ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟚𝟠

329 41 47
                                    

Je suis ignoble. Comment je peux imaginer un seul instant lui faire ça. Lui dire ce que j'ai fait. Je suis probablement le pire des petits amis. Non. Je suis le pire garçon duquel il pouvait tomber amoureux. Ça me ronge depuis des jours, étant donné que je n'ai pas pu me résoudre à lui parler au téléphone.

J'ai tenu à le voir cette semaine, sans qu'il ne sache la réelle raison. Il doit penser que c'est simplement pour le voir et non pour avouer ma terrible faute.

Je toque à sa porte, l'estomac lourd. Il l'ouvre rapidement et me sourit. Je n'ose pas rentrer chez lui. Il me prend la main et ferme la porte derrière moi. Je fais un pas dans son studio et il me serre contre lui.

— Tu m'as manqué...

J'accompagne son étreinte timidement, l'angoisse prenant le pas sur le reste. Il va me détester, même me haïr pour ce que j'ai fait. Je le tiens plus fort. C'est peut-être la dernière fois que je l'aurai de cette manière contre moi.

Il se redresse un peu et m'observe avec tendresse. Il est ce qu'il y a de meilleur dans ma vie et j'ai tout gâché.

— Ça n'a pas l'air d'aller...

J'ai la gorge nouée. C'est avec lui que j'aurai dû passer cette soirée. Pas avec un inconnu. Les larmes me montent aux yeux et je baisse honteusement la tête. Je suis horrible.

Il prend mon visage entre ses mains et m'embrasse doucement.

— Greg, dis-moi ce qu'il se passe.

Je baisse honteusement les yeux. Les mots sont alignés dans ma tête sans que je n'ose leur faire passer la barrière de mes lèvres. Je l'ai trompé avec un autre.

— Je t'aime. Armand, je t'aime.

Je me sens obligé de lui dire avant le reste. Je ne veux pas qu'il l'oublie. Armand est tout ce qu'il me reste. Sans lui, je ne serai plus rien.

Il me prend la main et me fait asseoir sur son canapé contre lui. Je sèche rapidement mes larmes avant qu'il ne les voie.

— Moi aussi je t'aime, me rassure-t-il. Je ne veux pas que tu en doutes, même si on passe peu de temps ensemble.

Je me redresse un peu et retire mes mains des siennes, tordant nerveusement mes doigts. Je dois lui dire. Il doit savoir.

— J'ai... J'ai fait quelque chose.

Il ne dit rien, attendant que je poursuive. C'est d'autant plus dur avec lui qui m'observe, curieux d'en savoir plus. S'il pouvait lire dans mes pensées et savoir à quel point je me sens désolé.

— Écoute, si tu as zigouillé ton frère, plaisante-t-il avec un sourire, saches que je n'ai aucune peine à devenir complice en t'aidant à cacher le corps.

Je n'arrive pas à sourire.

— Tu commences à me faire peur. Dis-moi ce qu'il se passe...

— Je suis rentré voir ma famille à Noël, débuté-je.

— Je sais, c'est pour ça qu'on ne s'est pas vu des vacances. Ça c'est passé comment ?

— Très mal...

— Je suis désolé de ne pas avoir été là, s'excuse-t-il. La prochaine fois, on fêtera Noël ensemble, promis.

— J'ai rencontré quelqu'un, reprends-je toujours hésitant.

— Oh... C'est bien si tu te fais des amis.

Il a tellement confiance en moi qu'il ne pense jamais au pire.

—Armand, j'ai... Avec lui, on a... Enfin c'était pas...

Il se redresse sur son canapé, comme si ces mots entrecoupés lui suffisaient pour tout comprendre.

— Qu'est-ce que t'as fait ?

— Armand... Je pensais pas...

Son nom s'échappe dans un souffle. Il se lève, se frottant la joue.

— Regarde-moi dans les yeux et jure-moi qu'il ne s'est rien passé avec lui...

Les larmes aux yeux, je finis par tout lui dire. La dispute avec mes parents et mon frère, la boîte de nuit, Samir, les verres qu'on a bus ensemble et ce qu'il s'est passé dans la rue. Ce que je regrette le plus.

— Si tu n'allais pas bien, tu aurais dû m'appeler ! s'énerve-t-il. Je t'aurai soutenu comme je l'ai toujours fait ! Pourquoi tu t'es jeté dans les bras d'un inconnu ? Je te reconnais plus...

— Je voulais pas faire ça, je te le jure !

— Arrête de promettre ce genre de choses ! Tu savais très bien ce que tu faisais !

Je me lève et tente de le ramener près de moi. Il retire ses mains des miennes. Mes barrières craquent et je m'effondre en larmes.

— Je te demande pardon ! C'est toi que j'aime ! Pas lui ! Je n'aime que toi !

— Quand on aime quelqu'un, on fait pas ça !

Il se met lui aussi à pleurer. C'est moi qui lui fais du mal.

— Ce qui me dégoûte le plus, c'est de me rendre compte que tu avais tellement peur que je me jette dans les bras d'un autre, mais que c'est toi qui a fini par me tromper.

— Je t'ai pas trompé...pleuré-je. Je savais que c'était une erreur et je l'ai repoussé !

— Tu t'entends ? Un autre mec que moi t'as vu à poil et allait te tailler une pipe ! Il t'a touché et embrassé ! Comment tu as pu me faire ça, alors que...

Il se laisse tomber sur le canapé et m'observe avec toute la tristesse du monde. Je suis horrible avec le garçon le plus merveilleux de l'univers. Je ne mérite absolument rien de bien.

— Dis-moi, je n'ai pas été assez présent pour toi, je le sais, mais je te rends si malheureux que ça ?

Je m'accroupis en face de lui, lui attrapant les mains. Je nie en bloc, secouant la tête et embrasse ses doigts.

— Je suis heureux avec toi, tous les jours. Malgré la distance, c'est toi que je veux. T'es l'homme de ma vie, Armand.

— Toi aussi, Grégoire...

J'attrape entre mes mains son visage et dépose un léger baiser sur ses lèvres. Il repose son front contre le mien et ferme les yeux. Je m'accroche à lui, de toutes mes forces. Sans lui, je vais sombrer.

— Alors c'est pour ça que je veux que tu t'en ailles...soupire-t-il contre moi.

— Armand...

— Je ne vais pas te pardonner facilement et surtout pas aujourd'hui. Alors pour le moment, je veux que tu sortes de chez moi.

Je me relève et il ne quitte pas le canapé. Je ne lui ferais pas l'affront de le supplier de me laisser rester. J'embrasse rapidement sa joue, le cœur en miette et les larmes aux yeux.

— Je t'aime comme je n'aimerais jamais aucun autre... déclare-t-il, les joues humides.

Je l'abandonne seul dans son studio, la poitrine déchirée en milliers de morceaux. Je continue de pleurer dans l'ascenseur, au point de m'effondrer en boule dans un coin.

Je suis la pire des ordures.

Mes parents ont raison. Tout le monde serait bien plus heureux sans moi...

AubadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant