- 11 Août 2012 -

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Les premiers jours furent ponctués de rires, de promenades sur la plage, de baignades au clair de lune, de flâneries dans les jolies rues piétonnes de cette petite commune de bord de mer... Le midi, nous nous relayions pour préparer à manger avant de profiter du déjeuner tous ensembles, attablés près de la piscine. Le soir, nous sortions généralement boire un verre, puis nous mangions au restaurant, ou bien sur le pouce.

Mais le second samedi, notre manager nous avait préparé une surprise. Elle nous demanda de charger nos instruments dans les voitures et de mettre nos plus beaux vêtements de metalleux — en effet, c'est légèrement improbable, mais on parle de Louna ! — avant de nous conduire jusqu'à un bar que je reconnus au premier coup d'œil. Situé près du port, Le Fer Ailleurs était réputé pour laisser se produire des groupes de rock et de metal locaux afin de les aider à se faire connaître.

— T'es pas sérieuse ? ai-je demandé à ma meilleure amie, l'air extatique.

Mais son sourire narquois m'indiquait déjà la réponse.

— Si, si. Je suis sérieuse.

À l'arrière, les gars faisaient la même tête que moi. Plus motivés que jamais à l'idée qu'une telle opportunité pouvait faire grimper notre notoriété en flèche, le déchargement du matos se fit en deux temps trois mouvements.

Le patron du bar nous attendait dans les backstage. Prénommé Matthew, le trentenaire piercé et tatoué nous offrit un accueil chaleureux et nous aida à nous installer. Puis, cinq minutes avant notre entrée en scène, Flo', Corentin et Alix nous souhaitèrent bonne chance et regagnèrent la salle.

— O.K. les gars, commença Louna. Je sais qu'on est en vacances, mais la musique est une passion. Alors vous allez monter sur les planches et vous allez vous défoncer pour donner le meilleur concert de toute votre vie. C'est bien compris ?

— Oui, chef ! cria Chris.

J'avais beau trembler de tous mes membres à l'idée de jouer devant autant de personnes, son petit discours d'encouragement me fit sourire.

— J'ai rien entendu ! reprit-elle plus fort.

— Oui, chef ! criai-je en même temps que les garçons.

Comme à notre habitude, les garçons rejoignirent les feux des projecteurs et j'entamais l'intro lorsque notre batteur me fit signe qu'ils étaient prêt.

Le concert fut... carrément démentiel ! Tout d'abord, parce que nous n'avions jamais eut un public aussi important. Ensuite, parce que le public a été réceptif dès le départ, même à nos compositions originales. Enfin, parce que j'avais gagné en assurance depuis notre premier show. J'avais réussis à nous présenter brièvement et à chauffer la salle entre quelques chansons. Nous n'avons pas été surpris qu'aucun rappel ne soit demandé, mais un échange de regard nous avait suffit pour tomber d'accord sur le fait que nous devions quand même jouer la chanson de Airbourne, car elle clôturait magnifiquement la représentation.

En sortant de scène au bout de presque une heure, nous étions en sueur, tout aussi essoufflés les uns que les autres, mais heureux comme des papes. Le groupe dont nous venions de faire la première partie nous félicita même pour la performance, ce qui me laissa autant sur le cul que les autres membres. Puis Louna vint nous sauter au cou.

Nous avons discuté quelques minutes avec l'autre groupe pendant que nous rangions et qu'eux déballaient leur matériel. Puis nous nous dirigeâmes vers la salle pour boire un verre bien mérité. Là, quelle ne fut pas ma surprise d'entendre des cris et des applaudissements. Assis autour d'une table à quelques pas de la porte qui donnait sur les coulisses, nos amis, nos parents, ainsi que mon frère et Mathilde, accompagnés de leur bande de potes au grand complet, nous acclamaient. Il faut savoir que lorsqu'on est sur scène et que la salle est plongée dans le noir, il est presque impossible de distinguer le public. Mais ils étaient là, ils avaient assisté à notre premier concert — le premier digne de ce nom — et avaient adoré, semblait-il.

Un grand sourire scotché aux lèvres, nous avons rejoint nos proches qui ne tardèrent pas à nous bombarder de questions et de compliments. Matthew arriva sur ce fait et son expression très sérieuse fit taire tout le monde. Derrière lui, l'autre groupe martyrisait instruments et cordes vocales. Leur son était génial, mais j'étais incapable d'y prêter attention à cet instant.

— Dites... Vous avez fait combien de concerts avant celui-ci ?

— Euh, quatorze, répondit prudemment le batteur.

Chris tenait le compte depuis le tout premier, un an auparavant. Il avait toujours sur lui son petit papier avec la date et le lieu de chacune de nos représentations.

Le gérant du bar nous scruta, puis une lueur d'admiration passa dans ses yeux au moment où il esquissait un sourire.

— Pas mal ! s'étonna-t-il, l'air réellement impressionné. Vous avez un très bon niveau, sincèrement.

— Mya a tellement peur de se planter qu'elle nous fait répéter encore et encore et encore... Je continue ou vous avez saisi l'idée ? demanda Chris en ricanant.

— Plains-toi donc ! m'indignai-je, les poings sur les hanches et l'air faussement offusquée. La preuve, on a que de bons retours ! Bon, ma crise de tétanie lors de notre premier concert mise à part... concédai-je avec un hochement de tête.

— C'est rien ça, me rassura le gérant du bar. J'ai vu bien pire pour un début de carrière. Vous avez beaucoup de potentiel. Et vos chansons sont pas mal du tout. Il vous faudrait juste remplacer les reprises par des compos et harmoniser votre style. Avec de la persévérance, vous pourriez bien décrocher un contrat avec une maison de disque.

Chacun de nous se contenta de sourire comme un benêt. Nous n'avions simplement pas les mots pour répondre à un tel compliment.

— Je vous offrirais une conso chaque fois que vous jouerez ici et un pourcentage des entrées vous sera reversé. Si vous faites vos preuves et que vous gagnez en popularité, on vous passera en tête d'affiche. Le deal vous va ? conclut le grand chauve en souriant.

Je regardai les gars qui, comme moi, semblaient choqués, avant de hocher vivement la tête.

— Carrément ! m'écriai-je avec joie en tapant dans la main que Mathieu me tendait.

Les garçons m'imitèrent, visiblement heureux d'entendre une si bonne nouvelle.

— Cool. Bon alors, vous voulez boire quoi ? demanda-t-il avant de s'éloigner vers le bar avec la liste de nos consos.

Autour de la table, les discussions explosèrent de nouveau et tout le monde y alla de son petit commentaire. La proposition de Matthew était démente. Aussi insensée qu'inattendue. Mais ça nous poussait également à nous dépasser pour faire encore mieux la prochaine fois.

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Metal Queen - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant