lesquelles elle me harcelait littéralement depuis des semaines – je me fis accompagner par Louna et Mathilde. Les filles décidèrent de rester dans la voiture pendant que j'allais vérifier l'humeur de ma génitrice : si elle avait décidé d'être con, je préférais épargner ce supplice à mes amies.

J'entrai donc dans la maison et commençai à appeler ma mère sans obtenir de réponse. À mesure que j'avançai dans les pièces, je découvris des traces d'activité pour le moins inhabituelles : de la musique se diffusait doucement à travers les enceintes disséminées dans toute la maison, deux verres de vins et une bouteille entamée trônaient sur la table basse du salon, les bibelots étaient renversés sur quelques meubles... Et des vêtements jonchaient le sol, tels les miettes du Petit Poucet. Tous ces petits détails semblaient tracer un chemin jusqu'à ce qui fut la chambre de mes parents, et je les suivis en essayant de faire le moins de bruit possible. La moquette du couloir de l'étage m'aida grandement sur ce point. Arrivée près de la porte de la suite parentale, je me mis à quatre pattes et jetai un œil par l'entrebâillement.

Là, ma mère était au lit avec un homme. Les voir nus et enlacés au creux des draps froissés ne pouvaient me laisser douter de ce qu'il venait de se passer ici. Chose que je n'avais jamais vu : ma mère souriait d'un air béat. C'était carrément la quatrième dimension ! Elle caressait d'un air distrait le torse de l'homme tandis qu'il la dévorait du regard, un air enamouré sur le visage. Sans faire de bruit, je sortis mon téléphone de ma poche, le mit en silencieux dans un accès de lucidité, puis commençai à filmer la scène. Si ça pouvait faire une preuve de plus contre elle au moment du jugement du divorce, je n'allais pas me gêner !

— Et merde ! s'exclama l'inconnu en se redressant brusquement. J'avais pas vu l'heure. Tes gosses et ton mari vont pas tarder à...

Ma mère posa ses mains sur son torse et plaqua sa poitrine à son dos tout en lui coupant la parole.

Au moins une chose qui change pas, pensai-je.

— T'en fais pas, poussin. J'avais besoin de mettre de l'ordre dans tout ce foutoir avant de te l'annoncer, mais... J'ai demandé le divorce.

On aurait dit qu'elle roucoulait et l'effet était vraiment vomitif. Puis soudain, le sens des paroles de cet homme fit son bonhomme de chemin jusqu'à mon esprit : ce type savait que maman était marié, qu'elle avait des enfants, et il savait à quelle heure nous rentrions en général. Ce qui voulait dire qu'elle trompait mon père depuis des mois. Voir des années !

Il ne m'en fallut pas plus pour vraiment me donner la nausée. Rangeant mon téléphone dans la poche arrière de mon jean, je pris mes jambes à mon cou sans me soucier de faire du bruit et sortis de la maison le plus vite possible. Une fois sur le perron, je ne pus me retenir plus longtemps et dégobillai dans les rosiers.

Mes amies constatèrent mon état et se dépêchèrent de sortir de la voiture pour me rejoindre, mais je leur fis signe de remonter en m'essuyant la bouche.

— Faut qu'on se casse, je vous dirais tout une fois chez moi.

Le trajet fut silencieux et une fois à la maison, je commençai par me brosser les dents avant de proposer à boire aux filles.

Metal Queen - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant