ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟜𝟚

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J'attends depuis une heure du matin que le temps passe. Après un énième cauchemar, je n'ai pas réussi à me rendormir. Il était bien pire que tous les autres et bien plus violent. Je commence à manquer cruellement de sommeil.

Shepard passe le museau dans l'entrebâillement de la porte et grimpe sur le lit sans que je n'ai besoin de l'inviter. Il se couche de tout son long contre moi et repose la gueule sur ma poitrine. Je caresse le haut de sa tête avec mon pouce.

— Je crois qu'ils me détestent tous... Sébastien est tellement en colère. Et Alex. Même Grégoire...

Shepard remue un peu les oreilles et replace sa tête sur moi.

— Il te manque aussi...

J'essuie mes joues. Je ne dois pas me remettre à pleurer. Bien décidé à me changer les idées, je le repousse et quitte le lit pour essayer de manger quelque chose.

Je lance la machine à café et donne sa portion matinale à Shepard, qui s'empresse de la dévorer. Il ne perd jamais l'appétit. Mon téléphone sonne quand je place une tartine dans le grille-pain. Je le récupère rapidement et constate que Thomas cherche à me contacter.

— Allô ?

— Salut Armand...

Il a vraiment une petite voix.

— Bonjour, mon grand. Ça n'a pas l'air d'aller. Tu vas bien ?

— Ils veulent me foutre dans une famille d'accueil...

— Ça pourrait peut-être te faire du bien de pouvoir être entouré par des gens bienveillants, tenté-je de le rassurer.

— Mouais... En attendant, je vais encore devoir mentir à Antonin...

— Tu ne lui as rien dit ?

Il n'y a qu'un silence à l'autre bout du combiné. Je ne vais certainement pas le blâmer de n'avoir rien dit à son petit-ami. J'ai exactement fait la même chose. Alors je décide de changer de sujet.

— Thomas, si le foyer te confie à ces gens, ce sont forcément de bonnes personnes.

— Sûr ?

— Certain. Et tu sais que si ça ne va pas, tu peux m'appeler ou venir me voir.

— Merci. Et sinon... avec le père d'Ulrick ?

Il éclate de rire.

— C'était trop tentant, désolé.

— Je vais raccrocher avant que tu ne dises d'autres bêtises de ce genre, m'amusé-je.

— Bonne journée Armand !

Il raccroche en riant. Ce garçon est un sacré phénomène. Je retombe sur la dernière conversation avec le vétérinaire. Son message me comprime le cœur à chaque fois.

«Je sais même pas par quoi commencer tellement je me sens perdu, triste et en colère. Tu m'as dit que tu m'aimais. J'étais franchement surpris au début. Je ne m'attendais pas vraiment à tout ça... Encore moins à ce qu'on a fait ! J'étais dans tous mes états, mais surtout sacrément heureux. Jusqu'à ce que tu partes. Pourquoi t'es parti ? Pourquoi alors que... Je représente si peu à tes yeux ? Franchement j'en ai marre. Vraiment... J'ai honte de devoir te dire ça par message, car je ne suis pas ce genre de personne, mais je veux qu'on arrête de se voir. Je ne sais pas si j'ai envie de te pardonner une nouvelle fois. Alors pour le moment, je m'éloigne de toi. Jusqu'à ce que je me sente prêt à te reparler. Ou non. Prends tout de même soin de toi. »

Je n'ai même pas cherché à lui répondre. Qu'est-ce que je pourrais lui dire de toute manière ? J'ai été le pire de tous avec lui et je comprends son envie de s'éloigner. Si je pouvais, je m'éloignerais aussi de cette partie de moi qui me pourrit l'existence.

AubadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant