Chapitre 19

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J'ouvre péniblement les yeux réveillée par la lumière du jour traversant mes rideaux. J'entends à l'extérieur qu'il pleut encore aujourd'hui et je soupire à cette idée. Je déprime déjà suffisamment, je n'avais pas besoin que la météo s'en mêle aussi. De toute façon, c'est hors de ma portée et je ne peux rien y faire à part l'accepter.
Silencieusement, je me lève, après avoir passé une nuit plus ou moins reposante. Je n'avais pas dormi depuis que nous étions rentrés alors mon corps avait lâché prise de lui-même pour me laisser me reposer.
Nous sommes rentrés il y a deux jours, et pour la première fois depuis notre retour, je vais descendre déjeuner avec les autres. L'appétit m'est revenu et mon estomac crie famine.
Je m'habille rapidement de l'uniforme comme d'habitude puis je sors de ma chambre pour rejoindre le réfectoire.

- Bonjour... marmonnai-je en arrivant.

Je n'ai même pas le temps de voir de qui il s'agit qu'on me saute dessus pour me serrer dans les bras.

- Amélia... je suis tellement contente de voir que tu vas mieux. Livaï m'a tout expliqué. Ça fait plaisir de te voir ici... me dit Hanji en me serrant contre elle.

- Hanji tu m'étouffes... dis-je la voix saccadée.

Elle s'écarte de moi en m'envoyant un sourire profondément triste.

- Je suis vraiment désolée pour Matthieu. Ça te dit qu'on aille déjeuner là-haut ?

Je jette un coup d'œil au réfectoire. Il n'y a que les gamins pour l'instant, qui me regardent tristement eux aussi. Je n'ai pas envie de subir leur pitié. Ça me suffit largement comme ça d'avoir à subir ma propre peine et surtout d'avoir reçu celle de Livaï hier.

- Oui, je veux bien.

Elle m'envoie un autre sourire et va chercher son plateau alors que j'en fais de même. Puis nous montons à l'étage dans sa chambre.
On s'installe sur la table en plein milieu de la pièce et commençons à déjeuner.

- Livaï était vraiment différent hier. Je ne le savais pas aussi doux, aussi compréhensif et aussi attentionné... je lui explique.

Elle me regarde en souriant, comme si elle s'attendait à une énorme révélation du type "on s'est embrassés" ou "on a couché ensemble".

- C'est parce qu'il comprend ta douleur. Il a beaucoup souffert dans sa vie lui aussi, me répond-elle en buvant sa tasse de thé.

- Je sais. Je l'ai compris hier quand il m'a dit qu'il avait des regrets. Je n'en savais rien et ça me fait mal de le savoir aussi triste.

- Il est pas en sucre tu sais. Mais il a vraiment pas eu une vie facile, c'est probablement ce qui l'a rendu aussi fort.

- Est-ce qu'on est vraiment obligé de passer par la souffrance pour devenir fort ? Parce que franchement si c'est le cas, j'abandonne toute de suite, soupirai-je en étalant ma confiture sur mon pain.

- On a tous une histoire, et on a tous souffert à un moment donné dans notre vie. Je suppose que personne ne peut entrer au bataillon sans avoir un jour ressenti une quelconque peine. A mon avis, c'est un passage obligatoire.

C'est aussi ce que je pense. La souffrance, que ce soit la perte d'un être cher, un traumatisme personnel, un sentiment d'être mal dans sa peau, finit un jour par nous rendre plus fort. Si on arrive à la surmonter, on finit par s'endurcir et elle nous permet de changer et d'apercevoir de nouveaux horizons de vie. Je ne suis probablement pas de ceux qui ont le plus souffert dans leur vie parmi tous les soldats qui habitent ici, mais j'ai aussi eu à surmonter des épreuves durant mon existence, et je m'en suis à chaque fois servi comme d'une force. Il ne me reste plus qu'à en faire de même avec la mort de Matthieu, même si ça me paraît insurmontable cette fois-ci.

Du Soleil à la Lune ~ [Livaï x OC] ~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant