Chapitre 29 : Charlie

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Province d'Almeria - 14 Août 2020 - 00h03

La nostalgie m'envahissait tel un poison amer qui se distillerait en moi, à profusion.

- Non. Il m'a quitté lorsque j'ai refusé d'avorter.

Il prononça un «enfoiré» discret mais je l'avais entendu.

- Ne le juge pas trop vite. Nous n'avions que quinze ans et des vies dissolus. On enchaînait les conneries. Tout ce qui nous faisait vibrer était malsain. Avoir un bébé dans ces conditions était vouer à l'échec.

- Pourtant tu as réussi. Ce qui veut dire qu'il aurait pu, lui aussi.

Je haussais des épaules.

- Nous n'étions que des gosses mais à la différence, j'avais un très bon exemple à la maison. Ma mère était la responsabilité faite. J'avais le meilleur des exemples à suivre.

Plus je lui parlais, plus j'arrivais à me détendre. Il avait cette particularité d'écoute agréable.

- Et toi ? Comment tu as rencontré Paola ?

Il semblait réticent à parler d'elle.

- Je l'ai rencontré lors d'une soirée mondaine. Elle était belle et à l'époque, je n'allais jamais plus loin lorsqu'il s'agissait des femmes. Elle a su m'harponner entre ses griffes. Pendant un moment, j'ai cru l'aimer. Je la pensais douce et gentille mais dès qu'elle a eu la bague au doigt, elle a changé et c'est transformer en harpie imbu d'elle-même.

- Tu t'es faits piégé par une femme vénale. Ça arrive aux meilleurs, tu sais, blaguais-je, en le bousculant d'un coup d'épaule, pour détendre les traits de son visage ; son joli minois ne sert plus à rien, aujourd'hui. Réjouits-en.

Il m'offrit un petit sourire les yeux plantés dans les miens avant que je me détourne.

- Lorsque je l'ai rencontré, tu avais seize ans, déclara-t-il d'un air évasif.

Perplexe, je lui jetais un coup d'œil.

- Ouais, confirmais-je en traînant le mot en longueur, ne sachant où il voulait en venir.

- J'aurais préféré tomber sur une femme comme toi, plutôt qu'elle, s'expliqua-t-il ; tu es tellement plus courageuse. De plus, tu possèdes une gentillesse et une tendresse à toute épreuve. Je suis désolée pour Connor. Il ne te méritait pas.

- Je ne peux qu'être d'accord avec toi.

Il soufflait. Je me rendis compte qu'il s'était considérablement rapproché lorsque je sentis son souffle sur ma joue, poussant l'humidimètre de ma culotte au plafond.

- Et cette assurance, loin d'être mesquine. Tu es une femme incroyable, Charlie.

Je pris une inspiration pour me donner le courage de le repousser.

- Tu devrais aller dormir, Joaquin. Tu es en train de délirer par le manque de sommeil, recommandais-je dans un souffle erratique que je tentais de contrôler.

- Je sais que toi aussi tu le sens, Charlie. Pourquoi tu luttes contre ça ?

Je tournais la tête en sa direction. Il ne faudrait qu'une impulsion pour que mes lèvres rencontrent les siennes.

- Parce que je ne veux pas de distraction, Joaquin. Alors soit tu arrêtes de toi-même, soit je t'assomme. J'ai du boulot, grondais-je en colère contre moi-même des sensations qu'il faisait naître en moi et que je ne parvenais pas à contrôler.

Il recula, l'air déçu.

- Très bien. Tu n'es pas prête. Je suis prêt à attendre que tu viennes à moi. Tu mérites le meilleur, Charlie.

Il se leva, prit son arme et partit faire le tour de la maison, le corps raide, de bout en bout, constatais-je lorsque mes yeux se posèrent sur son entre-jambe.

Je le désirais. Cela était une constatation. Une vérité dérangeante. Il me détournait de ma mission. Cela me faisait peur. Depuis huit ans, je ne vivais qu'à travers mon rôle de mère. Je ne mettais plus confronter à la gent masculine, du moins, pas de ce point de vu-là. La force de mon désir pour cet homme me terrifiait autant qu'elle m'exaltait. Que faire de cela ? Devais-je céder à cet instinct presque animal qui me poussait à des fantasmes irrépressible ?

La dernière fois que j'avais laissé mon cœur parlé, il avait fini en bouillit, cela avait calmé mes ardeurs envers le sexe opposé. Étais-je prête à retenter l'expérience ?

- Charlie, cria une voix sur ma droite alors que j'étais perdu dans mes pensées.

Je dérivais mon regard dans ceux de Joaquin écarquillés de peur puis pivota vers l'endroit qu'il fixait. Une créature avait réussi à pénétrer dans la propriété et se dirigeait à toute allure sur moi. Un coup de feu, puis un deuxième. La chose avançait toujours sur moi. Le temps de reprendre mes esprits, il me percuta en me coupant le souffle. Il ouvrait grand la bouche dans une tentative de me mordre. Je plaçais mon avant-bras sur sa gorge pour garder ses dents loin de mon visage. Ses bras faisaient des mouliner autour de moi. Je poussais de toutes mes forces pour l'envoyer bouler à plusieurs mètres de moi et me relevais. Je dégainais mon arme et tirais. Ce fut lorsqu'il cessa de bouger que j'entendis des grognements venant de toutes parts de la maison. Nous étions envahis. Les enragés nous avaient trouvés et semblaient avoir trouvé une faille. Je me ruais à l'intérieur de la maison et réveillé Marisol.

- Alerte rouge.

Elle comprit immédiatement et se leva pour m'aider à réveiller les enfants.

- Il faut se réveiller, mes trésors. Aller, on ouvre les yeux.

Bethany et Rory se réveillèrent en sursaut alors que Tate eut du mal à tenir debout. Je le pris dans mes bras. Voyant la panique autour d'elle, Paola se leva en vitesse.

- Vous vous rappelez ce que veut dire alerte rouge, les enfants ?

Les deux plus grands hocha de la tête.

- Bien. Faites ce que vous avez à faire alors.

Ils s'activèrent et firent leurs bagages alors que je donnais Tate à Marisol et me précipitais dehors. Paola et Joaquin nous regardaient agir sans rien comprendre. Je n'avais pas pris le temps de leur expliquer, croyant avoir plus de temps avant qu'ils n'arrivent à nous.

Je choppais mon fusil d'assaut au passage et sorti, la rage au ventre de m'être laissé dépasser par des choses aussi futiles que les sentiments que cet homme m'inspirait, au point de mettre mes petits en danger.

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