Sur le même palier [Terminé]

Chapitre 14 : Julien

— Tout va bien ? Anna !

Elle cligne des yeux à mesure qu'elle reprend pied avec la réalité. Son regard est apeuré, et elle regarde partout cherchant un point où s'accrocher. Je vois bien qu'elle se rend compte du monde autour de nous et que ça ne l'aide pas. Pierre aussi semble paniqué, et personne ne sait réellement comment agir, alors je lui attrape le menton et la force à me regarder dans les yeux. Ne pouvant détacher mon regard de cette tache marron au milieu du vert.

— Anna, tout va bien, c'est terminé, mais il faut que tu te lèves parce que la prochaine partie va commencer. Tu peux le faire ?

Elle hoche sa tête que je maintiens toujours. Usant de ma main libre je passe dans son dos, et l'aide à se relever sans effort. Elle prend appui sur moi et on quitte la piste pour l'extérieur. Cependant, une fois de retour sur la terre ferme, elle ne me lâche toujours pas. S'agrippant à moi comme si sa vie en dépendait, au grand damne de Pierre, qui me regarde comme prêt à me sauter dessus pour que je la lâche.

— Heureusement que tu ne nous as pas fait ça dans un autre manège, dit son amie.

Ça ? D'ailleurs qu'est-ce qu'il s'est passé exactement ? J'étais avec Caroline, on se faisait rentrer dedans par deux étudiantes visiblement ravies par ce face à face et quand j'ai tourné la tête, Pierre partait dans un coin avec Anna toute blanche à ses côtés.

— Je suis désolé, je ne voulais pas vous inquiétez. Je pensais vraiment que ça irait.

Les larmes menacent de couler sur son visage et sa meilleure amie la prend dans ses bras. Nous échangeons un regard gêné avec Pierre. Les pleures de filles, on ne sait visiblement pas gérer.

— C'est rien, et puis maintenant tu peux dire que tu as fait des auto-tamponneuses et que t'as survécu.

Une sorte de rire mêlé à des pleurs secoue Anna, et elle se redresse essuyant ses yeux.

— Bon, allez, vous voulez faire quoi maintenant ? demande-t-elle.

— Je vais vous laisser, dit Caroline, il est temps que j'ai une discussion avec quelqu'un. Ça va aller ?

Ma voisine la rassure d'un sourire, puis nous fait la bise avant de nous laisser tous les trois en plein milieu d'une allée, ce qui semble déplaire à Anna qui se dandine sur place.

— Vous voulez faire un autre manège ? demande-t-elle.

— Pour moi c'est bon, j'ai eu assez d'émotion forte pour aujourd'hui, dit Pierre en jetant un regard à Anna.

Visiblement, elle lui a fait peur, et je ne peux que le rejoindre là-dessus, j'ai plus eu peur aujourd'hui en la voyant toute blanche dans l'auto-tamponneuse que dans tous les manèges dans lesquels je suis monté.

— Tu as raison, on ferait mieux de rentrer, ajouté-je en haussant les épaules. Et puis on bosse demain, et le week-end a été court.

— Tu rentres aussi, Anna ?

— Je... je crois que oui. Julien a raison, on bosse demain et j'ai pas beaucoup dormi dernièrement.

— Oh.

Pierre baisse la tête, déçu.

— Bon, ben on n'a plus qu'à prendre le tram pour rentrer, ajoute-t-il en commençant à marcher tout droit vers l'arrêt.

J'échange un regard avec Anna, aussi surpris qu'elle par son attitude, puis m'engage à sa suite, et tout en vérifiant qu'Anna nous suit bien derrière, je rattrape mon camarade.