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Aller au lycée prenait de moins en moins de sens pour Kenma. Il trouvait ça vraiment bête d'aller y passer dix heures de sa journée, alors que chaque seconde lui était comptée. Et puis... Etudier pour quoi, se disait-il. Il allait passer les examens de fin d'année pour quelle raison ? De toute manière, il n'irait pas en terminale, et il ne ferrait pas de grandes études. C'était vraiment du temps de perdu.

Il arriva donc au lycée, comme tous les matins, avec son air nonchalant et ses mains dans ses poches. Il avait un peu la nausée et était vraiment fatigué, mais c'était les effets de la maladie. Il devait déjà s'estimer heureux de pouvoir garder une vie normale, même si la mort n'était pas loin.

Le blond troqua ses chaussures contre des chaussons, et partit immédiatement dans sa salle de cours. Il était au fond de la classe, et il n'avait pas d'amis. A part Kuroo, personne n'avait jamais essayé de le connaître. Kenma s'était souvent demandé pourquoi. Si c'était lui qui était en décalage constant avec les autres, ou si juste la société actuelle allait trop vite pour lui. En tout cas, et surtout depuis qu'il savait qu'il était malade, il avait décidé d'arrêter de se torturer avec cette question. Tout comme pour son futur, il y aurait bien un jour où ça n'aurait plus aucun sens.

Alors il prit place, sans que personne ne fasse attention à lui. Kenma était toujours perturbé par ce dont il avait envie ou non. Kuroo lui avait vendu du rêve sur un plateau d'argent : vivre à 200 %. Bien sûr que c'était tentant. Mais face à l'adversité, il n'était pas sûr de pouvoir le faire.

« Keeeeenma ! »

A l'entente de son prénom, le blondinet se tourna vers la provenance de ce son. Ses lèvres formèrent un petit sourire en voyant la crête blonde de Yamamoto pénétrer dans la classe.

Yamamoto était en première aussi, mais il se trouvait dans la salle de classe juste à côté. C'était agréable de pouvoir manger avec lui de temps en temps.

« Salut, répondit le plus petit.

- Tu peux te libérer à 14h aujourd'hui ? Il y a entraînement spécial, expliqua le garçon en fourrant ses mains dans sa poche, souriant grandement.

- Spécial ? Spécial comment ?

- Tu vas voir. Idée du capitaine ! »

Il fit quelques pas à reculons en rigolant, agitant également sa main avant de quitter la pièce. Kenma fronça ses sourcils et planta son visage au creux de sa main, tournant la tête vers la fenêtre. Un entraînement spécial ? Il espérait honnêtement que Kuroo n'allait pas être trop dur avec eux. Il n'avait clairement plus la même force dans les jambes ou dans ses bras. Le volley, même s'il y prenait toujours autant de plaisir, était presque devenu un luxe.

La sonnerie retentit, signifiant l'heure des cours. Pendant toute la mâtiné, Kenma fit mine de faire ses exercices, alors qu'il se contentait de gribouiller ici et là ce qu'il lui plaisait. Est-ce qu'il devrait faire un testament ? Un discours que quelqu'un lirait lors de ses obsèques ? Certes, ce n'était pas très joyeux, mais le cours était tellement mortel que c'était dans le thème au final.

« Kozume, lis nous ce passage s'il te plait. »

La tête de Kenma se redressa rapidement, et croisa le regard de son professeur. Il prit la peine de se contenir pour ne pas soupirer et se leva. Il prit son livre entre les mains, racla sa gorge et commença à lire. Il ne savait même pas de quoi ce bouquin parlait, très honnêtement, il ne l'avait jamais ouvert.

« Des anniversaires et des rentrées des classes. Des déguisements de cow-boy, des dessins d'animaux accrochés au frigo. Des batailles de boules de neige, des tours de magie, des tartines de confiture à l'heure du goûter. Et le temps passera. Le voix de Kenma ricocha légèrement. Il y aura d'autres séjours à l'hôpital, d'autres examens, d'autres alertes, d'autres traitements. Chaque fois, tu monteras au front, la peur au ventre, le cœur serré, sans meilleure arme que ton envie de vivre encore. Chaque fois, tu te diras que, quoi qu'il puisse t'arriver à présent, tous ces moments arrachés à la fatalité valaient la peine d'être vécus. Et que personne ne pourra jamais te les enlever.

1 8 3 | KUROKEN | HaikyuuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant