Chapitre 26 : Travis

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Après avoir somnolé dans mon lit durant quelques heures, je me lève avec le sentiment de n'avoir jamais été aussi minable que cette nuit. J'ai lutté pour ne pas m'endormir. Je ne voulais pas fermer les yeux au risque d'être de nouveau plongé en plein cauchemar et faire du mal à Parker. C'est pour ça que je me suis réfugié dans un coin de la pièce, à l'écart, comme un enfant apeuré. Ça n'aurait jamais dû se produire. Je m'en veux tellement pour ça.

La scène se rejoue sans cesse dans mon esprit. Un endroit sombre où je suis bloqué, incapable de bouger. Des mains sales et rugueuses qui me touchent partout. Ce ne sont pas celles auxquelles je suis habitué depuis des mois. Elles sont dures, exigeantes, impatientes. Puis la douleur lancinante d'une intrusion que je n'attendais pas, à laquelle je n'étais pas préparé. Sauf que cette fois diffère de toutes les autres. J'arrive à reprendre le contrôle. Je me débats, je fais face à mon agresseur, lui ordonne de ne pas me toucher alors qu'il me murmure des mots censés m'apaiser puis enfin, je le repousse et gagne.

Ça aurait pu s'arrêter avant. Malheureusement, même en ouvrant les yeux, mes songes n'ont pas pris fin et je n'ai pas éjecté la bonne personne. Je m'en suis pris à Parker, le seul qui ne mérite rien de tout ça. Il m'a aidé, écouté, supporté, aimé... Je lui dois tellement et c'est comme ça que je le remercie ! Putain, inconsciemment ou non, j'ai blessé la personne que j'aime le plus au monde et voir l'incompréhension, la douleur et pire que tout à mes yeux, la peur dans son regard m'a foutu à terre.

Je ne voyais pas le visage de celui qui s'en prenait à moi. Je ne reconnaissais pas sa voix. Je me suis torturé en faisant ça, mais me repasser cet horrible rêve m'a permis de déterminer qui il était. Cette visite à Troye était une idée de merde comme j'en ai rarement eue. Parce que c'était lui. Si on prend en compte mon entrevue avec ce type et ce que j'ai découvert en lisant ce cahier, on ne peut nier que ce bordel a un impact plus que négatif sur moi. Je me pensais libéré. Je ne le suis pas.

Ça me tue de l'admettre, mais Parker a raison. Il me faut dorénavant une aide supplémentaire. Il ne peut plus porter toute cette merde sur ses seules épaules. Il ne mérite pas toute l'inquiétude que je lui cause. Je crains que ces démons tapis dans l'ombre ne finissent par me le retirer. J'ai peur qu'un jour, il me dise que tout l'amour qu'il me porte n'est plus suffisant. Qu'il n'arrive plus à vivre avec un type aussi abîmé. Je ne pourrai pas lui en vouloir pour ça. Beaucoup à sa place auraient déjà baissé les bras.

Je ne peux pas demander conseil à Connor ou Isaac qui ont déjà bien trop à gérer de leur côté. Je ne veux pas me reposer sur Parker pour accomplir ce qui doit être fait à ma place et hors de question de joindre Arley sans provoquer une scène de ménage. Peut-être qu'Olivier pourra m'orienter. J'ai beaucoup trop honte de moi pour aller voir Tomas. Comment le regarder dans les yeux et lui dire pourquoi je souhaite entamer cette démarche ? Que va-t-il penser de moi à qui il a ouvert sa porte et à qui il a confié le bonheur de son enfant ?

Je ne me suis jamais autant détesté que depuis cette nuit. Si j'étais aussi génial qu'on le prétend, je partirais et ne lui imposerais pas de vivre avec moi. Sauf que dans ce cas précis, c'est moi qui ne vivrais plus. Sans lui, rien n'aurait de sens. La vie serait terne et sans saveur. Je mourrai à petit feu sans son amour. Je ne veux pas perdre la personne qui m'a rendu la vie. Je veux être égoïste et le garder auprès de moi. Mais je veux le mériter.

Une fois prêt, je prends en marchant le chemin jusqu'au cabinet de mon ami. Je suis trop agité pour conduire et provoquer un accident n'est pas dans mes projets.
Dorian est au téléphone et parle avec un sourire à son interlocuteur. Il prend des notes, répond avec une aisance que je n'aurais jamais, lève les yeux au ciel en prenant des couleurs et son sourire s'élargit quand il remarque ma présence. Je me contente d'un signe de la main avant d'aller patienter dans une salle d'attente bien remplie. Sûr qu'Oli doit passer plus de temps à bavarder qu'à faire son véritable job. Néanmoins, il rencontre le succès en ville et c'est super. Il doit être bien plus épanoui ici que dans une prison bien qu'à l'époque il ne s'en soit jamais plaint.

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