La lettre

Chapitre 21 : « Emotions vives...»

Je vous épargne la lourde journée passée au bureau.

Reprendre le travail après un petit ou long congé n'est jamais évident.

C'est un peu comme si nous n'avions jamais travaillé de notre vie ou si nous étions resté au chômage pendant des lustres, il faut se réadapter...

Passons aux choses sérieuses : après le boulot, Claude et moi sommes allés nous changer et préparer nos affaires, direction Perpignan.

J'ignorai comment annoncer à Pierre que j'étais son fils, alors je pris le soin de faire une photographie de la lettre écrite par ma mère ; seulement la partie concernant Pierre bien sûr.

J'avais prévu que Claude et moi descendions à l'hôtel une fois là-bas, mais lorsque je téléphonai à mon père pour l'informer de notre vite, il avait insisté pour que nous restions tous les deux chez lui.

Je trouvai ça trop bizarre même si Claude ne partageait pas le même avis que moi.

J'avais tout raconté à Claude durant le trajet. Je ne pouvais pas le trainer jusqu'ici sans lui donner d'explication. Il en profita pour me parler un peu de sa famille.

Il m'avoua qu'il n'était pas très proche de son père. En effet, ce dernier avait épousé la mère de Claude devant Dieu et les hommes mais tout portait à croire qu'il avait tendance à l'oublier.

CLAUDE

Tu sais man, aucun enfant ne peut tolérer de voir sa mère souffrir à cause de son père.

A la base nous sommes deux de même père et mère, mais grâce au vieux nous avons au moins dix demi frères et sœurs. Et quand je dis dix, ce sont ceux que nous avons fini par découvrir au fil des années. Il est clair qu'il en cache d'autres. Et le pire dans tout cela c'est que nous sommes les seuls qui avons la même mère pour tout le reste, ils ont des mère différentes. Parmi eux, il y a également des jumeaux car il est arrivé que mon père mette deux femmes enceintes en même temps !

Personne n'arrive à comprendre ce qui ne va pas chez lui. Il est bien vrai que l'église interdit le divorce mais s'il ne peut pas se limiter à une seule femme pourquoi en a-t-il épousé une ?

Ma sœur et moi avons demandé à ma mère de le quitter mais elle refuse. C'est pour elle que je me bats aujourd'hui. J'aimerai la faire venir ici afin de prendre soin d'elle et l'éloigner de lui.

Comment peut-on traiter une reine ainsi ? une femme qui est restée à tes côtés même lorsque tu as perdu ton emploi, cette même femme qui participait aux charges de la maison, cette femme qui a dépensé toutes ses économies afin d'offrir un avenir meilleur à ses enfants. Si nous sommes en France aujourd'hui c'est grâce à tous ses sacrifices.

Je sentis beaucoup d'émotion lorsque Claude parlait. Voilà pourquoi il ne faut jamais juger ou envier quelqu'un. Claude a l'air si heureux alors qu'au fond, il ne l'est pas vraiment. Il mène sa bataille quotidienne, en silence, tout comme moi d'ailleurs. J'ai énormément d'amis d'enfance qui me rajoutent sur les réseaux sociaux et se plaignent matin, midi et soir du Sénégal. Ils ne cessent de me répéter : « Reste là-bas c'est mieux, ici il n'y a rien et la vie est dure ».

Ce qu'ils ignorent c'est que c'est difficile partout. Qui parle des impôts exorbitants que nous payons ? Les gens n'y font jamais référence.

Ils voient que tu bosses, tu as une voiture et hop ils disent que tu as réussi et veulent vivre la même chose que toi. Il n' y a rien de mieux que d'être chez soi. Je n'ai jamais aimé la vie à l'étranger. Mais je ne pouvais plus rester chez moi et partir était ma seule alternative. Pour être honnête, je n'ai pas regretté.