Chroniques d'une Mercenaire - Tome 2 : Amnésie [Terminé]

Chapitre 35

Ils puisèrent dans leurs dernières forces pour faire trois kilomètres et la nuit tombait. Ils s'étaient engagé sur la pente de l'une des montagnes du massif. Avec la nuit, la fraîcheur était arrivée, les soulageant un peu.
Se sentant incapable de faire un pas supplémentaire, ils s'écroulèrent au pied d'un éboulement.
La première chose qu'ils firent fut de se charger de leurs blessures. Installés autour du feu de camp, Leïmy et Dévlin humidifièrent à peine une bande de tissu arrachée au manteau de Negg pour nettoyer leurs plaies. Le plus préoccupant restait la côté fêlée de Leïmy.
Ils mangèrent lentement sans en avoir envie, la chaleur de la journée et la fatigue leur coupant l'appétit.
Negg avala sa bouchée puis posa la question qui faisait s'interroger tout le monde :

« Qu'est-ce que...qu'est-ce que c'était que cette...cette chose ?
- Pas la moindre idée, répondit Leïmy, mais je ne suis pas mécontente qu'il soit mort.
- Dans tout les cas, il s'intéressait beaucoup à Leïmy.
- La ferme, Dévlin !

La véhémence que Leïmy voulait mettre dans ses paroles ne s'entendit guère, ce qui fit sourire Negg.
Ce dernier fit remarquer :

- Avez-vous vu la taille et la force de Vargo ? Nous avons de la chance d'être encore vivants et de nous en être tirés sans blessure vraiment grave.
- Dis ça à ma côte cassée.

Grommela Leïmy.
Dévlin fit comme si elle n'avait pas ouvert la bouche et prit la parole en rebondissant sur les paroles de Negg :

- Je pense qui si nous sommes parvenus à nous en sortir, c'est parce que nous avons travaillé ensemble en nous faisant confiance. Le Conseil et la Garde nous recherchent et la guilde des mercenaires veut vos têtes alors nous ne pouvons compter que les uns sur les autres ou nous serons morts dans moins de deux semaines. Cessons les disputes stériles et arrêtons de se contredire uniquement pour se vexer les uns les autres.

Les deux mercenaires restèrent plongés dans leurs pensées un instant puis ils acquiescèrent sans plus tergiverser.
Leïmy opina :

- Tu as raison, c'est vrai mais je ne vais pas devenir subitement pleine de respect et de sollicitude.
- Tu ne serais plus toi dans le cas contraire.

Lança Negg sans la moindre méchanceté ou agressivité, seulement avec un grand sourire.
Leïmy marmonna une réplique puis elle sortit sa couverture et s'enveloppa dedans avec une grimace. Chaque mouvement lui était douloureux à cause de sa fracture.
Negg et Dévlin en firent de même.
Vaincus par l'épuisement, ils ne tardèrent pas à s'endormir d'un sommeil lourd et sans rêve.

Ils se réveillèrent tôt dans la mâtinée mais la chaleur était déjà étouffante.
Leïmy s'étira mais la violente douleur qu'elle ressentit au flanc lui rappela sa blessure de la veille.
Cela ne se terminerait donc jamais, les souffrances qui la cueillaient dès le réveil et les convalescences ?
Elle avala une gorgée d'eau puis posa son regard sur les deux frères qui émergeaient tranquillement de leur sommeil.
Dévlin se passa une main sur le visage. Visiblement, la nuit avait été trop courte pour lui. Quant à Negg, Leïmy ne parvenait pas à savoir si le violacé qu'il avait sous les yeux était dû à des cernes ou à des contusions.
La jeune fille étouffa un bâillement. Même cela lui était douloureux.

« Que va t-on faire ? Demanda Dévlin en rangeant sa couverture.
- Nous allons traverser le massif d'Allique et gagner Morka, comme prévu.

Déclara Leïmy puis elle se leva et commença à rouler sa couverture.
Negg s'aperçut qu'elle faisait tout cela en se tenant le flanc et, malgré ses efforts, un léger rictus de souffrance tirait ses lèvres.

- Ça va aller ? S'enquit le rouquin.
- Parfaitement.

Répondit sèchement Leïmy.
Negg savait ce que cela signifiait. La jeune fille détestait montrer sa douleur. Cela lui donnait l'impression d'être faible, tout ce qu'elle haïssait.
Negg n'insista pas davantage et passa son sac sur son épaule. Les deux autres l'imitèrent et ils se mirent en route.
La pente, d'abord douce, s'accentua pour devenir raide, éprouvant encore davantage les trois compagnons.
Ils progressèrent durant une demie-heure puis Leïmy réclama une pause.