Chapitre 31 : Charlie

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Almeria - 14 Août 2020 - 08h22

Bethany se tenait près de moi, entre mes jambes, pour être plus précise. Nous observions l'effusion de tendresse dont faisait preuve cette famille qui se trouvait être au complet, à présent. Je pouvais le comprendre. Ils pensaient, sûrement, leurs petits-fils morts alors savoir qu'il n'en était rien devait les rendre pleins de joies. Je posais ma main sur la tête de ma fille. Elle releva la tête pour me regarder de ses yeux pleins de larmes et je sus qu'elle avait les mêmes pensées que moi. Sa grand-mère lui manquait. Jo, Alshey et Craig, lui manquaient aussi. Bon sang, même John me manquait. Ma vie me manquait, tout simplement. Je ne laissais rien transparaître de mes sentiments afin de ne pas aggraver la situation déjà difficile, laissant l'émotion qui m'étreignait depuis plusieurs heures me heurter de nouveau. La colère. Elle était plus agréable à vivre que ma peine. Moins douloureuse.

Je me tournais vers la voiture où était figée Marisol. Je lui fis signe de s'approcher.

- Il va falloir que nous trouvions un nouvel endroit où nous établir.

Elle hocha de la tête.

- Ou vous pouvez rester ici, s'intégra à la conversation une voix familière.

Joaquin se tenait face à moi lorsque je pivotais en sa direction. Je jetais un regard derrière lui puis sur Bethany, qui ne cachait plus ses larmes, le regard fixé sur la réunion familiale.

- Non, on ne peut pas.

- Pourquoi ? vous serez en sécurité ici.

- Pour combien de temps ? Ils ne sont pas encore parvenu à atteindre cette côte mais ce n'est qu'une question de temps.

- Comme partout ailleurs, Charlie, fit-il valoir, me contrariant grandement.

- Nous n'allons pas rester, Joaquin, dis-je durement entre mes dents.

Il soupira et dévia son regard sur ma fille.

- Tu ne veux pas aller avec les garçons, ma puce ?

Bethany secoua la tête en s'enfonçant un peu plus entre mes jambes. Je levais un sourcil en la direction de l'homme alors qu'il remarqua enfin les larmes sur les joues de Bethany.

- Pourquoi pleures-tu ? demanda-t-il d'une voix douce.

Elle ne répondit pas mais sanglota de plus belle. Cherchant une réponse à sa question, il me scruta. Il n'obtenu rien de ma part aussi. Hors de question de livrer notre chagrin à lui alors que la rancune, tenace, que je ressentais me tenaillait encore, plus envers moi-même qu'envers lui. Le mieux pour nous, maintenant, était de fuir Joaquin et le solide amour qui émanait de cette famille. Je me détournais de lui.

- Marisol ? Est-ce que tu veux rester avec eux ? Je peux compr..

- Non, je reste avec vous, Charlie. Vous êtes ma famille à présent, dit-elle en nous caressant tendrement la joue.

C'était avec émotion que je hochais la tête pour approuver. J'entraînais alors Bethany et Marisol, non sans avoir jeter un dernier coup d'œil à mes petits, qui étaient trop occupés à profiter de la chaleur des bras de leur grand-père, vers la voiture. Les voir aussi heureux d'avoir retrouvé ce qu'ils avaient perdu me fit chaud au cœur autant que cela me fit mal. J'aimais ces enfants mais ils n'étaient pas vraiment à moi alors je n'avais d'autres choix que de les laisser derrière moi. Une larme menaça de s'écouler de mes yeux, je leur tournais alors le dos.

- Attendez, s'écria une voix féminine.

Nous figions, toutes trois.

- Où allez-vous ? Pourquoi partir ?

Je scrutais la femme aux regards tendres mais rester silencieuse. Sa démonstration d'affection avait fait pleurer ma fille et même si cela n'était pas réellement de sa faute, je ne pouvais empêcher ma voix sortir durement.

- On n'a rien à faire ici.

La femme tenta une approche mais je reculais, presque en grognant. Je ne voulais pas l'affection maternelle de cette femme. Je voulais celle de ma mère. Dans l'impossibilité de l'obtenir, je préférais ne rien avoir. Je savais que mon comportement était puéril mais je voyais en cela une sorte de trahison envers ma propre mère. Marisol avait bien sûr pris une place semblable mais je ne la voyais pas en ce sens mais plutôt une tante adorable. Son affection ne me dérangeait, donc, pas. Celle de cette femme, par contre, me faisait mal. Elle ressemblait beaucoup trop à une maman.

Elle me regardait, étonnée par ma dérobade.

- Vous pourriez rester ici. Vous êtes les bienvenus, toutes les trois. Vous avez sauvé mes petits-enfants...

- Je ne l'ai pas fait par contrainte.

Joaquin se mit devant sa mère et lui murmura quelque chose, bien trop bas pour que nous l'entendions. Le sourire qu'afficha sa mère n'était pas de bon augure alors je pressais Beth à monter dans la voiture. Alors que j'attachais sa ceinture, une petite voix larmoyante se fit entendre dans mon dos, me crispant. L'enfoiré.

- Tu vas nous abandonner, ma ?

Je fermais les yeux, assailli par la culpabilité. Je me redressais lorsque le son de la ceinture m'apprit qu'elle était correctement attaché. Je me baissais devant Rory et Tate. Leurs visages exprimaient ce que je ne voulais pas voir.

- Nous ne pouvons pas rester ici, mes trésors.

Les yeux s'illuminèrent.

- On vient nous aussi, alors ?

Merde ! pestais-je intérieurement.

- Je ne peux pas vous emmener avec moi.

- Pourquoi tu ne nous aimes plus ? tu as dit que tu serais ce que nous voulions... On veut que tu sois notre maman pour toujours alors il faut que tu restes ou que tu nous prennes avec toi, supplia-t-il.

Double merde !

Que faire ? Que choisir ?

Rester pour les avoir auprès de moi et oublier la peine de Bethany ou partir sans me retourner, avec l'espoir que leurs jeunes âges les aides à nous oublier rapidement. Ils étaient bien entourés après tout. Je jetais un coup d'œil à Beth et Marisol. J'étais perdu. Je ne savais pas quoi faire. J'avais besoin de l'aide de la seule famille qui me rester.

- Je vais où tu vas, ma puce, m'encouragea Marisol à faire mes propres choix.

- Je veux être avec eux... ce sont mes frères mais je veux aussi mamie, Tata Jo, Tata Ashley et Oncle Craig, se perdit Bethany.

Leurs décisions ne m'aidaient en rien. Au contraire, cela me perdit un peu plus.

Mon Dieu, que faire ?

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