Chapitre 18 : Journal d'Edward

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Ça fait longtemps que je n'ai pas écrit. Pas que je n'avais rien à raconter. Il s'est passé tellement de choses depuis la dernière fois.

Dorian est parti. Mon frère a quitté le foyer familial et m'a abandonné. Il ne supporte plus de me voir, de me parler, de vivre avec moi. J'ai tout foutu en l'air.
C'est entièrement ma faute. Tout ça parce que j'ai cédé à la tentation. Je me rends compte que je n'aurais pas dû. Qu'il a raison sur toute la ligne. Néanmoins, ça ne soulage pas cette douleur lancinante dans ma poitrine. J'ai perdu la plus belle part de moi. Je lui en veux terriblement d'être parti sans nous donner une chance d'aller au-delà de ce problème. Je le déteste autant que je l'aime d'avoir claqué la porte sans se retourner, car il a eu le courage de le faire. Il m'a abandonné à une famille qui ne veut pas de moi sans se soucier de ce que j'allais endurer maintenant qu'il n'est plus là pour calmer notre père quand il montre de l'hostilité à mon égard. Ai-je le droit de lui en vouloir ? Je ne sais pas, je ne crois pas. Je ne lui ai, après tout, jamais rien dit de la brutalité de papa à mon encontre. Il ne peut pas combattre ce dont il n'a pas connaissance.

Fautif.
Je suis fautif sur toute la ligne.
Fautif d'être un garçon quand mes parents voulaient une fille.
Fautif de ne pas être le fils modèle comme une parfaite copie de Dorian.
Fautif de ne pas mériter l'amour de mes géniteurs.
Fautif d'aimer mon frère d'un amour interdit.

Fautif. Fautif. Fautif.

C'est ce que me crie mon reflet chaque jour quand je me regarde dans le miroir. J'ai envie de le briser, de ne plus voir ce visage. De m'abîmer, de me faire du mal... C'est peut-être tout ce que je mérite. Souffrir. 

Comme je l'avais prédit, mon père est entré dans la chambre l'autre soir. J'ai eu le temps de te cacher avant qu'il n'ouvre la porte. Il a immédiatement demandé où était Dorian. Le balancer aurait été une belle vengeance pour m'avoir laissé planter là, seulement, je n'ai pas pu me résoudre à moucharder. Même si je pense qu'au final il ne risquait pas grand chose, j'ai fermé ma gueule. Mon père, profitant de l'absence de mon frère, m'a mis en garde. Si je parlais encore comme je l'avais fait précédemment, il serait forcé de sévir et le gifle reçue ne serait rien en comparaison de ce qu'il me ferait. Rien à cirer... S'il savait à quel point je me fiche de me faire tabasser. J'aimerais qu'un jour il ne s'arrête pas, accueillir la douleur comme un soulagement, la laisser m'emporter et ne jamais relever la tête. Rester figé dans mes seize ans. Ne plus être.

J'ai bien sûr prévenu Dorian que notre père savait qu'il avait fait le mur juste au cas ou. Je lui ai envoyé des dizaines de messages qui sont tous restés sans réponse. Il devait être trop occupé avec l'autre idiote. J'étais rongé par la jalousie et en même temps, j'aurais voulu pouvoir faire comme lui. Avec un mec, une fille... Peu importe en réalité. Juste pouvoir vivre une relation normale. Ne pas être détruit par un amour qui ne m'apporterait jamais rien de bon.

J'ai été incapable de fermer l'oeil de la nuit. Jusqu'au petit matin où, enfin, Dorian a daigné nous honorer de nouveau de sa présence. Je me suis énervé alors que lui, il se désappait sans rien dire. Puis j'ai vu. Des marques sur son corps. Des suçons sur ses clavicules, dans son cou, des griffures sur les épaules... Il n'a même pas essayé de les cacher. J'avais envie de gerber.

- C'est d'un vulgaire...

Voilà ce que j'ai dit avant qu'il ne me lance un regard interrogateur.

- Les marques sur ta peau. C'est dégueulasse. Elle voulait quoi ? Montrer au monde que tu lui appartiens ? Elle s'est autoproclamée détentrice de Dorian Maxwell ?

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