Septembre - 3

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Les coups provenaient de la porte de la salle de bain. Je marquai un temps d'hésitation. Je n'avais pas envie de me montrer aimable avec des personnes aussi ingrates que les jumelles. Pourtant, d'un autre côté leur présence me manquait et une forme d'inquiétude avait fait irruption face à cette visite nocturne.


«- Entrez, dis-je d'une voix que je cherchai à garder la plus neutre possible.

- J'ai vu sous la porte que la lumière n'était pas éteinte, m'expliqua ma visiteuse en glissant la tête par la porte entrouverte. Je peux te tenir compagnie ? »


Sans un mot, je lui fis signe d'entrer et d'approcher. Elle s'avança sur la pointe des pieds pour ne pas faire le moindre bruit. Précaution inutile car nos chambres étaient suffisamment à l'écart pour nous offrir une grande intimité.

Vêtue d'une longue robe de chambre blanche en coton et les cheveux dénoués pour la nuit, elle traversa la pièce et vint s'asseoir sur le bord du lit. Elle me parut embarrassée.


«- Que t'arrive-t-il ?

- Églantine s'est endormie mais moi je n'y arrive pas. J'ai peur. J'ai un mauvais pressentiment.

- Comment ça ? Viens ici et raconte moi ce qui t'inquiète, proposai-je en tapotant sur le lit pour l'inviter à s'allonger à côté de moi.

- Je ne sais pas, fit-elle en prenant place, j'ai l'impression qu'il va arriver quelque chose de très triste. Et j'ai pensé à mon père et surtout à mon frère qui est sur le front en première ligne.

- Mais non, il ne faut pas penser à ça. Je suis certain qu'ils vont revenir en bonne santé. C'est normal que tu sois inquiète mais ça ne veut pas dire que cela va arriver. On a tous peur. »


En apercevant une larme sur le point de perler au bord de ses yeux, j'attire Marguerite contre moi et je lui passe un bras autour des épaules pour la réconforter. En ces temps compliqués, il n'était pas rare à chacun d'entre nous d'avoir ce genre de pensées et de craindre le pire pour nos proches. Il suffisait de voir la peur dans le regard de mon amie pour comprendre que ce soir là, ses émotions avaient pris des proportions inhabituelles. Mon irritation à son égard ne résista pas à ce besoin d'être choyée.


«- Tu trembles, tu as froid ?

- Un peu, me répondit-elle.

- Viens, glisse toi sous les couvertures, il y fait bien meilleur. »


Marguerite s'immisça dans le lit et revint se blottir contre moi. Petit à petit, ses tremblements se calmèrent.


«- Que faisais-tu ?

- Je lisais. Je t'ai emprunté un livre.

- Apollinaire, tu as bien fait. Tu peux piocher autant que tu veux dans la bibliothèque. »


Nous marquâmes un temps de silence, puis toujours collée contre moi, Margot me demanda :


«- Pourquoi tu nous faisais la tête ce soir ? »


Je posai le livre devant moi et resserrai mon emprise autour de ses épaules.


«- Excuse moi, je suis parfois très susceptible. Je n'aurais pas du être aussi désagréable.

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