Aubade

ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟛𝟡

Je n'ai aucune idée de comment lui annoncer. Ni même si je dois vraiment le faire. Alexandre mérite tellement plus que ça. Pourtant, j'ai fait un choix et il a le droit de savoir lequel. Je pousse la porte du bar et rejoins mon ami assis autour d'une table. Son sourire se fait plus franc quand il me voit. Je me déteste déjà. On se dit bonjour et je m'assois en face de lui, à une distance raisonnable.

— Pourquoi tu m'as donné rendez-vous ici et pas au bar d'Estelle ? me demande-t-il, curieux.

— Tu la connais. Elle aurait fait sa curieuse.

— Tu n'as pas tort.

Je commande un thé au serveur et Alexandre boit son café, m'indiquant avec un signe de tête. Il doit attendre la raison de notre rendez-vous.

— C'est officiel avec Sébastien, lancé-je au bout d'un moment.

— Oh... C'est bien.

— Pourquoi tu mens ?

Son regard est fuyant. Il préfère tout sauf me regarder dans les yeux. Le serveur revient avec ma boisson chaude et je le remercie poliment. Alexandre attend qu'il reparte pour se pencher vers moi.

— Tu veux que je fasse quoi ? Que je te félicite ? Et bien bravo.

— Alex...

— Je te suis plus. Un jour, tu me dis que toi et moi, ça ne se fera jamais et le lendemain, tu me demandes de rester près de toi pour après me dire que t'es en couple et je devrais être content ? Qu'est-ce que tu cherches ?

— Je... Je sais pas...

— Il va falloir que tu trouves. Je ne peux clairement pas le faire pour toi.

Il soupire lourdement et s'enfonce au fond de sa chaise en croisant les bras. À sa place, je serai aussi agacé à ne pas me montrer capable de prendre une décision.

— Alex, c'est pas si simple. Si je n'avais pas cédé ce soir-là, ça aurait été différent.

— Donc c'est de ma faute ?

— C'est pas ce que j'ai dit. C'est juste... Trop compliqué.

Il fait grincer sa chaise sur le carrelage pour se rapprocher.

— Y a rien de compliqué là-dedans.

J'ai beau lui faire tout subir, il revient toujours vers moi et ce n'est clairement pas l'amour qu'il ressent qui peut l'expliquer. Ce ne peut pas être aussi simple.

— Armand, j'ai... J'ai rencontré quelqu'un. Je voulais être sûr qu'entre nous ça allait marcher, mais je crois que c'est bien parti.

— Comment vous êtes-vous rencontrés ?

— Sur une application. Ouais... Rien de très romantique. Mais ça marche jusque-là.

— Je suis content pour toi.

Il prend appui avec son coude sur la table et pose son menton sur sa main.

— On est vraiment de terribles menteurs tous les deux, avoue-t-il avec un rire.

— C'est pour ça qu'on s'entend si bien.

Il ne répond rien. Je ne sais même pas ce qu'il pourrait me dire pour que je me sente un peu moins mal.

— Tu ne m'as jamais dit si tu le regrettais vraiment...

— Ce que je pense n'a plus d'importance. On a chacun trouvé quelqu'un.

— Ouais...

Il finit son café et se lève pour prendre sa veste.

— Je te souhaite d'être heureux. Et c'est sincère.