Chapitre 29

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Les semaines passèrent avec une lenteur presque douloureuse.

Pour remédier à cela, Tsunade a passé son temps à m'envoyer sur des missions de rang moyen en compagnie de Lee, et cela a au moins aidé à ne pas trop ressasser ce qu'il s'était passé dans la chambre d'hôpital de Kakashi-sensei.

Il s'agissait, la plupart du temps, de simples missions de surveillance ou d'escorte, que nous parvenions généralement à boucler sans aucun incident. J'avais encore la vague impression que notre Hokage avait encore du mal à me donner la charge d'une tâche qui impliquait nécessairement de se confronter à un ennemi réel, mais je comprenais.

A vrai dire, je n'étais pas sûre d'être encore prête à gérer ça.

Depuis que j'avais repris les missions de manière régulière, nous n'étions tombés qu'une seule fois sur le chemin de ninjas d'un pays ennemi. La confrontation avait été brusque, mais j'avais réussi à m'en sortir avec seulement quelques bleus et égratignures. J'avais ressenti la même vague panique que lorsque nous étions tombés entre les griffes de ces bandits, Kakashi-sensei et moi, lors de ma première mission après avoir perdu mon ouïe. Et pourtant, j'avais géré cette anxiété morbide qui ne m'avais tenue paralysée durant quelques secondes, avant que je ne prenne part au combat à la suite de Lee, dont les manières folles avaient légèrement déboussolé nos ennemis. Ces derniers étaient néanmoins infiniment plus forts que nous, et nous avions trouvés un moyen ingénieux de nous enfuir en les paralysant momentanément.

Je sentais la différence, néanmoins. J'avais ressenti l'efficacité de mes réflexes qui s'étaient affutés en faisant fi de ma surdité. Mes mouvements étaient presque redevenus aussi instinctifs et inconscients que lorsque j'entendais encore, alors que je mettais toutes mes compétences sur le dos de l'ouïe fine que j'avais autrefois.

Mon corps avait presque totalement compensé la perte de ce sens, s'était adapté à ceux qui me restaient encore. Cette révélation m'avait un peu secouée et avait gonflé mon cœur d'espoir.

J'étais en train de m'habituer. De m'habituer à vivre, combattre, parler en silence, et plus le temps passait, moins cela me paraissait insurmontable.

Je m'attendais de moins en moins à ce que mes oreilles se débouchent comme par magie. C'est une chose que je guettais à chaque seconde, les premiers temps après mon accident. Je me disais, le soir, en m'endormant : « Demain, c'est sûr, c'est le chant des oiseaux qui va me réveiller ! ». Et je crois que j'en avais marre de souffrir du fait que ça n'est jamais arrivé.

J'avais même commencé à me dire que vivre le reste de ma vie au cœur d'un monde qui ne faisait plus aucun bruit était en fin de compte envisageable. Réalisable. Et que peut-être, dans quelques années, lorsque la surdité ferait alors complètement partie de mon existence, ne plus me souvenir du timbre exact de la voix des gens qui me parlaient ne fera même plus mal.

Je l'espérais de tout mon cœur. Et je crois que j'étais en bonne voie, que j'étais en train de me diriger assez profondément sur le chemin aventureux de l'acceptation.

C'est avec cette résolution dans la tête que j'étais en train de traverser l'avenue marchande de Konoha, baignée sous un soleil doux d'automne, partiellement remplie de passants et de commerçants. Je réalisai qu'un certain Rock Lee exerçait une sacrée influence sur moi lorsque je me jetai le défi en pensées de réussir à marcher seule en plein milieu de cette rue d'un pas allant sous peine de faire cent tours de terrains en cas d'échec.

J'eus un petit sourire amusé à cette réflexion qui m'aida à poser mon premier pas sur les dalles polies du chemin entre les maisons. Et puis, je fus frappée par un souvenir, qui concernait une fois de plus un certain homme aux cheveux argentés, qui m'avait aidée à traverser une rue semblable à celle-ci, un soir, en me tenant la main pour la première fois.

𝕊𝕚𝕝𝕖𝕟𝕔𝕖 | Kakashi x ReaderOù les histoires vivent. Découvrez maintenant