Chapitre 43 : Charlie

887 78 0
                                    


Sud de la France - 18 Septembre 2020 - 15h59

Un moteur bruyant... Venant du ciel... Des hélices...

- Un hélicoptère... chuchotais-je dans ce bruit tonitruant.

Tout le monde sortit dans la cour et scruta le ciel. L'engin n'allait pas tarder à nous survoler et l'excitation de chacun était palpable.

Ainsi il restait encore d'autre survivants ? était-ce l'armée ? Allaient-ils nous sauver ? Allaient-ils nous voir ?

Lorsque les hélices furent en vue, nous nous précipitions, d'un seul homme, au milieu du jardin et tentions de nous faire repérer par l'hélicoptère, qui avait tout d'un appareil militaire. Nous criions vainement en sa direction, levions les bras afin de faire de grands gestes vers le ciel avec l'énergie du désespoir lorsqu'il s'éloigna sans nous, semblait-il, apercevoir. Nous l'observions partir partager entre l'espoir et la résiliation.

Je baissais les bras qui était resté en l'air, comme figer de consternation, et soufflais profondément puis baissaient les yeux sur Bethany et Tate qui s'était accrochés à mes jambes alors que Rory était dans les jambes de son père. Je m'abaissais pour prendre Tate dans mes bras puis pris la main de ma fille.

- Venez vous reposer un moment dans la chambre, les enfants, commandais-je.

Rory s'accrocha à mon débardeur et nous suivit sans un mot. Nous laissions les autres à leur propre accablement. Nous fûmes très vite rattrapés par Joaquin qui entra avec nous dans la chambre des enfants. Nous demeurions silencieux alors que nous nous installions sur les lits une place. Bethany s'installa à ma droite, dans mes bras. Tate pris place, de tout son long, sur moi, la tête collé sur ma poitrine. Rory lui, s'installa à ma gauche. Entourée de mes enfants, la déception se fit moindre. Je n'étais pas à plaindre. J'étais entouré, de part et d'autres, d'amour. J'avais ma famille avec moi et ils allaient tous bien. Ils étaient aussi épanouis qu'ils pouvaient l'être en ces circonstances. Joaquin s'asseyait près de nous, à même le sol, et posa sa main sur la tête de Tate, lui caressant les cheveux. Je pouvais voir que son esprit avait la même résonance que le mien. Il plongea les yeux dans le miens alors que je lui souriais. Un sourire qu'il me rendit. Nous savions, à l'instant, que nous étions chanceux. Il entremêla ses doigts au miens qui reposait sur le dos de Tate.

Rory et Tate ne tardèrent pas à s'endormir alors que Bethany demanda à retourner auprès de Consuela et Sonia. Joaquin proposa de la conduire auprès de ces dernières. Ils me quittèrent sur la promesse de Joaquin de revenir par la suite.

Allions-nous avoir, un jour, la chance de sortir de cet enfer ?

Je n'en pouvais clairement plus d'être constamment sur le qui vive. J'étais fatiguée de survivre. Je voulais la sécurité. Je mettais toujours plainte de la vie difficile du quartier dans lequel j'avais grandi, le jugeant dangereux.Entourée de gangs ayant la gâchette trop facile. J'avais eu longtemps peur de sortir seule dans les rues malfamées jusqu'à ce que ma rébellion m'emmène à les côtoyer de près. Aujourd'hui cependant, la violence connue n'était en rien semblable à celle que j'avais pu connaître. Cela était infiniment plus horrifique. Je voulais qu'on nous sorte de cet enfer. Je désirais l'avenir que j'avais toujours rêvé pour ma fille. Un avenir fait de réussite, de bonheur.

Perdue dans mes pensées, je ne remarquais pas immédiatement la personne debout, immobile, dans l'encadrement de la porte. La mère supérieure me fixait de ses yeux tendres en me souriant.

- Je les ai appeler pour les informer de votre présence en ces lieux.

Perplexe, je lui adressais un regard interrogatif.

- Les militaires, précisa-t-elle.

Choquée, je clignais plusieurs fois des paupières.

- Quoi ? soufflais-je.

- Ils sont venus, il y a quelques semaines pour nous évacuer. Aucune de nous avions envie de quitter le monastère mais ils ne sont pas parti sans nous laisser un numéro à contacter en cas de changement d'avis de notre part, expliqua-t-elle ; ils vont revenir pour vous tous. Préparez vos affaires. Ils m'ont fait savoir qu'ils avaient un sauvetage dans le nord du département. Ils viendront vous récupérer après les avoir mis en sécurité.

Incapable de prononcer de moindre mot, je me dégageais, délicatement, des étreintes des garçons, endormis, et me levais. Je me postais devant cette femme, les yeux emplis de larmes, prit sa main et en embrasser le dos avant de serrer fort celle-ci contre mon cœur.

- Vous êtes un merveilleux miracle, ma mère.

Elle fit claquer sa langue en posant son autre main sur ma joue.

- Le seul miracle est la force que Dieu à mit en vous pour survivre, mon enfant.

Elle me relâcha, j'en fis de même, et se retournait afin de disparaître dans les couloirs éclairer par les rayons de soleil.

La prise de conscience fut brutale. Au moment où j'acceptais, enfin, de me rendre à l'évidence et que je ne pourrais pas lutter ainsi éternellement, la providence avait mis sur notre chemin cette femme. Nous étions sauvés. L'armée allait venir nous chercher. Ils avaient, certainement, un endroit sécurisé où les survivants, de cette horreur sans nom, seraient en sécurité.

C'est alors que mes nerfs lâchèrent. Je m'effondrais au sol, à genoux, et remercier le ciel, encore et encore, tout en sanglotant, jusqu'à ce qu'une main se dépose, délicatement, sur mon épaule.

- Charlie ? ça ne va pas ?

Je pris une grande inspiration pour tenter de me calmer et relevais les yeux vers lui. Ses sourcils se froncèrent lorsqu'il vit le sourire que mes lèvres affichaient.

- Mieux que jamais.

- Pourquoi pleurais-tu, alors ?

Je le regardais intensément et me rendis compte de la chance que j'avais d'avoir l'attention de cet homme. La tension envolée me permit de le voir, de le voir réellement. Je pouvais apercevoir cette lueur de tendresse dans son regard. La peur, la colère et mes responsabilités m'avaient empêché de voir plus loin que son envie de me posséder. Je pouvais, maintenant, voir que cela allait beaucoup plus loin.

Je me relevais, rapidement et écrasais mes lèvres contre les siennes avec urgence. Je le dévorais avec précipitation, comme si ce bonheur retrouvé n'était qu'éphémère. Lorsque je m'écartais de lui, nous étions haletants d'un désir réprimé. C'était en me raclant la gorge, que je prononçais les mots que je pensais ne jamais avoir le droit de dire.

- Nous sommes sauvés, Joaquin.

The new beginning of our livesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant