Chapitre 7 : Anna

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Les samedis après-midi passent à une vitesse folle, le flux de client est toujours continu. J'ai à peine débarrassé une table qu'elle est réquisitionnée quelques minutes plus tard.

Derrière le comptoir, Gladys est au taquet alors que je me contente du nettoyage des tables et des conseils sur les livres. Au début, Marianne a bien tenté de me mettre derrière le comptoir, et même si je sais le gérer, sûr des journées comme celle-ci, j'ai tendance à m'embrouiller les idées et je deviens inefficace. Alors on se partage les tâches et dès qu'il y a trop de monde, je viens lui prêter main forte.

Le chignon de tresse africaine de ma collègue disparaît sous le comptoir, et je me précipite à son secours, sous le regard impuissant des clients.

— Bon alors, c'est quoi le problème ?

— Encore ce putain d'ordinateur qui veut pas m'ouvrir la caisse. Je dois rendre de la monnaie mais il m'a bloqué le tiroir.

— Ok, laisse-moi faire, occupe-toi de rassurer les clients.

— Heureusement que tu passes partout avec ta taille.

Je tire la langue à ma collègue qui me dépasse d'une bonne quinzaine de centimètre et ça, sans ses talons, puis je me glisse sous le comptoir jusqu'à la prise ordinateur. C'est la deuxième fois cette semaine que la caisse se bloque, et le technicien ne pourra venir que lundi, jusque-là, étant la plus petite c'est à moi de me trémousser dessous.

A l'aide de la lampe torche de son téléphone, — n'ayant pas de poche sur ma jupe j'ai laissé le mien dans mon casier, — j'éclaire les fils qui pendent avant d'en débrancher un et de le rebrancher, je ne sais pas exactement ce qu'il relie et à quoi, mais quand la patronne vous demande de débrancher, vous le faites. Mon nez se plisse sous la poussière qui règne dessous, et je ne retiens pas l'éternuement.

— A tes souhaits ! me lance ma collègue hilare au-dessus de moi. C'est bon ça marche, tu peux sortir de là.

Je me retiens de lui dire qu'un ordinateur « fonctionne », et commence à bouger mes fesses de dessous.

— Bonjour, excusez-moi de vous déranger, auriez-vous par hasard une employée du nom d'Anna.

La surprise que quelqu'un me cherche — et ne m'y attendant pas du tout — me fait relever la tête plus vite que prévu. Ce qui me vaut de me prendre un tasseau en bois vissé sous le comptoir.

— Aie !

— Je crois qu'elle est juste dessous, réponds ma collègue toujours hilare, qui la demande ?

— Pierre, je suis un ami.

Je passe la tête sous le comptoir. Les yeux écarquillés, je croise ceux de ma collègue à qui j'ai raconté mes deux rencontres avec l'étudiant.

— Eh ben ! ma poulette, me lance la métisse à haute voix, et avec un clin d'œil appuyé dans ma direction, je ne savais pas que tu avais des amis aussi sexy ! Moi qui te croyais trop casanière pour ça.

Si mes yeux pouvaient lancer des éclairs et foudroyer quelqu'un, ils le feraient à cet instant. Gladys m'aide à me relever, et quand je pose les yeux sur les deux personnes qui se tiennent devant moi, je comprends mieux le « sexy ».

— Salut, mais qu'est-ce que... Qu'est-ce que vous faites là ?

— Oh ! On passait dans le coin et puis je me suis souvenu que tu travaillais dans un café-librairie alors en passant devant, j'ai proposé à Julien d'entrer vérifier si c'était là.

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