Chapitre 6.

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PDV : Rania 

Cela fait quelques heures que mon père est parti de l'appartement, ma mère s'occupe de moi en m'aidant à prendre mon bain. J'ai la peau sur les os. Ma mère est bouleversée de me voir dans cet état-là, je crois que c'est la première fois que je la vois ainsi... Elle qui est si fière et qui a du mal à exprimer ses émotions, aujourd'hui elle est à fleur de peau et s'occupe de moi comme si j'étais encore une petite fille. C'est peut-être égoïste de ma part, mais je voudrais tellement que ce soit tous les jours ainsi. Ai-je cette pensée parce que j'ai vécu l'enfer à Auschwitz ? Sûrement...

Ma mère m'aide à sortir de la baignoire, à me vêtir d'une chemise de nuit confortable, puis à entrer dans le lit, avant de me couvrir d'une couverture épaisse. Elle m'apporte ensuite un plateau avec une assiette de pâtes à la sauce tomate et un verre d'eau.

— Je suis désolée de te donner aussi peu, mais étant donné ton poids actuel, je pense que tes intestins se sont habitués à recevoir très peu de consistants et si je te donne plus, tu pourrais faire une dysenterie*.

J'acquiesce de la tête, lui faisant totalement confiance étant donné qu'elle est infirmière de guerre. Je commence à manger doucement, puis à boire doucement mon verre d'eau. Lorsque je termine mon repas, ma mère débarrasse le plateau et revient pour s'asseoir sur une chaise.

— Explique-moi... me dit-elle d'une voix douce.

— De quoi veux-tu parler ?

— Je veux que tu m'expliques ce qui s'est passé, Rania. Je sais qu'il y a quelque chose qui te ronge. Alors, dis-moi...

Je la regarde droit dans les yeux, avant de m'enfoncer un peu plus dans le lit et de lui dire d'une voix tremblante :

— J'ai rencontré une petite fille au camp de Drancy... Elle s'appelait Marie, lorsque j'ai fait sa rencontre, ses parents avaient déjà été déportés à Auschwitz. Et je supposais déjà qu'ils étaient certainement décédés. Lorsque les nazis nous ont emmenées dans les camions qui allaient nous mener à la gare du Bourget, je lui ai promis de ne jamais l'abandonner, mais...

— Continue, Rania.

— La petite fille transformée en siamoise, c'était Marie... je lui réponds, en larmes.

— Rania, je suis désolée.

— C'est ma faute, maman, si j'avais été un tant soit peu plus forte, j'aurais pu lui sauver la vie, mais...

— Rania... ce n'est pas ta faute si elle est morte... Tu as fait de ton mieux pour la protéger.

— Non ! Je n'ai rien fait pour la protéger. Les nazis n'ont eu aucun respect pour Marie. Ils me l'ont arrachée des bras et l'ont emmenée... elle n'avait que sept ans...

— Rania, regarde-moi.

Je lève vers elle mes yeux remplis de larmes et de regrets.

— Marie a eu de la chance de t'avoir rencontrée. Sans toi, elle n'aurait certainement jamais survécu jusqu'à Auschwitz. C'est uniquement à cause des nazis et non à cause de toi, tu m'entends ? Rania, si tu avais résisté face à eux, tu te serais fait tuer avec Marie.

— Alors tu penses que...

— Je pense que cela aurait pu juste ralentir l'inévitable, dit gravement ma mère.

— Tu crois que, dans tous les cas, elle était condamnée ? lui dis-je d'une voix tremblante.

— Oui, me répond-elle d'une voix triste, avant de me caresser les cheveux avec douceur.

— Je ne peux pas m'empêcher de penser que tout ceci est ma faute, mais d'un autre côté, si j'avais résisté face à ces monstres, j'aurais été tuée et Marie aurait été dans tous les cas condamnée.

Elle me sourit, avant de m'embrasser le front et de se relever.

— Je vais te laisser te reposer, maintenant...

Mais avant qu'elle s'en aille, j'intercepte son poignet et lui dis d'une voix suppliante :

— Non ! Je t'en prie, reste avec moi, jusqu'à ce que je puisse m'endormir...

Ma mère ouvre les yeux en grand, avant de me sourire gentiment.

— Bien sûr.

Je m'installe plus confortablement dans le lit, ma mère commence à me caresser les cheveux et sans que je puisse contrôler quoi que ce soit, mes yeux se font de plus en plus lourds, avant que je m'endorme totalement.

Dysenterie : La dysenterie désigne des diarrhées très importantes causées par une infection bactérienne, un parasite ou des produits toxiques irritants.



A  Travers le temps. Tome 4. L'âge Des Pharaons. CorrigerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant