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Même salon, même personnes réunis autour de la même table basse, et même discussion.

Ou simulacre de discussion, car Blaise Zabini, ses longs doigts enlacés sur ses cuisses, semblait décider à faire avouer aux Aurors leur incompétence.

— J'ai appris que Draco s'était évadé d'Azkaban. Décidément, il serait peut-être temps de revoir la sécurité de cette prison... déclara-t-il, innocemment.

Ron grogna une réponse inintelligible. Blaise savait que Draco s'était évadé, bien entendu, mais la nouvelle avait été rendue publique, et cela changeait considérablement la donne.

— Déjà que la moitié de la société sorcière britannique tremble à l'idée qu'un nouveau Seigneur des Ténèbres sème la terreur... Vous vous ennuyez, chez les Aurors, pour créer une réplique aussi dramatique ? Si on en écoute la Gazette, on pourrait presque croire qu'Il est revenu !

Blaise s'étira paresseusement, dans une grâce quasi théâtrale, sous le regard dubitatif des deux autres. Il était le seul à s'amuser, à se réjouir de ces retrouvailles renouvelées.

— Un peu de thé ? Cette fois, vous m'avez laissé le temps de me vêtir comme il se doit. J'ai même eu le temps de demander au personnel de faire un peu de thé. Alors ?

— Très peu pour moi, renifla Ron.

Harry lui jeta un regard en biais. Il avait très bien compris à quel jeu jouait Blaise. Lors de leur dernière visite, il s'était cru en position de supériorité pour bien des raisons, mais là... Là, ils revenaient la queue entre els jambes quémander des réponses. Il n'en fallait pas plus pour flatter l'ego de celui qu'ils avaient méprisé. Quelque part, c'était une revanche servie plusieurs années plus tard.

Ils devaient aller dans son sens s'ils voulaient obtenir des réponses sans que Blaise ne s'amuse à les faire tourner en rond durant des heures.

Ainsi, Harry acquiesça. Blaise jubilait. Il leva la main et une jeune femme, si discrète qu'elle aurait pu appartenir au riche ameublement de la demeure, s'approcha pour servir deux tasses de thé.

— Je vous aurais bien servi un verre d'alcool, mais j'imagine qu'il est un peu trop tôt pour vous.

Harry n'avait pas manqué le verre d'alcool moldu qui trônait sur la table. Il ne datait pas de la veille. Blaise n'arrosait pas son petit-déjeuner au café ou au thé, justement. Quelque part, ce constat fragilisa l'assurance d'Harry et le mépris qu'il réservait à son ancien camarade. Déjà à Poudlard, il savait user du sarcasme et cacher le fond de sa pensée derrière un verbe piquant. Rien n'avait changé, si ce n'était que la tendance s'était renforcée, comme si Blaise avait bien plus de choses à enfouir, bien plus de choses à museler pour conserver sa réputation intacte. Harry songea que cela en disait long sur lui et que la guerre, bien qu'il la tournait en dérision, avait laissé ses traces, ses difficultés, pour les élèves de Serpentard plus que pour tous les autres.

Harry plongea ses lèvres et manqua de se brûler. Blaise avait suivi ce geste et un éclat de satisfaction s'était logé à l'intérieur de ses yeux bleus.

— Zabini, on n'est pas venus pour prendre un thé et pour décréter si oui ou non, la Gazette exagère la menace qui pèse sur le monde sorcier, dit finalement Harry.

— Ah, vraiment ? Vous ne me rendez pas visite pour le bonheur de ma compagnie ? Tu vas me froisser, Potter, claironna Blaise.

Les yeux de Ron s'étaient étrécis. Harry l'entendait fulminer depuis sa place et l'implorait silencieusement de ne pas prendre part à ces provocations. Il savait que c'était peine perdue, que Ron contenait son mécontentement, mais que si la conversation ne prenait pas un autre démarrage, il finirait par tenir un discours malencontreux.

Alta nocteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant