Chapitre 32

26 4 28
                                    

En cette fin de soirée d'été, Elroy passait son temps dans l'un des endroits qu'il avait le plus détesté dans son existence. Accompagnant Lucina, il préférait se faire discret, et restait tapi dans un coin de la grande pièce. À l'abri des projecteurs, et loin des caméras, il observait sa femme, qui remettait le col de sa chemise pourpre, sous sa veste blanche.

Non loin d'elle, le ministre de la culture : Holoran Deïn. Tous deux s'affairaient avec le patron du journal d'informations télévisée le plus populaire d'Oghetta. Cet homme, brun, à la barbe drue, au visage et à la carrure carrée, rappelait à Elroy son père. Le chef d'entreprise ne ressemblait par ailleurs en aucun point au plus jeune des deux ministres.

Âgé de la trentaine, et ayant laissé sa carrière de mannequin et acteur derrière lui, Holoran avait une épaisse chevelure rousse, le visage fin, et un corps svelte recouvert par un élégant costume gris. Ce n'était pas étonnant, au vu de son parcours, que cet homme eut été choisi pour représenter la culture de la ville. D'autant plus qu'il ne fallait pas oublier ce à quel point il était populaire, par son physique, auprès de nombreux adolescents.

Lui et Lulu se connaissaient depuis bien longtemps. Et Elroy n'aimait pas l'admettre, mais il en fut jaloux un temps. Ils s'étaient rencontrés durant leur jeunesse, quelques mois avant que le brun ne fasse la connaissance de celle qui devint sa femme ensuite. Holoran venait tout juste de débuter ses études de politique, tandis que Lucina entamait alors sa dernière année.

Aujourd'hui, ce n'était plus la contrariété de voir sa femme si amicale avec un autre homme, il y était habitué, mais les cruels souvenirs de leur jeunesse qui refaisaient surface. Lorsqu'il avait épousé Lulu, il avait été conscient que leur mariage ne mènerait à rien. Seulement, cette évidence continuait à faire souffrir le brun.

Et surtout, ce qu'il avait appris peu de temps avant : Lucina était revenue, une heure plus tôt, complètement angoissée, mais surtout agacée. Rares étaient les fois où Elroy l'avait vue dans un tel état. Il ne comprit pas tout de suite, néanmoins, dès que la brune lui expliqua que Deverell avait refusé de lui apprendre la moindre information sur leur fils, il ne put que partager sa colère. 

Bien qu'un certain soulagement avait envahi Elroy, puisqu'il avait enfin la confirmation que Leran était en vie. Seulement, il ne fut que temporaire. Puisqu'une fois cette peur éteinte, celle de ne jamais revoir son fils à cause du mur avait fait surface, le rendant encore plus nerveux. Et il craignait que ce sentiment ne se trahisse dans ses gestes. 

En effet, il avait rapidement remarqué, qu'il n'avait plus pensé une seule seconde à la cuisine, et ce, pendant bien trop longtemps. Il n'avait plus bassiné Lulu avec ses innombrables questions sur le repas qu'elle souhaitait partager avec lui. Alors il ne cachait pas que l'invitation de Nela, pour partager un apéritif après l'interview de Lucina, était pour lui un grand soulagement.

" Plus que trois minutes avant de passer en direct ! " s'écria l'une des caméramans.

Cet éclat de voix ramena Elroy à la réalité. En jetant un regard à sa femme, qui lui adressa un fin sourire en retour, il s'assit sur une chaise non loin. Il savait que sa femme n'aimait pas se retrouver dans ces situations, à devoir nier les fausses rumeurs qui se propageaient au propos du mur. Enfin, il supposait qu'elles étaient fausses. 

Lucina était, en théorie, défendue de parler de quoi que ce soit vis à vis de ce qu'il se passait au mur. Seulement, elle demandait parfois conseil à son mari, révélant par la même occasion certaines informations. Bien que ce fut souvent des fuites majoritairement minimes, Elroy savait qu'il en connaissait plus que beaucoup de personnes en ville.

Soudainement, un journaliste traversa la pièce en vitesse, pour se retrouver aux côtés de Lucina. Il le reconnaissait, par sa chemise orange et son pantalon droit bleu ciel. Un large sourire creusait les fossettes de son visage carré. Beaucoup l'avait apprécié pour son style parfois encore plus excentrique. Bien que personne à ce jour n'avait commencé à porter des chemisiers imprimé tournesol pour lui ressembler.

On the other side [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant