Cauchemars. Sa longue nuit fut remplie de cauchemars. À propos de Jérémy qui le fuyait après la naissance du bébé, de Luna qui le moquait avec Arthur. Que des cauchemars.
En fin de matinée, Bébé finit par se calmer, mais laissa Jules désemparé. Son mal-être ne passait toujours pas quand son parrain arriva après le midi pour leur journée prévue.
— Bonne nouvelle si Bébé va mieux ! se réjouit Jérémy.
Jules quitta sa maison, en route vers celle de Jérémy. Elle se trouvait à une vingtaine de minutes en voiture. Dans un village modeste, elle faisait le pont entre la ville de Jules et la campagne perdue de ses grands-parents.
Le garçon retrouva la maison, enchanté. Ce jour-ci, l'herbe du jardin coloré était encore blanche du gel matinal. Les températures se montraient basses, mais aucune neige n'était tombée sur la région depuis le début d'hiver.
Non sans passer saluer Diane à la maison, Jules et Jérémy filèrent sur la terrasse. En été comme en hiver, accroché au mur de la maison, le panier de basket ne craignait jamais le vent. Le ballon déjà en main, Jérémy s'échauffa les poignets.
— Prêts ? demanda-t-il.
Jules acquiesça. Lorsque son parrain lui lança le ballon, toutes les sensations enfouies depuis des mois ressurgirent soudain. Une déferlante d'adrénaline parcourut son corps. Il dribbla avec tant d'énergie que le ballon rebondit bien trop haut, et lorsqu'il marqua dès le premier essai, il en sauta presque de joie.
Sans surprise, Jérémy était bien plus doué. Il avait délaissé le basket pour la musculation l'année dernière, mais les réflexes restaient toujours. Avec plusieurs années sans pratiquer derrière lui, Jules se montrait moins expert. Il n'était là que pour s'amuser, de toute manière.
Une fois le prochain panier marqué, tous deux soufflèrent sur leurs doigts frigorifiés. Leur gros manteau suffisait à peine à contrer le froid et leurs mains rougies ne demandaient qu'à se réchauffer. Tant pis : puisqu'ils voulaient jouer, ils le feraient peu importe ce que le ciel en pense.
Pendant une bonne demi-heure, parrain et filleul ne s'échangèrent rien d'autre que le ballon. Et puis Jérémy, alors que Jules posait fièrement suite à son énième panier, prononça les premiers mots :
— Tu as déjà pensé à reprendre le basket ? Ça pourrait être sympa.
— C'est maman qui t'a envoyé pour me persuader ?
— Pas du tout, rit le plus âgé. Je viens juste de me faire la réflexion, c'est tout.
— J'ai plus envie maintenant, tu le sais.
Jérémy lui rendit une mine triste, et Jules en rata son panier. Frustré, le garçon serra les dents.
— Je faisais trop de choses : basket, musique, club de peinture, et sans compter les compétitions le dimanche. À trop vouloir me donner d'activités, ma mère m'a dégoûté de tout.
— Ne lui en veux pas, s'attrista son parrain. Elle pensait bien faire.
Jules invita Jérémy à continuer de jouer. Mais ce dernier insista :
— Tu faisais trop de choses en une semaine, mais si tu ne reprenais que le basket, ça pourrait à nouveau te plaire. Et surtout, ça te ferait du bien, à toi et à Bébé aussi.
— Je n'ai pas le temps de toute façon.
— Menteur ! s'amusa le parrain. Lâche un peu ton portable, et tu verras : tu auras tout le temps qu'il te faut.
Sans doute. Cela dit, Jules n'eut guère envie de suivre son conseil pour autant. Profiter du panier de son parrain, c'était déjà bien suffisant. D'autant plus qu'il ne mentait qu'à moitié : pour se concentrer pleinement sur ses études, le garçon ne pouvait pas se permettre de passer ses soirées autre part qu'à son bureau. Autant se préparer avant sa première année de médecine.
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Un bébé dans la tête
Novela JuvenilLycéen, bon élève, fils unique : Jules a tout d'un adolescent banal. Ou presque. Car Jules ne vit pas comme tout le monde : il a un bébé dans la tête. Un bébé qui, lorsqu'il pleure, lui donne des maux de crâne affreux, des nausées, des vertiges, et...