Chapitre 4 : Julien

105 10 0
                                    

La musique à fond dans les oreilles, je n'entends pas la voix sortir des différents haut-parleurs du wagon nous annonçant l'arrivée en gare de Bordeaux. C'est seulement en voyant les gens autour de moi s'affairer que j'en prends conscience. Je regroupe mes affaires dans mon sac et suit les familles qui rentrent de vacances, sans oublier de prendre mes deux valises dans le compartiment à bagage.

Sur le quai, je lève les yeux vers l'impressionnante structure métallique, celle-ci n'a clairement rien à voir avec la gare de Pau, beaucoup plus petite. Étant la première fois que je mets les pieds ici, je suis la foule qui se presse pour sortir. Je trouve le hall de la gare immense.

Après plusieurs recherches sur internet, ma mère, qui n'a pratiquement pas mis les pieds dans cette ville depuis des années, m'a donné un itinéraire de tram facile à prendre. On a bien aperçu un bus, qui semblait plus direct, mais avec deux grosses valises, on n'était pas sûr que je puisse rentrer dedans.

Je me plante devant une borne de ticket et me récupère un carnet de voyages pour être sûr d'en avoir assez avant de faire une carte de transport, puis j'attends le tram. Par chance, l'arrêt se situe pile devant la gare et je n'ai pas à marcher longtemps.

Quand je repère celui qu'il me faut, je grimpe dedans en poussant un peu les passagers afin de faire passer mes deux valises, c'est un des conseils que m'a donné mon père, il craint visiblement que la vie en agglomération change un campagnard comme moi. Bizarrement, je l'ai senti plus tendu que quand je suis parti un an en Californie avec un . Je ne connais pas tous les détails de ce qu'il s'est passé avec mon grand-père mais ce qui est sûr c'est qu'il en garde de la rancœur. Et moi, je ne sais même pas comment me comporter avec cet homme chez qui je vais vivre et avec lequel je n'ai aucun contact, et d'aussi loin que je me souvienne, aucun souvenir non plus.

Mon père est du genre forte tête et il parait que c'est un défaut qu'ont tous les hommes de notre famille d'après ma mère. Si la cohabitation est aussi fructueuse qu'avec mon père, je sens déjà qu'on va faire des étincelles tous les deux. J'espère que les voisins sont sourds de la feuille.

Debout dans le tram, mes valises autour de moi, j'observe ce qui m'entoure, mon casque toujours sur la tête. Je ne suis rentrée que depuis quelques mois en France, et après un an aux US, j'ai encore un peu de mal à me refaire à la vie française. Mon regard a changé, je ne saurais pas l'expliquer mais ce que j'ai vécu là-bas, m'a fait prendre conscience de certaines chances qu'on avait chez nous. Je sais qu'il va falloir que je fasse attention à mon comportement, mon père me l'a bien fait comprendre, j'ai apparemment pris beaucoup de « mauvaises » habitudes, comme il aime à me le rappeler.

Autour de moi, je surprends les regards de certaines filles. Même si ça m'agace, je sais que ma peau halée par le soleil et mes cheveux châtain clair me donne ce petit look californien qui leurs plaît, sans compter sur mes yeux qu'elles ne peuvent s'empêcher de commenter, oubliant tout le reste chez moi, même la masse que j'ai pris aux USA.

A travers la vitre, je devine les quais de Bordeaux, où familles et jeunes profitent des dernières heures de liberté avant la rentrée scolaire. On arrive à la place des quinconces que je n'ai pas le temps d'observer, puisqu'il me faut me rendre à mon deuxième tram qui arrive. Dans celui-ci, moins rempli, je trouve une place assise que je ne quitte pas jusqu'à l'arrêt auquel je descends.

Une fois l'adresse de mon grand-père dans mon téléphone, je le laisse me guider à travers les rues jusqu'à sa résidence. Je trouve facilement le petit portail pour piétons, juste à côté du grand pour les voitures, j'en tape le code qu'on m'a donné, et suis le chemin jusqu'à l'entrée de l'immeuble. Là aussi, il me faut taper un code pour que les portes s'ouvrent. On est loin des différents endroits où je suis allé en Californie, et où la plupart des maisons restaient ouvertes. Il faut dire que là-bas, les voisins sont assez vigilants à la moindre personne suspecte qui passe.

Sur le même palier [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant