- Avril 2000 -

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Le jour de mon sixième anniversaire, Michaël et Flavie m'offrirent une guitare à ma taille. J'étais tellement heureuse que tout le reste de la journée, je ne parlai plus que de demander à mes parents de m'inscrire à des cours. Mais, du haut de ses huit ans, Yoann avait déjà cerné la personnalité de nos parents. Avec beaucoup de conviction, il essaya de m'en dissuader. Bien sûr, j'étais trop euphorique pour entendre son discours. Au moment où mon père sonna à la porte, Michaël vint vers moi et me dit qu'il était préférable que ma belle guitare reste chez eux. Ma première réaction fût de refuser avec véhémence. Alors il insista et mit son dialogue au niveau du mien pour m'expliquer que mes parents risquaient de ne pas être contents et qu'ils pourraient me confisquer mon instrument. La mort dans l'âme, je déposai la guitare sur ma petite chaise et traînai des pieds pour rejoindre mon frère et mon père.

Je boudai durant tout le trajet et une fois arrivée chez moi, je parcourus toutes les pièces de la maison dans l'espoir de ne pas y trouver ma mère. Je savais pertinemment que la plus sévère de mes deux parents, c'était elle. Malheureusement pour moi, elle était dans le bureau à faire ses comptes. Je pris donc le chemin du rez-de-chaussée, la mine déconfite.

— Amélia ! m'interpella mon frère lorsque je passai devant sa chambre.

Je rebroussai chemin et pointai le bout de mon nez dans l'embrasure de la porte.

— Papa te cherche partout ! Si tu ne prépares pas à aller au lit, tu vas te faire gronder.

Yoann repoussa les couvertures et sortit de son lit pour me prendre par la main et m'emmener dans la salle d'eau. Il surveilla que je me brossais consciencieusement les dents et enfilai mon pyjama avant de m'accompagner jusqu'à ma chambre, située juste à côté de la sienne. Là, il me borda et me souhaita bonne nuit avant de décamper comme s'il avait le feu au derrière, ce qui n'était pas si loin de la vérité.

Nos parents étaient très stricts concernant l'heure du coucher. Si, lorsqu'ils arrivaient pour nous souhaiter bonne nuit, l'un de nous n'était pas dans son lit, gare à ses fesses !

À peine quelques secondes plus tard, j'entendis les pas feutrés de mes parents sur la moquette couleur crème du couloir. Yoann avait eu chaud ! Ils passèrent d'abord par sa chambre, ce qui me laissait quelques minutes pour élaborer un plan d'attaque. Je n'avais pas dit mon dernier mot concernant cette histoire de cours de guitare. Moi, têtue ? Peut-être...

— Bonsoir, ma chérie, dit ma mère en entrant.

Elle avança dans la pièce, suivie de mon père, et s'assit sur le bord de mon lit.

— Bonsoir, mamoune ! répondis-je avec un sourire trop forcé pour être honnête.

Ce n'est que quand elle ramena ses bras vers moi que je me rendis compte qu'elle cachait quelque chose dans son dos.

— Tiens, ma puce. Joyeux anniversaire !

Avec un sourire beaucoup plus naturel, j'attrapais le paquet qu'elle me tendait et déchirais le papier cadeau pour découvrir trois livres : l'un sur le système solaire, l'autre sur les plantes, et le dernier sur les animaux. Des petits manuels du futur scientifique, en quelque sorte. Mais, pour moi qui rêvais d'art et de musique, c'était un peu comme offrir des échasses à un cul-de-jatte. Et comme tous les enfants de mon âge, je ne pus empêcher la déception de transparaître sur mon visage. Je levai la tête et regardais ma mère. Son sourire se flétrit et elle fronça les sourcils. Derrière elle, mon père me fit signe de sourire et de la remercier.

— Merci, mamoune. Merci, papou. Ça me fait très plaisir, mentis-je.

Avec mon sourire crispé et mon ton peu enjoué, j'étais tout sauf convaincante. Dépité, mon père se frappa le front de la paume de sa main. Le bruit attira l'attention de ma mère qui se tourna vivement vers lui, mais il avait déjà repris une expression neutre. Maman reporta son attention sur moi et me demanda en contenant sa colère :

Metal Queen - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant