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— Harry Potter ? Harry Potter !

La voix nasillarde de la petite dame vêtue de vert coupa Harry dans son élan. Il venait de traverser le Ministère d'un pas vif, défiant quiconque de venir lui adresser la parole. La mine peu engageante, le teint d'une pâleur presque grisâtre, il attisait la pitié, non l'envie. S'ajoutait à cela un visage fermé qui dissuadait les plus courageux de s'approcher de lui.

La sorcière replète balaya ces avertissements pour tenter de retenir l'attention de l'Auror. L'après-midi était déjà bien entamée et Harry avait, semblait-il, passé le début de la journée sur le terrain. Des affaires quelconques, probablement indignes de lui, mais qui demandaient peu d'effort et une concentration minime. Les hommes dont Harry avait la charge s'étaient gardés de signaler à leur supérieur sa négligence journalière et pour le moins inhabituelle.

Ainsi, le sorcier fut tenté de poursuivre sa route, d'ignorer les appels et de rejoindre la solitude de son bureau. Seulement, il lui fallut céder face à l'insistance de l'employée du Ministère. Ses petites lunettes en équilibre sur le bout de son nez, elle n'attendit pas qu'Harry soit arrêté pour fondre sur lui. Sa récalcitrance ne lui sauta pas aux yeux et la secrétaire quitta son poste pour se saisir d'une pile de dossiers. Elle rejoignit l'Auror et arbora son air le plus pincé. Si elle ne lui arrivait pas à mi-poitrine, Harry aurait pu la confondre avec une certaine professeure de Métamorphose.

— Eh bien, monsieur Potter, j'ai bien cru que vous ne m'entendriez jamais. Ayez donc pitié pour mes pauvres cordes vocales que vous mettez à rude épreuve.

— Veuillez m'excuser madame Gopiwls, j'étais plongé dans mes pensées, rétorqua Harry, sans se laisser démonter, mais sans toutefois faire preuve d'amabilité.

Elle pinça les lèvres et sa bouche ne forma bientôt plus qu'une ligne étroite et désapprobatrice. Si le jeune homme avait été en pleine possession de ses moyens, il se serait sans doute inquiété, bien qu'il n'était pas rare qu'il soit apostrophé. La sorcière se pencha et énonça, sur le ton de la conspiratrice :

— Le Ministre de la Magie vous attend dans son bureau.

Harry sourcilla. Même la plus magistrale des migraines ne saurait l'empêcher de s'étonner. Pire, de s'inquiéter. Il avait toujours fait en sorte que personne n'ait à lui reprocher sa conduite et il y avait bien longtemps qu'il n'avait pas agi dans le dos du Ministère. Cela lui rappelait l'époque où celui-ci avait été investi par Voldemort, d'abord officieusement, puis officiellement, lorsque la personnalité la plus éminente du monde magique avait été écartée.

Décidément, tout le portait à la comparaison.

D'abord son insubordination, ensuite ses actes irréfléchis, et enfin la vieille rivalité qui l'opposait au plus venimeux des Serpentards.

Madame Gopiwls l'étudia derrière l'écran fumé de ses verres rectangulaires. Elle humecta ses lèvres parcheminées et Harry tâcha de faire bonne figure. Il se surprit à afficher un air prétentieux, intouchable, de ceux qu'il exécrait, mais force était de constater qu'il faisait un rempart efficace contre les soupçons.

— J'ai eu une journée harassante et j'ai encore plusieurs rapports à boucler avant la fin de la semaine, prétexta-t-il.

— Je suis certaine que vous trouverez, dans votre emploi du temps bondé, quelques minutes de votre temps à accorder à notre Ministre.

Puis, comme si la précision s'imposait, elle ajouta, dans un souffle :

— C'est urgent, monsieur Potter, vous vous doutez bien que nous vous aurions contacté par hibou pour une entrevue plus... officielle, si tel n'était pas le cas.

Alta nocteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant