Chapitre 25

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J'étais estomaquée. Je passais mon regard sidéré sur chacun d'eux, qui frappaient silencieusement leurs mains, mais dont l'écho imaginaire résonnait tout de même dans ma tête.

Pour la première fois de la journée, j'oubliai mon embarras vis à vis de mon sensei et tournai un regard estomaqué vers lui, lui demandant par les yeux la signification de toute cette allégresse. Mais je ne croisai que sa paupière plissée en un sourire invisible, qui me déchargea d'un certain poids. Mais je détournai les yeux aussitôt qu'il ouvrit les siens; la honte me rappela à la réalité à grand coup de matraques sur ma conscience. Je ne savais pas encore quoi faire de ça.

Alors j'embrassai de mon regard sidéré cette foule d'inconnus qui nous adulaient. Je posai une main sur la tête de la fillette qui ne m'avait pas quittée d'un millimètre, pour m'assurer que tout ceci était bien vrai. Alors comme ça, elle était vivante. Bien portante. C'est lorsqu'elle leva le visage que je pus apprécier le fait qu'elle n'avait pas été défigurée par les flammes. Elle n'avait vraiment rien.

J'oubliai quelques secondes la douleur que m'apportait tout ce silence autour de moi, ces applaudissements mutiques. Soudainement, mon handicap me paraissait bien bénin par rapport à ce que nous avions réussi à accomplir dans ce village. Par rapport à la vie de cette gamine qui respirait encore, en échange de mon audition. Pour la première fois, je me dis que l'échange était plus qu'équitable, et que perdre sa capacité d'entendre en avait valu la peine, rien qu'en voyant le visage illuminé de la petite fille que j'avais sauvé.

Quelques personnes s'avancèrent à ma rencontre et je paniquai quelque peu en voyant qu'ils essayaient de me parler en même temps. Mais la silhouette de mon sensei s'était approchée la seconde d'après et il dut leur expliquer à travers son masque mon problème, puisque certains villageois me lancèrent quelques regards désolés. Kakashi-sensei venait encore de me sauver la mise et je regrettai tant mes honteuses actions de la veille qui ne me permettaient pas de lui lancer un regard reconnaissant.

« Vous... Vous n'entendez plus ? »

Je venais de lire sur les lèvres de la petite fille qui m'observait d'un regard horrifié. Je secouai la tête avec un petit sourire, comme pour la rassurer.

« C'est à cause de moi ? »

Je voyais déjà la culpabilité prendre place sur ses traits juvéniles. Et pour rien au monde je n'avais envie qu'elle porte ce poids alors qu'elle était encore là pour voir que moi aussi, je respirais encore.

- On est toutes les deux-là. C'est ce qui compte, non ?

Je lui souris doucement, et elle me le rendit. Je fus après coup légèrement déstabilisée par la sincérité de mes propres mots.

Oui, après tout. C'était tout ce qui comptait.

Les villageois nous retinrent longtemps. Nous passâmes une grande partie de la journée à nous faire balader par ces gens qui respiraient la reconnaissance et qui tenaient à nous la démontrer. J'ai été longtemps gênée, mais je me surprenais à me sentir plus radieuse que je ne l'avais rarement été. Bon Dieu, je n'avais jamais apprécié de façon aussi flagrante les conséquences de nos missions, de notre travail. A quel point nous pouvions faire le bien ou le mal, par les simples ordres qu'on nous transmettait. Et là, nous avions fait le bien.

Cela donnait un sens à être shinobi.

Je commençais à comprendre pourquoi mes parents s'étaient sacrifiés pour ça. Et cela me fit l'effet d'une gifle.

Tous ces gens qui nous remerciaient chaleureusement me confortèrent dans l'idée que je voulais rester une kunoichi. Que je voulais continuer à voir de la vie dans les yeux d'innocents, et je réalisai que si je devais pour ça perdre tous mes sens, je le ferai. Je ne m'étais jamais sentie utile. Et moi qui croyais que ce que je faisais n'avait aucun sens, je venais de comprendre pourquoi cela en valait la peine.

𝕊𝕚𝕝𝕖𝕟𝕔𝕖 | Kakashi x ReaderOù les histoires vivent. Découvrez maintenant