ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟜

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Dire que je les déteste serait un euphémisme. Je les hais. Du plus profond de mon cœur. Cette haine viscérale qui me tord les tripes. Ils sont incapables de comprendre ce que je ressens. Ils s'imaginent qu'il est une lubie, une passe de mon adolescence trop turbulente. Seulement, il est bien plus que ça. Je l'aime comme un dingue. Il est ma bouée de sauvetage dans ce torrent d'émotions trop violentes que je ressens chaque jour. Il est le seul à vraiment me comprendre. Le seul à ne jamais avoir porté de jugement sur moi.

J'attrape mon portable -que j'ai pensé à récupérer avant de partir- pour l'appeler. Je ne veux pas juste lui envoyer un message. J'ai besoin de l'entendre. La ligne sonne, longtemps. Et je tombe sur sa messagerie. Les larmes me montent aux yeux. Je tente de le joindre à nouveau, sans succès. Sa présence est une envie viscérale qui me retourne complètement. La tête et le cœur. J'ai besoin de lui.

Trempé et les os gelés, je finis enfin par atterrir devant sa maison. Je toque à sa fenêtre. Heureusement qu'il a préféré prendre la chambre au rez-de-chaussée après le départ de son frère pour faire ses études. Une petite lueur s'échappe d'entre les volets en bois et j'entends sa fenêtre s'ouvrir, puis ces mêmes volets.

— Greg ? Qu'est-ce que tu fais là ?

Je ne lui laisse pas le temps de réagir que je passe une jambe par-dessus le mur, puis l'autre pour m'enfoncer dans la pièce.

— Merde ! Mais qu'est-ce que tu fous ? s'agace-t-il en chuchotant.

Je m'éloigne le plus loin possible de sa fenêtre, mais aussi de sa porte, au cas où il aurait l'idée de me mettre dehors.

Il referme derrière moi et je m'effondre sur son lit, à bout de souffle.

— Tu vas m'expliquer pourquoi tu m'appelles à onze heures du soir ? Et pourquoi tu décides de débarquer en voyant que je ne réponds pas ?

Il croise les bras, avec son air des mauvais jours. Il attend des explications, mais j'ai peur de ne pas pouvoir lui en fournir. Pas pour le moment.

— Franchement, tu mériterais que je te foute dehors, ajoute-t-il.

— Non ! hurlé-je en me remettant debout.

Il se jette sur moi, posant sa paume sur ma bouche.

— Si mes parents apprennent que tu es là, on est cuit ! chuchote-il un peu fort. Alors baisse d'un ton !

Son regard se fait des plus sérieux. Mais il a raison. Je finis par abdiquer, hochant la tête pour lui montrer ma bonne volonté. Je n'ai aucune envie de me faire attraper.

— Ok... Explique-moi calmement ce qu'il t'arrive, murmure-t-il en retirant sa main de mon visage.

Je me jette contre lui et le prends dans mes bras. Je serre sa taille avec le plus de force que je possède. Sa chaleur m'atteint aussitôt. Ça me fait tellement de bien.

— Prends-moi d'abord contre toi... le supplié-je.

— Hey...

Il répond à mon étreinte avec douceur, ses doigts se perdent dans mes cheveux. Personne ne comprendra jamais ce que je ressens quand je suis dans ses bras.

— Bébé, qu'est-ce qu'il t'arrive ? Tu sais que tu peux tout me dire...

Lui dire ? C'est impossible. Les mots se mélangent dans ma tête. J'ai dit la vérité. J'ai attendu que ma mère rentre pour tout avouer. Ils m'ont rejeté, insulté. J'ai craché des horreurs à mes parents. Je les hais. Ils me haïssent. Notre animosité est réciproque.

— C'est pas... Tu es pas... reniflé-je. Je suis... Ils... Je...

Ses mains entourent mon visage et il me pousse à le regarder. Mes yeux plongent aussitôt dans les siens, si beaux. Avec toutes les petites variations de vert que j'apprécie tant.

AubadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant