Chapitre 3 : Anna

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Mon réveil me tire de mes songes bien trop tôt à mon goût. Je profite des dix minutes de répit avant ma deuxième alarme pour me replonger un peu dans le rêve dont la première m'a privé. J'étais jusqu'alors dans les bras de morphée en compagnie du héros de ma dernière lecture. Mais mon réveil a tout fait voler en éclat, j'ai beau tourner-virer dans mon lit, il ne me revient pas.

J'ouvre les yeux, fixant mon plafond. Encore une nuit avec pour seule compagnie un héros de roman. Je vais finir par croire que je suis vouée à rester éternellement seule. Peut-être que j'aurais dû en profiter avec ces étudiants l'autre soir, et mettre à bas mes principes. Le visage flou de Robin me revient en mémoire, cet homme n'est vraiment pas mon genre et j'espère que ma mère ne tentera rien à son encontre.

La deuxième alarme retentit, et dans un geste machinal — soit mon doigt qui glisse sur le bas de mon téléphone — , j'y mets fin.

Une fois debout, j'aère mon lit et prends la direction de la cuisine où je me prépare un café devant des dessins animés. Dans ma tête, mon moi enfant et mon moi adulte se bagarrent sur le choix d'un tel programme. Je les laisse faire contemplant sans la voir, la télé.

Mon regard est soudain attiré par le post-it sur le meuble de l'entrée. Je n'y ai pas prêté attention hier, mais il semble beaucoup plus raturé que d'habitude. Mettant fin au massacre dans ma tête, je me lève et avise le message.

Mademoiselle Anna, pourriez-vous venir jeudi ou vendredi ? Mon petit-fils arrive ce week-end et il faut lui préparer la chambre d'ami. Il faudrait aussi faire des courses, mais je ne sais pas ce qu'un garçon de son âge mange. Vous êtes jeune, je suis sûr que vous aurez trouvé quoi acheter d'ici là. Merci

Je soupire, j'apprécie mon voisin, mais j'ai l'impression qu'il a tendance à oublier que j'ai une vie, et puis comment suis-je censé savoir ce qu'un garçon de dix-sept ou dix-huit ans mange ? Surtout sachant comment, moi, je mange. Hormis de la junk food, je ne vois pas.

Travaillant vendredi et samedi, je prépare un post-it rose, — ce qui l'énerve car ça fait trop petite fille d'après lui, — sur lequel j'indique à mon voisin être disponible jeudi, je lui dis que je passerais en début d'après-midi récupérer sa liste de course, et m'occuperais du ménage en revenant.

Une fois cela fait, je me rends dans ma salle de bain et saute sous la douche où je laisse l'eau chaude ruisseler sur ma peau. J'aurais aimé me baigner hier, mais les journées avec mes parents sont beaucoup trop courtes, et au vu du monde sur la route, je n'aurais sans doute pas trouvé une place où poser ma serviette. L'eau me tire une grimace et en inspectant mon biceps, j'aperçois une marque rouge tout le long. Je n'ai pas pour habitude d'avoir des coups de soleil, mais il faut croire qu'il tapait assez fort hier. Doucement, je passe du savon sur la zone douloureuse, puis en sortant de la douche j'y applique de la crème. Mon nez et mes pommettes également rouges, j'en applique sur mon visage. Je n'aurais peut-être pas dû passer l'après-midi allongé sur le transat dans le jardin, mais ça ne m'empêchera pas de recommencer.

Enroulée dans une serviette, je quitte ma salle de bain vaporeuse pour ma chambre à la recherche de vêtements. Le problème quand on travaille en intérieur, c'est que l'hiver il fait froid dehors et chaud dedans, et l'été, c'est le contraire. Aussi j'enfile un débardeur et passe une veste légère par-dessus.

Je quitte l'appartement sous un soleil déjà bien présent, et me rends à l'arrêt de tram le plus proche. Mon appartement est plus prêt de la fac que de mon travail, aussi le tramway est, durant la période scolaire, bondé d'étudiants. Je sais qu'avec mon allure, je fais plus étudiante que femme active, aussi j'ai tendance à me noyer dans la masse. Pour l'instant, ils n'ont pas encore repris les cours, aussi je peux profiter des places assises disponibles.

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